Les lisières des forêts, un levier encore peu connu pour la biodiversité et l'agriculture

Les lisières, bordant les champs et forêts, sont un levier clé pour améliorer la biodiversité et soutenir l'agriculture durable. En favorisant la faune et la flore, elles offrent de nombreux bénéfices aux cultures, mais restent encore peu valorisées par les politiques agricoles.

Article rédigé par Mathilde Fontez
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Les lisières deviennent une thématique émergente en science agricole du fait de leur impact sur la biodiversité et l'agriculture. (Photo d'illustration). (CHRISTIAN WATIER / MAXPPP)
Les lisières deviennent une thématique émergente en science agricole du fait de leur impact sur la biodiversité et l'agriculture. (Photo d'illustration). (CHRISTIAN WATIER / MAXPPP)

Une thématique émergente en science agricole pourrait bien transformer les pratiques agricoles : la prise de conscience de l'importance des lisières. Ce domaine de recherche, qui capte désormais l'attention des spécialistes en écologie, soulève des questions cruciales sur leur impact sur la biodiversité en agriculture.

L'effet des haies sur la biodiversité est déjà bien documenté : les systèmes agricoles avec les haies ont toujours un plus haut niveau de biodiversité, ce qui a tendance à favoriser les cultures. Jusque-là, les bords de forêts ont longtemps été laissés de côté, malgré leur présence significative dans le paysage français : la longueur totale des lisières en France, c'est deux fois la distance entre la Terre et la Lune. 

Ce que les chercheurs découvrent, c'est que les lisières exercent un impact similaire, voire plus fort, que les haies. L'enjeu réside dans l'entretien des lisières, pour maintenir plusieurs niveaux de végétation, allant de l'herbe aux arbres, en passant par les buissons. Ce travail permet aux lisières de jouer un double rôle : servir de réservoir de biodiversité tout en formant une frontière naturelle au bord des champs. Elles servent ainsi de refuge pour de nombreuses espèces animales telles que les oiseaux, les reptiles, les insectes, et même les chauves-souris, qui y trouvent un terrain de chasse idéal. Elles servent également de corridors pour les cerfs et les sangliers. 

Ce réseau de végétation présente des avantages non seulement pour l’environnement, mais aussi pour les cultures et les élevages avoisinants. Les lisières accueillent des prédateurs naturels, tels que l'hermine, qui régule les populations de campagnols, ou encore des abeilles sauvages pollinisatrices qui limitent la diffusion des ravageurs.

Les lisières contribuent à atténuer les effets du vent et des écarts de température. Près d’une lisière, il y a moins de risque de verse, un démarrage plus précoce de l'herbe et une protection du bétail contre le froid.

Une reconnaissance encore insuffisante dans les politiques agricoles

Malheureusement, les lisières ne bénéficient pas encore d’une véritable politique d’aménagement dans les politiques agricoles. Si les agriculteurs peuvent valoriser certaines bordures de champs en lisières comme surface d’intérêt écologique dans le cadre de la Politique Agricole Commune (PAC), ces zones ne font pas l’objet d’un soutien ciblé. Nous en sommes encore à la phase de prise de conscience scientifique, bien que certaines initiatives existent, notamment en Suisse.

Les chercheurs aspirent à créer un réseau connecté de lisières autour des champs, afin de maximiser leurs effets bénéfiques sur la biodiversité et le stockage du carbone. Ce concept "d'effet de bord" fascine de plus en plus les écologues. Par exemple, les insectes qui abîment les cultures ont tendance à se concentrer sur les bords des champs. Cette observation pourrait inspirer de nouvelles stratégies de surveillance et de traitements plus ciblées, réduisant ainsi l'utilisation des pesticides et contribuant à une agriculture de précision. 

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.