Les personnes vivant près de zones viticoles sont plus exposées aux pesticides que celles vivant loin de toute culture, selon une étude
Deux autorités sanitaires, Santé publique France et l'Agence nationale de sécurité sanitaire, appellent à "réduire au strict nécessaire le recours aux produits phytopharmaceutiques".
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Des résultats qui étaient très attendus. Santé publique France (SPF) et l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) publient, lundi 15 septembre, les conclusions de l'étude PestiRiv, qui porte sur l'exposition aux pesticides des personnes vivant près de vignes. Elles appellent à "réduire au strict nécessaire le recours aux produits phytopharmaceutiques". "C'est notre recommandation la plus importante", insiste Benoît Vallet, le directeur général de l'Anses.
Lancée en 2021 dans six régions viticoles françaises (Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d'Azur), Pestiriv visait à documenter la façon dont sont affectées des personnes vivant à proximité de vignes et d'autres qui habitent plus loin. Les premières résident à moins de 500 mètres de vignes, les secondes vivent éloignées de toute culture, c'est-à-dire à plus de 5 km de ces plantations, et à plus d'un kilomètre d'autres cultures.
Dans le détail, 56 substances étaient recherchées sur 265 sites, rassemblant au total 1 946 adultes et 742 enfants (entre 3 et 17 ans). Les analyses portent sur des échantillons d'urine (3 484), de cheveux (1 980), de poussière (790), d'air intérieur (333), d'air ambiant (1 557) et, à la marge, d'aliments du jardin (106). De plus, les prélèvements ont eu lieu à la fois lors de la période de traitement des vignes et hors de ce créneau.
Les enfants des zones viticoles particulièrement imprégnés
Les résultats montrent, sans surprise, que les personnes vivant à proximité de vignes sont celles chez qui les pesticides ont été trouvés le plus fréquemment. Les 12 pesticides recherchés dans les urines chez les personnes vivant en zones viticoles ont été retrouvés dans la quasi-totalité des échantillons pendant la période de traitements.
Les chiffres montrent que les enfants de 3 à 6 ans sont plus particulièrement imprégnés. Comment l'expliquer ? Ils peuvent avoir des comportements qui les exposent davantage, en ayant par exemple davantage de contacts avec le sol. Leur organisme élimine aussi moins bien les polluants auxquels ils sont exposés, explique Clémentine Dereumeaux, chargée de projet chez SPF. Concernant les cheveux, tous les pesticides (20) ont été retrouvés dans au moins un échantillon en zones viticoles et pendant la période de traitement. Mais à "des niveaux faibles", relèvent les deux instances.
Pas d'alerte sanitaire
"La culture a une influence sur la charge corporelle", poursuit Charlotte Grastilleur, directrice générale déléguée en charge du pôle produits réglementés à l'Anses. Elle assure que les seuils constatés ne relèvent pas de l'alerte sanitaire. Pour chaque produit détecté dans les échantillons, "nous sommes dans les marges prévues par l'autorisation de mise sur le marché", insiste Benoît Vallet, directeur général de l'Anses.
Toutefois, SPF et l'Anses préconisent de "réduire au strict nécessaire le recours aux produits phytopharmaceutiques". Pour y parvenir, "les pouvoirs publics peuvent notamment s'appuyer sur la stratégie nationale Ecophyto 2030", qui appelle à "une mise en œuvre ambitieuse".
Par ailleurs, l'objectif de PestiRiv est exclusivement de mesurer l'exposition aux pesticides, pas d'en évaluer les effets sanitaires, rappellent les auteurs. Une étude sur les risques pour la santé doit être conduite dans les prochaines années pour compléter les résultats déjà obtenus.
Rentrer son linge et se déchausser en arrivant chez soi
"Même si PestiRiv ne livre pas d'enseignements spécifiques sur les risques associés aux expositions observées, l'influence de la proximité des cultures sur la contamination des milieux et l'imprégnation des personnes incitent à agir pour limiter l'exposition des riverains", font valoir les agences. Les produits phytosanitaires "sont par définition toxiques pour le vivant", insistent SPF et l'Anses.
"Même si l'évaluation des produits phytosanitaires permet de déterminer des conditions d'emplois sûres, il est judicieux de limiter leur utilisation pour garantir un haut niveau de protection de la santé publique et de l'environnement."
Santé publique France et l'Ansesdans les résultats de l'étude PestiRiv
Les deux agences recommandent également d'informer les riverains des vignes avant les traitements, afin d'éviter des expositions "plus immédiates", "par exemple en fermant les fenêtres ou en rentrant le linge". Côté pratique, elles conseillent aussi à ces habitants de se déchausser lorsqu'ils arrivent chez eux, de nettoyer les sols de leur intérieur avec une serpillière, de passer l'aspirateur au moins une fois par semaine, d'éplucher les fruits et légumes de leur jardin avant de les manger, de limiter la consommation d'œufs issus de poulaillers domestiques en zones agricoles, ou encore de s'équiper de système de ventilation mécanique.
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