Reportage Euro 2025 : entre rires et bonne ambiance, comment les conférences de presse des Bleues sont devenues "le sujet le plus évoqué du tournoi"

Article rédigé par Julien Froment
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Les joueuses de l'équipe de France célèbrent l'ouverture du score de Marie-Antoinette Katoto lors de leur premier match à l'Euro contre l'Angleterre, le 5 juillet 2025. (AFP)
Les joueuses de l'équipe de France célèbrent l'ouverture du score de Marie-Antoinette Katoto lors de leur premier match à l'Euro contre l'Angleterre, le 5 juillet 2025. (AFP)

Le centre de presse de l’équipe de France, situé à Heiden, est devenu "the place to be" pour la presse internationale, à la fois surprise et admirative de l’ambiance qui règne chez les Bleues.

Depuis une dizaine de jours, quasiment à chaque fois à la même heure, dans la petite salle de presse installée à Heiden, non loin du camp de base des Bleues, des éclats de rire s'échappent à intervalle assez régulier. Au point qu'ils descendent les 800 mètres d'altitude du village de 4300 âmes, pour atterrir dans les oreilles des journalistes étrangers. "C'est l'un des sujets plus évoqué du tournoi. Les Françaises sont connues pour être drôles", annonce, avec un petit sourire, Felix Haselsteiner, journaliste pour le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung.

Et il n'est pas le seul à venir vérifier que la rumeur est fondée. Une journaliste néerlandaise s'est aussi invitée à un point presse et a été surprise de la différence d'ambiance avec les rendez-vous médiatiques de son pays : "C'est très chill chez vous, très détendu, alors que chez nous c'est totalement l'inverse."

On a pu le constater lors de la conférence de presse d'avant-match, un exercice certes plus formel, où les échanges entre les médias, le sélectionneur national Andries Jonker et la milieu de terrain Daniëlle van de Donk, ont été parfois houleux. "J'ai fait quelques points presse et ce n'est pas du tout la même ambiance. L'Allemagne, cela aurait pu, mais le dernier résultat n'a pas été bon (défaite 4-1 contre la Suède). Mais prenez l'exemple de l'Espagne, malgré les bons résultats, ce n'est pas aussi détendu qu'avec l'équipe de France", ajoute Felix Haselsteiner.

Des binômes par affinité

La clé ? "Les résultats", avance, lucide, la défenseuse Selma Bacha. Mais il n'y a pas que ça. Si les joueuses peuvent parfois traîner des crampons à l'idée de se présenter devant la presse, la cheffe de presse fait en sorte de constituer des "binômes" par affinité. Marie-Antoinette Katoto et Alice Sombath, qui se sont connues au PSG, mais aussi les trois gardiennes de but, Selma Bacha et Sandy Baltimore, Thiniba Samoura et Griedge Mbock. Sans parler du duo "amour vache", formé par Oriane Jean-François et Kadidiatou Diani, qui a offert un moment d'anthologie où il a été question de tarte au saumon, de partie de basket ou de Uno.

"Je trouve ça agréable d'avoir des joueuses détendues, c'est plus facile pour travailler", remarque Morgane Huguen, journaliste pour Ouest-France et qui suit les Bleues pendant l'Euro. "Cela permet de faire des sujets plus légers, comme ce qu'elles font durant leur temps libre. Et je me suis aperçue que cette ambiance détendue était inhérente à l'équipe de France. Je pensais que c'était un peu partout comme ça. Mais en fait non. C'était même parfois tendu lors des conférences de presse adverses."

Si ces dernières saisons, le groupe des Bleues vivait bien, cela ne se répercutait pas forcément devant la presse. "À l'Euro 2022, les conférences de presse, ça allait avec les joueuses, ça se passait bien", se souvient Syanie Dalmat, journaliste pour le quotidien L'Equipe et qui couvre son troisième Euro féminin. "C'était, on va dire, peut-être un petit peu moins bon enfant. En revanche, les conférences de presse d'avant-match étaient assez tendues avec Corinne Diacre, ses rapports avec les médias ne fonctionnaient pas forcément. Donc c'est plutôt agréable effectivement de travailler dans cette atmosphère", précise-t-elle.

"Elles incarnent les valeurs fondamentales du pays"

"Ça ne prédit pas le résultat que vont faire les Bleues dans cette compétition, mais en tout cas, c'est beaucoup plus sain et beaucoup plus agréable de travailler dans ces conditions. Le sélectionneur Laurent Bonadei a bien compris aussi qu'il avait un devoir de promouvoir le foot féminin. C'est dans son discours aussi. C'est un VRP du football au féminin français et je trouve qu'il remplit bien cette tâche, chose que Corinne Diacre finalement n'a pas su faire ou n'a pas voulu faire. Il transmet ça aussi à ses joueuses qui ont moins de défiance envers la presse et c'est hyper intéressant. Celles qui ont envie de parler peuvent le faire assez librement et c'est très cool", conclut Syanie Dalmat.

Une ambiance détendue qui ressurgit aussi sur le terrain. "On peut voir que ce soit sur ou en dehors du terrain, elles sont relax ensemble", note Felix Haselsteiner. "On n'est vraiment pas loin de votre devise 'liberté égalité fraternité. Elles sont vraiment libres sur le terrain, elles jouent ensemble de manière détendue, et elles semblent vraiment bien s'entendre. Elles incarnent les valeurs fondamentales du pays."

Un secret dévoilé... "si on gagne l'Euro !"

Un changement de mentalité de la part des Bleues, c'est aussi ça l'explication. Avec l'arrivée de Laurent Bonadei, mais aussi du préparateur mental Thomas Sammut au sein du staff technique, une chape de plomb semble s'être enlevée. "Cela nous a vraiment fait du bien", confirme Selma Bacha. "On est une équipe qui ne se prend pas la tête, on n'a vraiment pas de pression. On est des challengers, pas des favorites. Cela reste du foot, il y a les supporters qui nous soutiennent, les journalistes qui nous donnent de la force. La FFF nous octroie des installations incroyables, on a de la chance de faire ce métier, ce n'est que du fun !", sourit-elle.

Et quand on lui demande ce qui a réellement changé, elle conclut, malicieuse : "Je ne donnerai pas de détails, c'est un secret. Vous le saurez si on gagne l'Euro !" Il faudra déjà passer l'obstacle allemand, samedi à Bâle, pour prolonger le plaisir encore un peu plus longtemps.

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.