Motions de censure contre Sébastien Lecornu : que vont voter les différents groupes à l'Assemblée nationale ?

Le Premier ministre a obtenu le soutien du Parti socialiste, en promettant une suspension de la réforme des retraites. Toutefois, d'autres formations, à gauche et à l'extrême droite, veulent précipiter la chute de Sébastien Lecornu.

Article rédigé par franceinfo
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Le président du groupe Droite républicaine, Laurent Wauquiez, s'exprime devant les députés, à l'Assemblée nationale, le 14 octobre 2025. (SERGE TENANI / HANS LUCAS / AFP)
Le président du groupe Droite républicaine, Laurent Wauquiez, s'exprime devant les députés, à l'Assemblée nationale, le 14 octobre 2025. (SERGE TENANI / HANS LUCAS / AFP)

Sébastien Lecornu a-t-il sauvé sa place à Matignon ? Le Premier ministre, qui doit affronter deux motions de censure jeudi 16 octobre, semble parti pour rester après avoir annoncé la suspension de la dernière réforme des retraites, condition posée par le PS pour ne pas faire tomber le gouvernement. Les deux textes, l'un déposé par l'extrême droite, l'autre par La France insoumise, seront débattus à partir de 9 heures. Il faut une majorité absolue de députés, soit 289 voix, pour qu'une de ces propositions soit adoptée. Quelle est la position de chacun des partis et groupes parlementaires au sein de l'Assemblée ? Franceinfo fait le point.

La France insoumise : censure

Le groupe mené par Mathilde Panot entend renverser Sébastien Lecornu. En revanche, traditionnellement, LFI comme les autres partis de gauche refusent de voter en faveur des motions déposées par l'extrême droite.

La gauche radicale considère la censure de Sébastien Lecornu comme une simple étape. Le parti continue de réclamer la démission d'Emmanuel Macron. "Nous allons redéposer une motion de destitution qui a été rejetée la semaine dernière en bureau du fait du RN, qui a refusé de voter pour la recevabilité de cette motion", a déclaré Mathilde Panot.

Gauche démocrate et républicaine : censure

"Le groupe GDR votera pour l'essentiel de ses membres la motion de censure" de la gauche, a déclaré le député communiste Stéphane Peu mardi matin. "Nous avons été de toutes les rencontres avec Sébastien Lecornu, et on voit bien que de toute façon, la volonté est de continuer la politique qui est mise en œuvre depuis 2017, coûte que coûte, quoi que disent [et] votent les Français", a déclaré le président de ce groupe composé de députés communistes et ultramarins.

Les Ecologistes : censure

"Le discours de politique générale de Sébastien Lecornu ne change rien", dénonce le parti sur X, ajoutant que "les Ecologistes censureront son gouvernement, parce qu'il n'a rien à faire là et parce qu'il va défendre un budget inacceptable sur le plan social, environnemental et fiscal". "Notre groupe ne peut accepter que ce gouvernement continue de mener une politique qui a été rejetée, qu'Emmanuel Macron continue d'avoir la mainmise sur Matignon, de concentrer tous les pouvoirs alors que lui-même est détesté", a ajouté la présidente du groupe Écologiste et social, Cyrielle Chatelain, à l'issue de la déclaration de politique générale.

Toutefois, cette position ne fait pas l'unanimité. Delphine Batho, ancienne ministre de l'Ecologie, a annoncé mardi qu'elle ne voterait pas la censure. Dans un communiqué de son parti, Génération écologie, elle déclare refuser "la politique du pire (...) dans un contexte géopolitique dangereux".

Parti socialiste : non-censure

Sébastien Lecornu ayant fait part de sa volonté de suspendre la réforme des retraites, le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a donné pour consigne de ne pas soutenir les motions de censure. "Je reste dans l'opposition, mais je veux que le débat ait lieu", ajoute le patron des socialistes sur TF1, qui ajoute qu'"après avoir entendu le Premier ministre qui a ouvert [la voie] sur un certain nombre de sujets, je souhaite effectivement que nous puissions avancer".

Olivier Faure assure que cette décision a été prise "collectivement". "J'attends que tout le monde la respecte parce que quand il y a un vote et qu'il est quasi unanime, il doit être respecté", a-t-il ajouté.

Mais des élus PS pourraient ne pas respecter la consigne du parti. "Le compte n'y est pas. Jeudi, je censure", écrit par exemple sur X le député Paul Christophle, premier secrétaire fédéral du PS de la Drôme. Cinq députés d'Outre-mer siégeant au groupe socialiste ont également annoncé mercredi soir qu'ils voteraient la censure. "A la lecture de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, les Outre-mer sont appelés à payer solidairement et disproportionnellement la note de la mauvaise gestion des finances à l'échelle nationale", dénoncent Christian Baptiste, Béatrice Bellay, Elie Califer, Philippe Naillet et Jiovanny William.

"J'appelle les députés socialistes à désobéir aux consignes et à voter la censure pour épargner aux Français les souffrances qui leur sont promises, et à respecter les engagements pris devant les électeurs l'année dernière", a écrit de son côté le coordinateur national des insoumis, Manuel Bompard, sur X. "Je crois en l'unité de mon groupe", a rétorqué sur franceinfo le chef des députés PS Boris Vallaud.

Renaissance : non-censure

Le parti fondé par Emmanuel Macron apporte sans surprise son soutien au Premier ministre nommé par le président de la République. "Nous voulons que le gouvernement réussisse", a promis à la tribune de l'Assemblée Gabriel Attal, le secrétaire général du parti Renaissance et président du groupe Ensemble pour la République. "Vous vous êtes donné une mission : donner un budget à la France. C'est aussi la nôtre."

Les Démocrates : non-censure

Le MoDem, le parti de l'ex-Premier ministre François Bayrou, a toujours été constant dans sa fidélité à Emmanuel Macron depuis 2017. Les députés du groupe centriste soutiendront eux aussi le gouvernement. Le président du groupe, Marc Fesneau, se dit ouvert au débat autour d'une suspension de la réforme des retraites, mais affirme à la tribune de l'Assemblée qu'il s'agit d'"un pari ou un risque pour nos finances publiques". Il demande à "accompagner toute décision d'un esprit de responsabilité".

Horizons : non-censure

Le parti de l'ex-Premier ministre Edouard Philippe ne votera pas non plus la censure. Le président du groupe Horizons & Indépendants à l'Assemblée, Paul Christophe, dit croire "à une autre voie : celle de la responsabilité et du compromis, pas celle du renoncement". "Le compromis, oui. Mais nous ne voterons pas n'importe quoi non plus !", ajoute l'élu sur X. Le parti s'était dit opposé à tout retour sur la réforme des retraites. "Si j’étais députée, je voterais, évidemment, la censure du gouvernement, qui brade l’avenir des Français sur l’autel d’intérêts partisans", a d'ailleurs lancé mardi soir sur X la vice-présidente du parti et patronne des Pays de la Loire, Christelle Morançais.

Les Républicains : non-censure

Après s'être déchirés sur la participation au gouvernement de Sébastien Lecornu, les députés Les Républicains (LR) ont reçu comme consigne de ne pas faire tomber le Premier ministre et son équipe. "S'il y a censure, ce sera dissolution et pas de budget. Personne dans le groupe ne peut voter la censure", a déclaré le président du groupe Droite Républicaine, Laurent Wauquiez, lors d'une réunion de groupe, mardi matin. Le patron du parti, Bruno Retailleau, a néanmoins dénoncé un gouvernement de Sébastien Lecornu "otage des socialistes".

Union des droites pour la République : censure

L'ex-patron de LR Eric Ciotti, fondateur de l'Union des droites pour la République, est cosignataire de la motion de censure avec plusieurs députés de son parti. "La dissolution est inéluctable", écrit sur X l'élu d'extrême droite, qui appelle Les Républicains à soutenir la censure. "Laurent Wauquiez, qui défendait hier l'indexation des retraites, accepte aujourd'hui qu'on les désindexe", "l'exact contraire de ce que la droite a toujours porté", écrit sur X Eric Ciotti. "Il est temps d'être cohérent : censurez jeudi matin", ajoute l'élu, qui propose également une alliance à Bruno Retailleau avec l'UDR et le RN.

Rassemblement national : censure

Le Rassemblement national, qui a déposé l'une des deux motions de censure, va voter pour renverser le gouvernement de Sébastien Lecornu. "Nous n'avons strictement rien à attendre de ce gouvernement et il est largement temps de retourner aux urnes", a réagi la présidente du groupe, Marine Le Pen, après la présentation du budget.

Malgré la consigne donnée par le PS à ses députés, l'ancienne candidate à la présidentielle "a toujours espoir" de voir la censure votée par les parlementaires, affirme-t-elle sur France Inter. Le RN s'est pour cela dit prêt à soutenir la motion de censure déposée par LFI. "On est ouvert, on a déjà voté une motion de censure déposée par la gauche", a déclaré lundi sur franceinfo le député de l'Oise et porte-parole du RN Philippe Ballard.

Libertés, indépendants, outre-mer et territoires : pas de consigne

Fidèle à sa composition hétéroclite, le groupe Liot et ses 22 députés n'ont pas de consigne de vote. "Notre groupe, très majoritairement, ne votera pas la censure", a affirmé mardi le député des Vosges Christophe Naegelen à la tribune de l'Assemblée à l'issue de la déclaration de politique générale, "mais nous attendons des gages et des actes concrets".

Le groupe Liot avait rappelé sur son compte X mardi "la position d'indépendance du groupe qui est de rester dans l'opposition constructive", réclamant notamment "un geste évident de Sébastien Lecornu sur la suspension de la réforme des retraites, la contribution des plus grandes fortunes et la lutte contre les niches fiscales, ainsi qu'un signe d'ouverture et de respect de nos institutions républicaines".

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