"Depuis le 11 janvier 2015, le débat sur les valeurs de la République a plutôt progressé"

Les 10 et 11 janvier 2015, quatre millions de Français sont sortis dans la rue en réaction à l'attaque terroriste dans les locaux de Charlie Hebdo. Pour le sociologue Jean Viard, ces attentats ont réveillé les consciences et relancé le combat pour la défense des valeurs de la République.

Article rédigé par Benjamin Fontaine
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Près de deux millions de personnes rassemblées à Paris le 11 janvier 2015 place de la République. (MICHAEL BUNEL / LE PICTORIUM / MAXPPP)
Près de deux millions de personnes rassemblées à Paris le 11 janvier 2015 place de la République. (MICHAEL BUNEL / LE PICTORIUM / MAXPPP)

Les 10 et 11 janvier 2015, quatre millions de Français ont manifesté à Paris et ailleurs en France pour défendre la liberté d'expression après l'attaque contre Charlie Hebdo. Ce moment de concorde nationale et internationale a aussi relancé le débat sur les valeurs de laïcité et de liberté d'expression.

franceinfo : Est-ce qu'on a assisté au dernier grand moment de concorde nationale ?

Le dernier au sens où il n'y en aurait plus dans le futur, je ne dirais pas ça, je n'en sais rien, mais c'était certainement le plus fort. Il faut insister sur le fait que c'était aussi un moment de concorde internationale. Une quarantaine de chefs d'États du monde entier ont assisté à cette immense manifestation. Certains venaient du monde musulman. Ces attaques ont choqué le monde entier. Cela a été une sidération inimaginable et ça nous a fait réfléchir. Vous savez, on passe devant les mairies, on lit "liberté, égalité, fraternité" sans trop réfléchir. Ça nous semblait tellement naturel qu'on en parlait plus. Depuis, on a lancé des débats dans les écoles et ailleurs sur notre système de valeurs. Aujourd'hui, une partie de la jeunesse est plus ouverte à la diversité des pratiques. Dans le même temps, certains partis politiques instrumentalisent les immigrés et d'autres les musulmans dans un but électoral. Mais je pense que le débat sur les valeurs a plutôt progressé.

Un débat sur les valeurs qui progresse, mais dans le même temps, on a vu les actes antisémites augmenter, des enseignants assassinés, l'extrême droite gagner du terrain...

On entre dans un monde de chaos entre les cultures, entre les territoires. Nous vivons une immense révolution industrielle. On communique tous les uns avec les autres et ça rend les choses très compliquées. Quand ce genre d'événement survient, on en parle dans le monde entier. Il y a des tas de gens pour qui le mot "liberté" n'a quasiment pas de sens, qui se sentent agressés. C'est très compliqué parce qu'il faut évidemment protéger nos valeurs tout en pensant au fait que les discours sont médiatisés mondialement. Il y a un apprentissage de tolérance et de respect tout en soutenant parfois des gens avec qui on n'est pas forcément d'accord. Je ne suis pas un lecteur de Charlie Hebdo mais c'est le principe de liberté d'expression qu'il faut défendre.

Que reste-t-il selon vous de cet esprit de fraternité du 11 janvier dans la société ? Qu'est ce qu'on a fait collectivement pour qu'il survive ?

Je pense qu'on a fait beaucoup dans les écoles. D'ailleurs, si les enseignants ont des difficultés, c'est aussi parce qu'ils sont remontés au combat. Ça semblait tellement acquis que c'était même plus la peine d'en parler. On est dans un réarmement d'un combat qui va être terrible, qui est terrible, mais qui est une nouvelle étape du monde dans laquelle on est entrés.

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