Trois choses vues dans les couloirs de Radio France au 16e jour de grève
Au seizième jour du conflit social avec la direction, les grévistes de la Maison Ronde ont voté la reconduction du mouvement jusqu'à mardi. Reportage.
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"Ah tiens, on ne peut plus accéder à la présidence ?" Dans l'ascenseur, la plaisanterie cache mal les tensions qui agitent la Maison de la Radio. Au seizième jour de la grève des salariés de Radio France, vendredi 3 avril, le mouvement a été reconduit jusqu'au mardi suivant. Le conflit est l'un des plus durs de son histoire. Alors que le dialogue est rompu avec la direction, que les salariés sont lassés et que les auditeurs s'impatientent, francetv info a recueilli quelques impressions dans le dédale de couloirs d'un bâtiment toujours en chantier.
L'entretien télé de Mathieu Gallet n'est pas digéré
Studio 105, assemblée générale de 10 heures. Ici, dans le ventre de la maison ronde, l'intervention de Mathieu Gallet sur iTélé, la veille, est assez mal passée. "Ah la communication était rodée, pile poil, il était efficace", s'agace l'un des grévistes, au micro. "Il a redit trois ou quatre fois qu'il avait été nommé par le CSA et que seul le CSA pouvait l'enlever." La personnalité du PDG cristallise la colère. Un montage compile d'ailleurs quelques-unes de ses phrases prononcées la veille, ironiquement ponctuées par la chanson de Philippe Katerine, Des Bisous.
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Au premier rang, une salariée prend la parole. "Il ne s'adresse jamais à nous, puis il explique à la télé qu'il évite de le faire parce qu'il est pudique ! Moi je me suis sentie humiliée. Je demande à ce que cette personne s'en aille." Elle n'est pas la seule, puisqu'une motion de défiance est adoptée en fin de matinée. "Ses interventions hier ont révulsé le personnel", explique Jean-Mathieu Zahnd, réalisateur et militant CGT. D'autres salariés interrogés sont plus réservés. "Mieux vaut un caramel, même un caramel mou, plutôt qu'être opposé frontalement au mur gouvernemental."
Une caisse de grève et beaucoup de détermination
Week-end pascal oblige, l'assemblée générale a reconduit la grève jusqu'à mardi matin. Net et sans bavure. Enfin, à quatre abstentions près. Cette décision n'a rien de surprenant, puisque Mathieu Gallet doit s'adresser mercredi au comité central d'entreprise de la maison ronde. En attendant, tout est bloqué. Du coup, les grévistes s'organisent. En seize jours, la caisse de grève a déjà permis de recueillir plus de 61 000 euros. Sylvia ne lâche plus la boîte, même la veille, pour aller à Matignon. Dessus, il est écrit : "y a un truc qui fait masse", une référence à une chanson d'Alain Bashung et au "courant [qui] peut plus passer".
Mine de rien, cette caisse de grève a déjà recueilli 61 000 euros. pic.twitter.com/ZmngUPk9Bm
— fabien magnenou (@fmagnenou) 3 Avril 2015
Nombreuses sont les revendications, plus ou moins liées aux spécificités de chaque catégorie de salariés. Un exemple ? L'avenir de l'un des deux orchestres est en jeu, puisque le plan du PDG prévoit une fusion, sinon une suppression. Agents d'entretien, employés à la direction musicale, réalisateurs ou producteurs... Tous dénoncent la future politique budgétaire dont risque de souffrir Radio France, selon eux. "Ce ne sont pas que des emplois, que des orchestres", reprend un salarié, ému. "C'est aussi une idée de la culture qui est en nous."
Ce vendredi, l'info aussi est "en grève"
"Je vous prie de m'excuser pour cette interruption involontaire du travail." Ce vendredi, pas de Raphaël Ebenstein à l'antenne. Le présentateur de France Info est dans le hall de la maison de la radio, une feuille de papier à la main : "L'info en grève." C'est une première. Le syndicat national des journalistes (SNJ) appelle à la grève, mais seulement vendredi. La quarantaine de professionnels présents craignent le plan de leur PDG, qui prévoit 200 à 300 départs volontaires. "Au bout de quinze jours, là, tout le monde en a marre, on aimerait que l'Etat intervienne un peu."
Pas de Raphaël Ebenstein aujourd'hui. En grève et c'est un sacré dilemme. "Je prie les auditeurs de m'excuser." pic.twitter.com/GmfpX7VF2C
— fabien magnenou (@fmagnenou) 3 Avril 2015
"Bien sûr que j'ai des inquiétudes pour l'emploi", glisse Fabienne Sintès, matinalière sur la même antenne. Non syndiquée, peut-être, mais tout aussi agacée par le silence de l'Etat, car au final, "c'est lui qui a le pied sur la pédale". La grève est longue et usante. "On a des auditeurs géniaux et bien sûr, le noyau dur va revenir, mais il y en a qui vont chercher l'info ailleurs." En attendant, le matin, elle fait "du gruyère", en composant comme elle peut, entre deux chansons.
Un peu plus tard, un concert débute dans l'agora, à quelques mètres de là. Des notes de musique s'envolent dans le bâtiment, semblables à celles qui ont remplacé de nombreux programmes à l'antenne, depuis plus de deux semaines. Plus le conflit va durer, plus il risque de laisser des traces. Certains journalistes confient des tensions en interne, entre les différents métiers. Selon le SNJ, un tiers des journalistes de France Info et de France Inter ont suivi l'appel à la grève.
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