Édito
Gouvernement de François Bayrou : un cap franchi, mais une action en panne

François Bayrou vient de dépasser les trois mois à Matignon. S'il a, contrairement à son prédécesseur, passé l'épreuve du budget, il peine à mettre en place un programme d’action concret.

Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le Premier ministre français François Bayrou quitte le palais présidentiel de l'Elysée à Paris après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 19 mars 2025. (LUDOVIC MARIN / AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou quitte le palais présidentiel de l'Elysée à Paris après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 19 mars 2025. (LUDOVIC MARIN / AFP)

Le gouvernement Bayrou vient de franchir le cap, jeudi 20 mars, de ses trois mois d’existence, qui avait été fatal à celui de Michel Barnier. Mais il a du mal à enclencher un vrai programme d’action. On sait depuis Aristote que la nature a horreur du vide. À observer l’impatience de certains soutiens de François Bayrou, on mesure que la nature politique n’échappe pas à ce précepte. À l’extérieur du gouvernement, Édouard Philippe étrille un programme de travail "bien maigre" et répète qu’il ne se passera rien avant 2027 et son entrée à l’Élysée.

Laurent Wauquiez exhorte Bruno Retailleau à quitter le gouvernement faute de nouvelle loi sur l’immigration, une façon de pousser à la faute son concurrent pour la présidence de LR. Et à l’intérieur du gouvernement, le même Retailleau et son acolyte garde des Sceaux, Gérald Darmanin, piaffent eux aussi et compensent leur désœuvrement par de grands moulinets menaçants sur le mode "Retenez moi ou je fais un malheur !" Depuis qu’il a surmonté l’épreuve de l’adoption du budget, qui avait eu raison de son prédécesseur, François Bayrou nous fait le coup de la panne.

Les propositions de lois émanent du Parlement


Pas de réforme d’ampleur en vue, ni sur les urgences économiques et sociales, ni sur les grands chantiers des politiques publiques, ce sont les propositions de lois émanant des députés ou sénateurs qui scandent la vie parlementaire, sur la suppression du droit du sol à Mayotte ou l’interdiction du port du voile dans les compétitions sportives. Il vient de vider d’une grande partie de sa substance le conclave sur les retraites, déserté mercredi 20 mars au soir par la CGT, après les départs de l’U2P et de Force ouvrière. Même le projet de loi sur la fin de vie, qui était sur le point d’être adopté avant la dissolution, a été scindé en deux textes dont l’examen a été reporté à la mi-mai. Le Premier ministre louvoie, esquive, procrastine.

Faute d’action, ce sont ses paroles, parfois erratiques, qui nourrissent la polémique politique sur le scandale Bétharram, le "sentiment de submersion migratoire" ou l’enterrement du retour de l’âge de la retraite à 62 ans.
 
Cette situation risque de durer tant que sa présence à Matignon arrange ses concurrents sans déranger ses adversaires. Car au vu de l’absence de majorité à l’Assemblée, personne ne veut lui piquer sa place. Mais le compte à rebours est enclenché, et beaucoup l’imaginent en intérimaire. Certes, en politique, on a déjà vu des intérims qui durent. Et c’est justement parce qu’il veut voyager loin que François Bayrou ménage à ce point sa monture et revoit ses ambitions à la baisse. Il clamait vouloir s’attaquer à un "Himalaya" de difficultés, il a plutôt l’allure d’un promeneur en balade dans les Vosges.

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