Des Mayas au chocolat Dubaï : l'info de l'histoire du 19 avril

L'actualité remise en perspective chaque samedi, grâce à l'historien Fabrice d'Almeida.

Article rédigé par Fabrice d'Almeida
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Fèves de cacao (LIONEL LE SAUX / MAXPPP)
Fèves de cacao (LIONEL LE SAUX / MAXPPP)

Le prix du chocolat a augmenté, alors que se prépare le dimanche de Pâques avec les œufs qui seront demain dans les jardins. Une nouveauté, le chocolat Dubaï, s’impose comme la dernière tendance. Quelques chocolatiers industriels se sont risqués à faire des œufs ou des lapins dans ce nouveau chocolat noir, garni de cheveux d’anges parfumés avec de la crème de pistache. Un chocolat inventé en 2021 à Dubaï par l'Anglo-Égyptienne Sarah Hamouda, dont la vidéo a été vue plus de 100 millions de fois. Une preuve de plus que le chocolat accompagne la marche de l’histoire mondiale.

Le chocolat émerge avec la première mondialisation, puisque c’est au moment des grandes découvertes que les Espagnols font venir du Yucatan les premières amandes de cacao. C’était en 1502, lors du dernier voyage de Christophe Colomb. Des fèves sont échangées avec les Mayas et on comprend l’importance de cette boisson, à l’époque jugée fraîche et réparatrice.

Le cacao accompagne l’histoire des modes des grandes cours européennes. Nous, Français, tardons à le prendre au sérieux. Il faut attendre 1659 pour qu’un valet du comte de Soisson obtienne le privilège royal de s’établir comme chocolatier. Le privilège est accordé par Louis XIV. À cette époque le chocolat se boit. Situé dans le centre de Paris, à deux pas du Louvre, la boutique de David Chaillou s’attire une clientèle rapidement. On améliore la boisson en y ajoutant du sucre de canne, encore rare au XVIIe siècle.

Puis le chocolat suit le libertinage. Dès 1702, un traité médical pose que le chocolat aurait des effets sur les performances sexuelles. Il est repris par le médecin vénitien Giacomo Avanzini en 1728. À partir de là, le chocolat et Venise sont liés. Casanova, le séducteur vénitien, en boit une vingtaine par jour pour accroître son ardeur et ses performances amoureuses.  

Au XIXe siècle, naissance du chocolat à manger

Avec l'ère de l'industrialisation arrive la transformation de la poudre de cacao, imaginée par M. Van Houten au début du XIXe siècle. La famille Fry, des Britanniques, tente l’expérience d’ajouter à la poudre du beurre de cacao et de faire du chocolat à manger. Et François-Louis Cailler, à Vevey en Suisse, fait des plaques de chocolat qu’il vend avec une fabrication industrielle. Menier en France invente les tablettes de chocolat et en fabriquera bientôt plus que tout ce que l’Angleterre en consomme. Mais ce sont les Suisses, avec Jules Séchaud, qui mettent au point le chocolat fourré en 1913, une technique encore mise à l’honneur avec le chocolat Dubaï.

La firme Banania naît au moment du début de la Grande guerre, en août 1914. Elle se fait connaître par le visage du tirailleur sénégalais qui orne son affiche à partir de 1915. On est au cœur de la campagne de propagande pour souligner la mission civilisatrice de la France, alors que la propagande allemande accuse les Français de mobiliser des "sauvages". Banania et les tirailleurs manifestent un patriotisme ardent. Mais l’affiche agace dans l’entre-deux-guerres le mouvement de la négritude et Léopold Sedar Senghor, qui y voient une vision stéréotypée et réductrice des hommes noirs.

Ainsi le cacao est-il entré dans les débats et les créations culturelles. Il nourrit une passion qui est même chantée, notamment par Olivia Ruiz, en 2005, avec son titre La Femme chocolat. Décidément, le chocolat suit bien les mouvements de l’histoire.

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.