"C'est mon film le plus personnel" : Pierre Richard se raconte dans son dernier long-métrage
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Mercredi 17 septembre 2025, l'acteur et réalisateur Pierre Richard. Son film, "L'homme qui a vu l'ours qui a vu l'homme" sort aujourd'hui au cinéma.
Pierre Richard est entré dans nos vies, dans notre salon, au point d'intégrer la photo de famille. Les personnages burlesques de ses débuts, incarnés avec délectation, n'ont eu de cesse de nous faire rire, de nous interpeller sur une chose, il a toujours été lui-même. Il n'a aucune difficulté à devenir un jouet, à jouer le fugitif, ou à incarner ce grand blond avec cette chaussure noire. Même s'il a mis du temps à se lancer dans ce métier, il faut avouer qu'il était fait pour lui et beaucoup de réalisateurs ne s'y sont pas trompés. À ses 91 printemps, il revient à la réalisation avec L'homme qui a vu l'ours qui a vu l'homme, une comédie où il nous raconte l'histoire d'un jeune autiste et d'un vieil homme qui n'aime pas la vie en société, mais plutôt les grands espaces, la nature et les animaux. Il vit dans une cabane dans le sud de la France, avec pour seul compagnon un ours qui vient lui rendre visite après s'être échappé d'un cirque itinérant.
franceinfo : Vous êtes sans aucun doute au cœur d'une réalisation particulière et j'ai l'impression que vous nous tendez la main et que vous vous racontez comme jamais ?
Pierre Richard : Je ne sais pas si je tends la main, mais en tout cas, ce qui est sûr, c'est que c'est mon film le plus personnel. J'y raconte ce que je ressens, ce que je rêve et pour moi, le rêve est essentiel. J'y raconte les gens avec lesquels je vis beaucoup dans l'année, c'est-à-dire les gens du Sud, les Occitans, avec leur étrangeté, leur drôlerie et leur cocasserie.
"J'ai eu envie quand même d'aller un peu plus loin et de raconter qui je suis dans ce film, pourquoi j'existe et comment j'existe."
Pierre Richardà franceinfo
Avec mon goût pour la nature, pour les arbres, ceux qu'on est en train de faire disparaître à tour de bras, notamment en Amazonie, mon intérêt pour les animaux et mon ours. Il faut savoir que cet ours a vraiment vécu. Il s'est sauvé d'un parc animalier à 40 kilomètres de chez moi et il a abouti dans ma propriété. Mais je n'étais pas là, sinon, je l'aurais caché. Tout ça, c'est ma vie, c'est ce que j'ai envie de raconter, de dire. Mes relations avec le petit sont particulièrement touchantes et drôles.
Il a cette différence que vous avez toujours eue finalement. J'ai l'impression que vous avez senti très tôt et très jeune, que vous aviez cette sensibilité ?
On est toujours un peu ce qu'on était pendant l'enfance. D'abord, je me suis tapé quand même sept ans de pension, d'où mon goût pour l'indépendance et pour la liberté. J'ai horreur des grilles, qui vous enferment, pas forcément des grilles matérielles, on est enfermé, même psychologiquement. J'étais un oiseau qu'on a mis en cage, alors mon métier m'a permis de voler un peu de temps en temps, d'ouvrir les grilles. Ce métier m'a donné cette liberté, cette indépendance qui m'a manqué pendant que j'étais jeune.
Vous dépeignez cette famille bourgeoise, on touche à l'aristocratie et cela se passe dans un château. Vous avez vécu au château de la Rougeville, à Saint-Saulve, près de Valenciennes, avec un père douloureusement absent. Vous avez eu un grand-père extraordinaire qui était porteur de rails, il est devenu entrepreneur et de l'autre, vous aviez ce grand-père polytechnicien qui n'a eu de cesse de vouloir vous enfermer et c'est le traumatisme que vous avez toujours porté en vous.
Je n'en veux pas à ce grand-père aristocrate, il ne pouvait pas comprendre que tout le monde n'a pas forcément envie d'être polytechnicien. Alors évidemment, l'autre, c'est un émigré italien qui a traversé tous les Apennins, qui est remonté jusque dans le nord de la France pour trouver du travail. Quand j'étais près de son lit où il allait mourir, mon grand-père a dit à ma mère, "Ce sera le seul petit-fils qui va réussir très fort dans la vie". Cette phrase m'est restée dans la tête et j'ai eu confiance tranquillement. J'avais 20 ans, pas de problème, j'en avais 25, toujours pas reconnu, pas de problème, j'en avais 30, 35, je m'en fous, ça va venir et c'est venu à 40 ans.
On ne met pas un oiseau en cage, vous le dites avec votre voix et vous dites que vous avez quitté votre cage depuis bien longtemps. Est-ce que cela a été dur de la quitter ?
Non, c'est venu, je dirais, presque d'une manière naturelle, spontanément. Je suis redescendue à Paris, ma mère, au contraire, était ravie que je fasse des cours de comédie, ne serait-ce que pour emmerder ceux du Nord. Mais en tout cas, je ne suis pas une victime, d'ailleurs, dans mes films, vous remarquerez que je ne suis jamais la victime. Mes distractions, mes malheurs, mon côté un peu paumé, pas très bien inscrit dans la vie en fin de compte, je m'en sors toujours.
"Je m'en suis tout le temps sorti dans mes films et je m'en suis bien sorti aussi dans la vie."
Pierre Richardà franceinfo
Vous avez toujours gardé bonne mémoire par rapport à celles et ceux qui se sont trouvés sur votre chemin, qui vous ont fait confiance. On comprend d'ailleurs aisément à quel point ces ancêtres, ces personnes font partie de vous. On dit souvent que les gens disparaissent définitivement le jour où on arrête de penser à eux. Est-ce que c'est cela aussi la vie ?
C'est vrai que les gens qui ont disparu, si on pense à eux, ne disparaissent pas. J'ai un carnet de téléphone et j'en ai bien un bon tiers qui n’est plus là, mais je ne veux pas les barrer. J'ai l'impression que je les tuerai deux fois. Alors tous ceux qui ne sont plus là, Jean Carmet, Mireille Darc, je les ai et j'ai toujours le numéro. Je me dis si je le barre puisqu'il n'est plus là, je le tue une autre fois et tant qu'il est dans mon carnet, il existe.
Ce que met en exergue définitivement ce film, c'est l'importance de la liberté.
Oui, exactement, et c'est ce que j'ai essayé d'exprimer pendant tout le film.
Est-ce que vous l'avez touché du doigt, cette liberté ?
Oui, quand même, avec quelquefois des petits grincements, avec quelquefois des portes qui s'ouvrent mal. Mais si la porte se ferme, je passe par la fenêtre.
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