Canicule et allergies : pourquoi vos symptômes pourraient durer plus longtemps cet été

Article rédigé par Camille Laurent
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
L'OMS estime que 50% de la population souffrira d'une allergie en 2050. (EMMA BUONCRISTIANI / MAXPPP)
L'OMS estime que 50% de la population souffrira d'une allergie en 2050. (EMMA BUONCRISTIANI / MAXPPP)

Les allergies aux pollens concernent, à l'heure actuelle, environ 20% des enfants âgés de plus de 9 ans et 30% des adultes, selon l'Anses, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

"Une semaine très compliquée pour les allergiques." La prévision émane de Samuel Monnier, ingénieur en aérobiologie. Selon lui, "le pays connaît, mi-juin, un pic de pollens et la situation va rester compliquée jusqu'à fin juin, début juillet". En effet, jeudi 19 juin, la France est entièrement orange, soit un indice "élevé", sur la carte d'allergies au pollen d'Atmo France disponible sur franceinfo. "Des températures élevées, le temps ensoleillé et un peu de vent, comme en cette mi-juin, sont des conditions optimales pour la dispersion des pollens dans l'air", explique Samuel Monnier.

"Une aggravation des pollens"

"Ça ira mieux à partir de juillet", tient à rassurer Samuel Monnier. "Aujourd'hui, les oliviers, les châtaigniers et les tilleuls sont en fleurs, mais la période de floraison des arbres touche à sa fin", détaille l'ingénieur en aérobiologie. "Le pic de pollen des graminées, ces hautes herbes que l'on trouve partout, le long des routes et dans les parcs et jardins, est arrivé beaucoup plus tôt cette année, poursuit-il, car il fait beaucoup plus chaud et il a moins plu aux mois de mai et juin, contrairement à l'année dernière." Autre plante très allergisante, l'ambroisie, une espèce exotique invasive qui vient d'Amérique du Nord, libère quant à elle du pollen aux mois d'août et septembre.

De plus en plus de personnes sont allergiques aux pollens, selon les allergologues qui se disent débordés. Séverine Fernandez, présidente du syndicat français des allergologues, évoque une "épidémie sous-estimée par les autorités sanitaires". "On a une aggravation des pollens. Les patients viennent en consultation avec des symptômes beaucoup plus sévères", alerte la médecin. "En France, 30% de la population est allergique aux pollens, contre 3% il y a 30 ans", corrobore Samuel Monnier. Ces chiffres sont "en augmentation ces dernières années dans les pays industrialisés", selon le ministère de la Santé. Et la situation ne va pas s'améliorer. Selon l'OMS, en 2050, 50% de la population européenne souffrira d'allergies respiratoires, néanmoins celles-ci ne seront pas liées qu'aux pollens, mais aussi aux poils de chat, aux acariens, etc.

Les facteurs aggravants du changement climatique

Avec le réchauffement climatique, la saison des pollens est plus précoce et plus longue. Selon l'épidémiologiste Kévin Jean, professeur à l'ENS, plusieurs études scientifiques ont établi un lien "entre l’augmentation des températures et la durée de la saison des pollens mais aussi les concentrations de pollens dans l’air". "Les saisons démarrent de plus en plus tôt, confirme Samuel Monnier, ingénieur en aérobiologie. Avant, on arrêtait nos capteurs en hiver, aujourd'hui on les laisse allumés car les aulnes et les noisetiers fleurissent bien plus tôt, dès le mois de décembre cette année alors qu'il y a une dizaine d'années, ils fleurissaient en février."

"Ces hivers de plus en plus doux sont en lien avec le réchauffement climatique."

Samuel Monnier, ingénieur en aérobiologie

à franceinfo

Autre conséquence du changement climatique, certaines espèces s'adaptent à d'autres régions, comme l'olivier et le cyprès qui progressent du sud vers le nord et apportent avec eux leurs pollens. A contrario, d'autres espèces régressent, notamment le hêtre et le bouleau, qui supportent moins la chaleur. "L'ambroisie, l'espèce invasive à forte production de pollens, qui se propage un peu partout en Europe, est un exemple typique de la migration des espèces", ajoute Kévin Jean, épidémiologiste.

La pollution de l'air est également un facteur aggravant. "Une atmosphère plus riche en CO2 conjuguée à des températures plus élevées stimule la croissance des plantes et leur production de pollens", observe Samuel Monnier. "La pollution atmosphérique augmente la vulnérabilité des individus en les rendant plus sensibles aux pollens", complète Kévin Jean.

Des gestes à adopter pour réduire les risques

Des applications, comme France pollens, et des sites, comme celui d'Atmo France permettent d'alerter les personnes allergiques afin qu'elles prennent leurs précautions. Celles-ci, consistent à "prendre un traitement antihistaminique dès que les symptômes apparaissent, ou à consulter un médecin ou un allergologue si on n'a pas de traitement", rappelle Samuel Monier. Il y a aussi de bons gestes à adopter : "se rincer les cheveux à la fin de la journée car ceux-ci sont des capteurs de pollens, faire sécher le linge à l'intérieur, aérer le matin ou le soir car le pollen est produit en journée, fermer les fenêtres en voiture, porter un masque à l'extérieur, éviter les activités sportives en extérieur en cas de pic de pollen", énumère encore Samuel Monnier

Au-delà des précautions individuelles, Kevin Jean invite à réfléchir à l'échelle des villes, notamment sur le choix des essences en ne plantant pas uniquement des allergisants. Le Japon, par exemple, a annoncé en 2023 un plan pour lutter contre les allergies causées par les nombreux cèdres de l'archipel qui prévoit notamment l'abattage d'arbres pour les remplacer par des espèces produisant moins de pollen. En France, de nombreuses municipalités commencent à diversifier leurs plantations.

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