Nicolas Sarkozy condamné à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs dans l'affaire du financement libyen de sa campagne de 2007

Cette peine est assortie d'un mandat de dépôt à effet différé avec exécution provisoire. L'ancien président de la République a été relaxé de plusieurs chefs, mais condamné pour association de malfaiteurs, dans le but de "préparer une corruption active" selon la présidente.

Article rédigé par franceinfo
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Nicolas Sarkozy arrive au tribunal judiciaire de Paris, le 27 mars, lors de son procès sur les soupçons de financement de sa campagne présidentielle en 2007. (ALAIN JOCARD / AFP)
Nicolas Sarkozy arrive au tribunal judiciaire de Paris, le 27 mars, lors de son procès sur les soupçons de financement de sa campagne présidentielle en 2007. (ALAIN JOCARD / AFP)

Du jamais vu pour un ancien président de la République. Le tribunal correctionnel de Paris a reconnu Nicolas Sarkozy coupable d'association de malfaiteurs et l'a condamné à cinq ans de prison, jeudi 25 septembre, dans l'affaire des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle victorieuse en 2007. En revanche, le tribunal l'a relaxé des chefs de corruption passive, de détournement de fonds publics libyens et de financement illicite de campagne électorale. Sa peine de prison est assortie d'un mandat de dépôt à effet différé avec exécution provisoire.

Cela signifie que l'ancien président de la République ne sera pas incarcéré à la sortie du tribunal, mais qu'il doit être convoqué devant le procureur dans les semaines à venir pour déterminer les modalités d'exécution de sa peine. L'incarcération doit ensuite débuter dans un délai de quatre mois maximum. Toutefois, Nicolas Sarkozy, qui a 70 ans, peut demander une libération conditionnelle du fait de son âge. Le fait que sa peine soit assortie d'une exécution provisoire veut dire qu'elle s'appliquera malgré l'appel annoncé par Nicolas Sarkozy, dans l'attente d'un nouveau procès.

La procédure judiciaire n'a pas permis de "fonder une démonstration que l'argent parti de Libye" ait "in fine" été utilisé dans un financement occulte de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007, a lu la présidente du tribunal de Paris, exposant les motifs de ses jugements. "Pour le tribunal, les éléments matériels de l'infraction de corruption ne sont pas constitués", a poursuivi Nathalie Gavarino pour expliquer les relaxes sur ce délit, notamment celle de l'ancien président, condamné pour association de malfaiteurs.

Mais Nathalie Gavarino a expliqué que "l'association de malfaiteurs que le tribunal a examinée avait pour but de préparer une corruption active et son blanchiment", ajoutant qu'il y avait bien une "offre de financement" formulée par le régime de Mouammar Kadhafi. C'est pour ce chef que Nicolas Sarkozy a été condamné.

Un "pacte de corruption faustien" farouchement nié

Le 27 mars, le Parquet national financier (PNF) avait réclamé sept ans d'emprisonnement, 300 000 euros d'amende et cinq ans d'inéligibilité à l'encontre de Nicolas Sarkozy, dépeint comme un homme à l'"ambition politique dévorante", lancé dans une "quête effrénée de financement". Des réquisitions très lourdes et inédites pour un ancien président de la République, mais "à la hauteur de la gravité des faits", selon le PNF. Le ministère public avait décrit Nicolas Sarkozy comme le "véritable décisionnaire et commanditaire" d'un "pacte de corruption faustien" qualifié d'"inconcevable, inouï et indécent", noué avec Mouammar Kadhafi, "l'un des dictateurs les plus infréquentables".

De son côté, l'ex-chef d'Etat, aujourd'hui âgé de 70 ans, avait tout au long de l'audience, et même en marge, clamé son innocence et balayé l'ensemble des accusations. Lors de ses derniers mots face au tribunal correctionnel de Paris, prononcés le 8 avril, Nicolas Sarkozy avait réclamé "la vérité", se refusant à tout propos qui pourrait "alimenter" une "polémique". L'ancien président avait aussi affirmé vouloir "défendre" son "honneur" et ne pas "vouloir répondre" à un "réquisitoire politique et violent". Son avocat, Christophe Ingrain, avait démenti tout "pacte de corruption : ni faustien, ni pas faustien", réfutant l'existence de "preuves" et "d'indices précis ou cohérents" dans cette affaire. Il avait martelé que les enquêteurs n'avaient pas trouvé trace d'argent libyen dans les fonds de campagne, d'enrichissement personnel ou d'intervention de Nicolas Sarkozy, réclamant ainsi sa relaxe.

Cette nouvelle condamnation s'inscrit dans une suite de déboires judiciaires pour l'ancien chef de l'Etat. Condamné définitivement à un an de prison ferme dans l'affaire dite des écoutes pour corruption et trafic d'influence, il a effectué sa peine sous bracelet électronique qu'il a dû porter du 7 février au 14 mai avant sa libération conditionnelle. Un recours a été déposé devant la Cour européenne des droits de l'homme. Dans l'affaire Bygmalion sur le financement de sa campagne présidentielle perdue de 2012, il a été condamné en appel à un an de prison, dont six mois ferme. Il a formé un pourvoi en cassation, dont l'examen est prévu le 8 octobre. Il est aussi mis en examen dans le dossier de la rétractation de Ziad Takieddine, l'intermédiaire franco-libanais mort mardi, une affaire dans l'affaire des soupçons de financement libyen.

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