Guerre en Ukraine : "La grande contre-offensive n'est pas encore engagée", déclare le sénateur Philippe Folliot après s'être rendu près du front
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L'élu centriste du Tarn est allé rencontrer des soldats ukrainiens engagés dans la contre-offensive. Ces hommes manquent toujours de matériel occidental adapté, face aux lignes défensives mises en place par les forces russes.
Il est l'un des rares élus français, sinon le seul, à se rendre en Ukraine. Le sénateur centriste (UC) Philippe Folliot a effectué une nouvelle visite dans le pays en guerre la semaine dernière, cinq mois après un précédent déplacement. Président du groupe Alliance des démocrates et libéraux à l'Assemblée parlementaire de l'Otan, il s'est rendu dans les régions de Zaporijjia et de Donetsk au côté de son collègue allemand Marcus Faber et du député ukrainien Yegor Cherniev. De retour en France, le sénateur livre ses impressions à franceinfo sur la situation militaire actuelle et les équipements occidentaux livrés à l'Ukraine.
Franceinfo : Vous vous êtes d'abord rendu à Zaporijjia, quelles sont les inquiétudes sur place ?
Philippe Folliot : Nous avons rencontré Oleksandr Starukh, le gouverneur de Zaporijjia, où les enjeux sont surtout liés au nucléaire. Toute la difficulté, pour eux, est de se préparer au pire, sans affoler la population. Il est difficile de prédéterminer les répercussions en cas d'incident dans la centrale, car elles dépendraient en partie des vents. Par ailleurs, en cas de succès de la contre-offensive, qu'arrivera-t-il quand il y aura un changement d'autorité ? Les forces russes se comporteront-elles de manière responsable ou feront-elles n'importe quoi ?
En avançant vers la ligne de front, quels équipements occidentaux avez-vous vus ?
Nous nous sommes rendus dans la région d'Orikhiv [à une cinquantaine de kilomètres au sud-est de Zaporijjia], près de la ligne de front du Sud. Nous étions au milieu de nulle part, dans des bosquets où étaient camouflés trois des sept chars Leopard de la 47e brigade, chacun étant séparé de plusieurs centaines de mètres. Nous avons pu constater de nos yeux que l'un des chars, annoncé comme neutralisé par la propagande russe, était en réalité opérationnel, malgré un impact important. L'informatique a été touchée, mais il n'a fallu que quelques heures de réparation. Les soldats ukrainiens qui ont essayé le Leopard se sentent davantage protégés et ne veulent plus remonter dans les T-64, de confection soviétique. Ce modèle, dans notre exemple, aurait sans doute été pulvérisé.
Avez-vous vu des équipements français ?
Oui, des chars légers AMX-10. Nous sommes allés dans le secteur de Velyka Novosilka, dans la région de Donetsk, au côté de la 37e brigade de marines. Nous n'étions pas dans les tranchées, mais nous avons entendu les tirs d'artillerie, en bruit de fond. Nous nous sommes rapprochés à six ou sept kilomètres, au maximum. Les AMX-10 étaient cachés dans des haies, au milieu de vastes champs qui s'étendaient sur des centaines d'hectares. A côté, une moissonneuse faisait presque normalement son travail.
Qu'en disent les soldats ukrainiens ?
Les Ukrainiens étaient relativement critiques par rapport aux éléments relatifs au blindé français. Quand ils sont allés se former dans la région de Marseille, ils s'étaient formés sur des AMX-10 équipés d'options, comme des kits de communication et des leurres. Mais celles-ci n'étaient pas incluses dans les modèles livrés. Les soldats ont également évoqué des problèmes de boîte de vitesse et l'absence de pneus de rechange [ils ne fonctionnent pas sur chenilles], mais ils sont satisfaits du canon de 105 mm.
Ce blindé léger de reconnaissance, en réalité, est davantage utilisé comme d'un appui d'artillerie, une sorte de petit canon Caesar. Ils nous ont dit que 38 unités avaient été livrées, ce qui est malgré tout positif. Quand j'y suis allé il y a six mois, on parlait d'en livrer dix ou peut-être vingt.
Quelles sont les principales difficultés pour l'armée ukrainienne ?
Les forces russes contrôlent l'espace aérien, ce qui est un avantage tactique pour eux. Par ailleurs, les soldats ukrainiens nous ont expliqué que les lignes de défense russes étaient très structurées : des tranchées, puis des réseaux de galeries vers des bunkers, puis des tranchées antichars et des dents de dragon sur les axes de circulation. Le tout, avec des milliers de mines antichar et antipersonnel.
>> Comment les forces ukrainiennes tentent de trouver la brèche au milieu des champs de mines russes
Les Ukrainiens sont donc confrontés à une sorte de mur. Ils tapent à plusieurs endroits, afin de repérer l'endroit friable où ils feront porter leurs efforts. La grande contre-offensive n'est pas encore engagée.
Le déminage est un enjeu majeur...
La situation est en effet compliquée. Les forces ukrainiennes déminent de nuit, mètre après mètre, avec des équipes spécialisées. C'est un travail long et fastidieux, mais il est nécessaire, car les chars de déminage sont ciblés par les drones, l'artillerie et l'aviation. Les soldats nous ont expliqué que les Russes ont tellement miné qu'ils sautent parfois eux-mêmes sur leurs propres mines, quand les informations n'ont pas été correctement transmises par l'équipe précédente.
De quoi les forces ukrainiennes ont-elles besoin aujourd'hui ?
Ils ont besoin de défense anti-aérienne, comme les missiles Crotale ou les systèmes Mamba français, mais aussi d'avions de combat. Je leur ai dit que nous avions des Mirage 2000, mais les soldats ukrainiens nous ont dit qu'ils étaient plutôt inférieurs aux avions russes de dernière génération. Ils espèrent donc des Rafale. Ils ont également besoin d'artillerie, avec davantage de canons Caesar, qui protègent leur infanterie. Lorsqu'ils auront trouvé la brèche, ils auront également besoin de davantage de chars lourds.
Quel est le moral des soldats ukrainiens ?
Ils sont fatigués. Nous avons demandé à un jeune homme de la Garde nationale depuis quand il n'avait pas revu sa famille. Il nous a répondu : "Depuis le début de la guerre". Malgré cela, tous ces soldats sont déterminés. Lors de mon dernier voyage, début février, j'avais rencontré un dénommé "Magnit", que j'ai revu cette fois-ci. Il m'a dit qu'ils avaient perdu beaucoup de camarades et qu'ils iront maintenant jusqu'au bout. C'est toute la différence entre les combattants russes, qui ne savent pas pourquoi ils se battent, et les Ukrainiens. Les soldats rencontrés nous ont dit qu'ils se battaient pour leurs familles et leur pays, mais également pour l'Europe et ses valeurs, indirectement.
La France est-elle à la hauteur ?
Il faut que nous fassions davantage, et plus vite. Emmanuel Macron pourrait se prononcer sur les Mirage, par exemple. Début janvier, la France avait été la première à annoncer la livraison de blindés légers, et cette décision avait permis de débloquer la livraison de chars par d'autres pays européens. Il pourrait en être de même sur les avions de combat.
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