Gouvernement de François Bayrou : qu'est-ce que l'article 49.2 de la Constitution, que le PS va utiliser pour déposer une motion de censure "spontanée" ?

Les socialistes vont s'abstenir de voter les motions de censure déposées par le reste de la gauche sur les textes budgétaires. Ils ont l'intention de déposer leur propre motion de censure, qui ne devrait pas aboutir, après cette séquence.

Article rédigé par Thibaud Le Meneec
France Télévisions
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Boris Vallaud, président des députés PS, et Olivier Faure, premier secrétaire du parti, à l'Assemblée nationale, à Paris, le 29 janvier 2025. (AMAURY CORNU / HANS LUCAS / AFP)
Boris Vallaud, président des députés PS, et Olivier Faure, premier secrétaire du parti, à l'Assemblée nationale, à Paris, le 29 janvier 2025. (AMAURY CORNU / HANS LUCAS / AFP)

Un alinéa de l'article 49 de la Constitution peut en cacher un autre. Si le Premier ministre peut "engager la responsabilité du gouvernement devant l'Assemblée nationale sur le vote d'un texte" grâce au 49.3, comme François Bayrou l'a fait à deux reprises, lundi 3 février, le Parti socialiste va quant à lui recourir à l'article 49.2 du texte fondateur de la Ve République.

Il s'agit d'un procédé similaire à la motion de censure "provoquée", qui intervient après l'utilisation du 49.3, et qui a le même objectif : faire chuter le gouvernement en place. Avec le 49.2, il n'y a toutefois pas besoin d'un texte préalablement imposé par le gouvernement pour répondre avec une motion de censure, car il s'agit d'une motion de censure "spontanée".

"L'Assemblée nationale met en cause la responsabilité du gouvernement par le vote d'une motion de censure", dispose cet alinéa de la Constitution. "Une telle motion n'est recevable que si elle est signée par un dixième au moins des membres de l'Assemblée nationale", soit 58 élus. En revanche, contrairement au 49.3, "un député ne peut être signataire de plus de trois motions de censure au cours d'une même session ordinaire et de plus d'une au cours d'une même session extraordinaire"

Une motion de censure pour tenter de reprendre la main

Les députés socialistes ont décidé de faire appel à cette disposition pour une raison précise : selon eux, il est nécessaire que la France soit dotée de textes budgétaires pour 2025, d'où leur volonté de ne pas voter les motions de censure "provoquées" sur le budget, ce qui a poussé certains membres du Nouveau Front populaire à les qualifier de "traîtres". Jean-Luc Mélenchon a ainsi estimé que le NFP était "réduit d'un parti" après la décision du PS, lundi.

Mais une fois le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale adoptés, les socialistes ont l'intention de reprendre la main pour "rappeler ce qui [les] différencie fondamentalement de ce gouvernement", défend le groupe PS auprès de franceinfo. C'est l'objectif affiché de cette motion de censure, qui vise à protester contre les propos décriés de François Bayrou sur le "sentiment de submersion" migratoire.

La date exacte du dépôt de cette motion de censure n'est pas encore connue, mais le groupe PS affirme mercredi qu'elle sera présentée "à l’issue des débats budgétaires à l’Assemblée nationale", soit "la semaine prochaine". 

Une stratégie qui n'a "aucune chance" d'aboutir ?

Comme pour la motion de censure "provoquée" après un 49.3, il faut que "la majorité des membres" de la chambre basse du Parlement, soit 289 députés sur 577, votent la motion de censure pour que le Premier ministre et ses ministres s'en aillent. "Elle peut faire tomber" le gouvernement, a assuré mercredi matin sur franceinfo le patron des députés PS, Boris Vallaud.

Or, pour que le texte aboutisse, il faut que le RN vote cette motion de censure sur le sujet de l'immigration, ce qui est loin d'être évident. "Malheureusement, elle n'a aucune chance, sauf si le RN veut absolument faire tomber le gouvernement", déplore un cadre du parti à la rose. "Le problème, c’est qu’avec le RN, on ne sait pas", estime l'entourage de François Bayrou auprès de France Télévisions.

Sur les 66 motions de censure "spontanées" déposées depuis le Ve République, une seule a abouti, en octobre 1962, au départ du gouvernement. François Bayrou, qui a déjà traversé sans encombre une motion de censure "spontanée" au mois de janvier, espère ne pas connaître le même sort que Georges Pompidou, censuré, mais finalement renommé dans la foulée par Charles de Gaulle.

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