Comment le cabinet indépendant Occurrence a-t-il compté les manifestants lors de la Fête à Macron ?
Samedi, Occurrence a dénombré 38 900 personnes dans le défilé parisien. Jean-Luc Mélenchon, leader des "insoumis", a violemment contesté ce chiffre dans un tweet, insinuant que les médias mentaient et étaient payés pour le faire. L'occasion de revenir sur la méthode de comptage.
L'écart est significatif. Selon les organisateurs de la Fête à Macron, "plus de 100 000 personnes" ont défilé dans une ambiance "festive et carnavalesque" samedi 5 mai à Paris. La France insoumise (LFI), co-organisatrice, a même revendiqué la présence de 160 000 manifestants "pour dire Stop Macron". Soit quatre fois plus que le décompte de la préfecture de police (40 000) et celui du cabinet Occurrence pour un collectif des médias (38 900). Rappelons que ce collectif d'une vingtaine de médias comprend, outre franceinfo, des journaux comme Le Monde, Le Figaro et Libération, mais aussi des radios (RTL, France Inter, RMC...), des télévisions publiques et privées (BFMTV, France 2, France 3...) ou le site d'information Mediapart. Ainsi que tous les grands titres de la presse régionale et départementale.
"Sachant que la seule place de la Bastille contient 40 000 personnes, combien sont payés pour mentir ceux qui affirment qu'on est moins alors que la place et les boulevards sont pleins", s'est interrogé Jean-Luc Mélenchon sur Twitter en fin de journée, insinuant que les médias mentaient (et qu'ils étaient payés pour cela).
Sachant que la seule place de la Bastille contient 40 000 personnes, combien sont payés pour mentir ceux qui affirment qu'on est moins alors que la place et les boulevards sont pleins... #LaFeteAMacron #FeteAMacron #StopMacron pic.twitter.com/cC0oXKxKhP
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) 5 mai 2018
Comment Occurrence a-t-il compté le nombre de participants ? Franceinfo, membre du collectif de médias partenaires, vous apporte des éléments de réponse.
En se positionnant au départ du cortège, près de la place de l'Opéra
"Nous étions postés à une vingtaine de minutes après le départ du cortège, au 243 rue de Saint-Martin", explique à franceinfo Assaël Adary, patron du cabinet Occurrence. Le nombre de manifestants a été compté depuis la chambre d'un hôtel, au 4e étage. Le comptage a été "interrompu à 16h20", après le passage de la voiture-balai.
Je ne nie pas qu'il puisse y avoir des gens qui soient allés directement place de la Bastille, où un concert était organisé. Mais nous, nous avons compté ceux qui ont participé au défilé.
Assaël Adary, patron du cabinet Occurrenceà franceinfo
Assaël Adary s'interroge sur "la méthodologie" de La France insoumise, qui a annoncé 160 000 participants dès 15h30. "Comment arrivent-ils à ce chiffre là à cette heure-là?" Il indique par ailleurs qu'Occurrence "a proposé à plusieurs reprises au député LFI François Ruffin [à l'initiative de l'évènement] de venir assister au comptage de la manifestation, en vain".
En utilisant deux capteurs et un algorithme
Le cabinet Occurrence, créé en 1995, utilise depuis 2006 une technologie utilisée pour compter les flux de personnes dans les aéroports, les centres commerciaux ou les musées, basée sur des capteurs et un algorithme. Une vingtaine de médias français, parmi lesquels l'Upreg (Union de la presse en région) et Radio France, se sont associés à cette méthode en mars, pour éviter les traditionnels écarts de comptage lors des manifestations, entre les syndicats et les autorités.
Occurrence effectue un comptage avec deux capteurs placés en hauteur, à 20 mètres au-dessus de la rue (la chambre d'un hôtel le plus souvent). Ces capteurs tracent une ligne virtuelle sur la rue : chaque manifestant qui franchit cette ligne est ainsi comptabilisé. Les personnes qui marchent sur les trottoirs sont bien pris en compte.
En déterminant une marge d'erreur
Pour affiner ce premier chiffrage, ajuster le décompte fait par les capteurs, et déterminer une marge d'erreur, le dispositif est complété par des "micro-comptages humains". La manifestation est filmée pendant 20 à 30 secondes à différents intervalles et différentes "intensités". Les manifestants sont alors recomptés manuellement et des taux de redressement sont appliqués si nécessaire. "La marge d'erreur est de plus ou moins 10 %", explique Assaël Adary, qui a testé cette technologie avec succès lors de marathons, une épreuve où l'on connaît à l'avance le nombre de participants.
Lors de la manifestation parisienne du 16 novembre 2017 contre la "politique libérale" d'Emmanuel Macron, Occurrence avait compté 8 250 manifestants, contre 8 000 pour la préfecture et 40 000 pour la CGT.
Plusieurs médias, qui testaient alors le dispositif, avaient recompté séparément, un à un, les manifestants à partir d’un enregistrement de l’intégralité du défilé. Ils sont parvenus à un chiffre similaire. "J'invite La France insoumise et la CGT à venir recompter avec nous le nombre de manifestants ce jour-là, à partir de la vidéo existante", propose Assaël Adary, dans un souci de transparence. Pour le moment, le parti et le syndicat n'ont pas répondu.
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