Enfant "martyre de l'A10" : "C'est inadmissible, il y a une urgence", dénonce une avocate, alors que la justice refuse de dépayser le procès

Les parents d'Inass Touloub, retrouvée morte au bord de l'A10 en 1987, sont mis en examen depuis 2018. Leur procès n'a toutefois pas encore eu lieu à cause de problèmes de plannings à la Cour d'assises du Loir-et-Cher.

Article rédigé par franceinfo
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La tombe d'Inass Touloub, à Suèvres, dans le Loir-et-Cher, est régulièrement fleurie. (GEORGES HODEBERT / MAXPPP)
La tombe d'Inass Touloub, à Suèvres, dans le Loir-et-Cher, est régulièrement fleurie. (GEORGES HODEBERT / MAXPPP)

Après 31 ans d'enquête et six ans de procédure, toujours rien. Alors que la justice est souvent mise en cause pour ces délais d'instruction jugés trop lents, le procès du "cold case" de la "martyre de l'A10", avec une enquête qui remonte à la fin des années 1980 et résolue en 2017, n'a toujours pas eu lieu. 

Le 11 août 1987, le corps d'une fillette inconnue, surnommée la "petite martyre de l'A10", avait été retrouvé dans un fossé de l'autoroute A10 par deux employés de la société Cofiroute, à Suèvres, dans le Loir-et-Cher.

Ce n'est qu'en 2017 que les enquêteurs ont pu remonter jusqu'aux parents de la petite fille prénommée Inass, alors inconnus de la justice, grâce à un prélèvement ADN opéré sur son frère, arrêté en 2016 dans une affaire de violence. Les parents d'Inass ont été mis en examen en juin 2018 dans un premier temps pour meurtre, recel de cadavre et violences habituelles sur mineur de moins de 15 ans. Mais, depuis, toujours pas de procès.

Planning engorgé et arrêts maladie de longue durée

Il y a ainsi eu l'enquête, plusieurs recours des parents et puis une bataille entre magistrats : deux ans de procédure pour savoir comment qualifier les faits infligés à la petite Inass par ses parents. Finalement, ils sont poursuivis pour actes de torture et de barbarie. Désormais, il faut trouver un créneau pour le procès. Une tâche rendue difficile notamment par le planning engorgé et les arrêts maladie de longue durée chez les magistrats de la Cour d'assises du Loir-et-Cher, située à Blois. 

Le procureur général de la Cour d'appel d'Orléans a demandé à ce que le procès se tienne ailleurs. La Cour de cassation a rejeté la demande de dépaysement, lundi 5 mai, et maintient le procès à Blois. Dans un arrêt du 29 avril, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé "qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la requête" du procureur général près la cour d'appel d'Orléans, datée du 20 janvier, alors motivée par des "raisons structurelles et conjoncturelles" qui auraient "contraint de repousser le procès". 

"On prend le risque que les mis en cause décèdent"

Ce qui provoque la colère d'Agathe Morel, avocate de l'association Enfance et partage :"Il faut audiencer ce dossier. Il y a une urgence à le faire parce que c'est un dossier qui est particulier dans les annales de la justice et parce qu'on prend le risque, le temps passant, que les protagonistes mis en cause décèdent ou ne puissent pas assister à leur procès pour des raisons médicales", dénonce-t-elle. 

Pour l'avocate, "la chancellerie ne donne pas la chance à cette juridiction de tenir ce procès. Je pense à cette petite fille... On n'est pas capables de faire le minimum qu'on lui doit aujourd'hui qu'on a résolu ce dossier. C'est inadmissible."

Les parents d'Inass, aujourd'hui âgés de 71 et 73 ans, sont libres. La priorité est donnée aux procès dans lesquels les accusés sont détenus. Le parquet général indiquait en janvier dernier qu'un procès ne pourrait se tenir "avant de nombreux mois", et sans doute pas "avant fin de 2026 ou début 2027", soit près de 40 ans après la mort de la petite Inass, notamment pour des raisons "liées à l'état de santé" de magistrats, mais aussi car le site de Blois n'est pas adapté à ce "procès très médiatique".  

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