Récit "Pépite" à Rennes, en galère au Barça, Ballon d'or à Paris... La trajectoire sinueuse d'Ousmane Dembélé vers le titre de meilleur joueur du monde

Article rédigé par Hortense Leblanc
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9min
Ousmane Dembélé soulève le Ballon d'or au théâtre du Châtelet à Paris le 22 septembre 2025. (FRANCK FIFE / AFP)
Ousmane Dembélé soulève le Ballon d'or au théâtre du Châtelet à Paris le 22 septembre 2025. (FRANCK FIFE / AFP)

Ousmane Dembélé a été sacré Ballon d'Or 2025 après sa saison exceptionnelle, et alors qu'il figurait parmi les nommés pour la première fois seulement.

De l’avis de tous les coachs qu’il a croisés, Ousmane Dembélé a toujours eu un talent hors normes, la définition même d'une "pépite". Mais il a pourtant fallu attendre que le natif d’Evreux ait 27 ans, la saison dernière, pour le voir tutoyer les sommets du foot mondial, et ainsi être nommé pour la première fois au Ballon d’or, qu’il a remporté, lundi 22 septembre. Avec une trajectoire aussi insaisissable que le joueur balle au pied. 

Arrivé à Rennes à l’âge de 13 ans, précédé d’une flatteuse réputation, Ousmane Dembélé grimpe vite les échelons. Surclassé, il est le meilleur buteur de l’équipe réserve, dirigée à l'époque par Julien Stéphan, à seulement 17 ans. "C'était déjà un joueur différent des autres. Il utilisait son pied droit et son pied gauche de manière quasi indifférente, sans qu'on sache réellement quel était son pied fort [...] On n'a pas eu à lui apprendre à dribbler, ça, il savait faire depuis tout petit", raconte le coach à France Bleu

Naturellement, ses performances sont remarquées par l’entraîneur de l’équipe première, Philippe Montanier. "Ousmane, je l’avais vu en U19 avant qu’il ne soit avec la réserve. Même si le club produit beaucoup de grands joueurs de qualité, il y avait encore plus de compliments sur lui. Et puis, il est de Vernon, comme moi, et on vient du même club formateur, la Madeleine d’Evreux, donc forcément j’avais un œil un peu plus affectueux vis-à-vis de lui", explique le technicien à franceinfo:sport. Le jeune Normand lui fait tout de suite bonne impression sur ses premiers entraînements avec l’équipe professionnelle, en 2015. "C’est une chose d’être très bon avec les jeunes, mais avec les pros, on voit le répondant qu’il a, avec un football plus puissant. Il était tout de suite au niveau".

Un premier bras de fer avec Rennes, avant un autre à Dortmund

Mais Ousmane Dembélé n’est pas identifié comme un crack seulement par le Stade rennais. Alors qu’il est toujours sous contrat stagiaire, de grands clubs européens se bousculent pour lui proposer un contrat professionnel. Le club breton réagit avec une offre similaire, mais sa pépite est décidée à partir. "Je remercie Rennes mais cette proposition arrive trop tard. J'ai envie d'être dans un club qui me fasse confiance à 100 %. Ici ce n'est pas le cas. Je ne changerai pas d'avis. J'ai toujours respecté leurs décisions, à eux de respecter les miennes", affirme-t-il alors dans L’Equipe

Pour autant, malgré un stage de préparation qu’il a boycotté, le Stade rennais tient à son attaquant et réussit à le conserver. Réintégré au groupe professionnel, avec un contrat, il fait ses premiers pas en Ligue 1 le 6 novembre 2015, avec une entrée en fin de match à Angers. Un statut de remplaçant qui ne durera pas plus d’un mois, avant qu’il ne devienne un titulaire indiscutable. "Il avait fait quelques matchs amicaux avant son bras de fer et avait été le meilleur attaquant pendant la préparation estivale, le plus performant, donc je savais très bien qu’il serait rapidement titulaire", se souvient Philippe Montanier, qui lui a donc donné ses premières minutes chez les professionnels. Quelques mois plus tard, avec 12 buts et 5 passes décisives en 25 matchs disputés, Ousmane Dembélé est élu meilleur espoir de la saison en Ligue 1. 

Ousmane Dembélé lors de sa première saison en professionnel avec le Stade Rennais, face à Lille, le 7 février 2016. (FRANCOIS LO PRESTI / AFP)
Ousmane Dembélé lors de sa première saison en professionnel avec le Stade Rennais, face à Lille, le 7 février 2016. (FRANCOIS LO PRESTI / AFP)

Reporté d’un an, l’envol du jeune attaquant vers un club plus huppé se produit à l’été 2016. Et c’est le Borussia Dortmund qui parvient à l’attirer. Il y marque 10 buts et distribue 21 passes décisives toutes compétitions confondues pour sa première saison, est encore élu meilleur espoir du championnat et figure dans l’équipe type. Surtout, il connaît ses premières en Bleu en septembre 2016, à 19 ans, avec un match amical contre l’Italie, disputé moins d’un an après son premier match professionnel. 

Mais en fin de saison, le FC Barcelone vient toquer à la porte, pour remplacer Neymar. Rien que ça... Voyant les dirigeants allemands ne pas céder aux offres barcelonaises, Ousmane Dembélé décide d’aller au bras de fer, encore. Il sèche les entraînements et obtient gain de cause. Il devient au passage le deuxième joueur le plus cher de l’histoire (105 millions d’euros + 40 millions de bonus) après Neymar (222 millions). 

Retards, blessures et déception au Barca

Pour autant, le club dont il rêvait depuis petit ne sera pas celui où il s’épanouira le plus. Sa première saison, en 2017-2018, est marquée par des blessures qui l’éloignent des terrains plusieurs mois. Il ne dispute que 23 matchs (4 buts et 8 passes décisives). La saison suivante est plus complète (42 matchs, 14 buts et 7 passes décisives), avant une rechute en 2019-2020, avec seulement 9 matchs disputés, pour un but. Ses retards récurrents à l’entraînement sont remarqués, sanctionnés, et le public blaugrana commence à perdre patience.

Leo Messi réconforte Ousmane Dembélé après une nouvelle blessure, le 27 novembre 2019, lors de Barcelone-Dortmund en Ligue des champions. (JOSEP LAGO / AFP)
Leo Messi réconforte Ousmane Dembélé après une nouvelle blessure, le 27 novembre 2019, lors de Barcelone-Dortmund en Ligue des champions. (JOSEP LAGO / AFP)

"Au Barca, ses points faibles étaient de ne pas faire tout ce qu’il faut dans la préparation invisible : la récupération, le sommeil, la diététique. Mais il a rectifié le tir dans ses dernières saisons, ça l'a rendu plus fiable", observe Philippe Montanier. "Les préparateurs physiques m’ont prévenu que si je ne travaillais pas aussi en dehors du terrain, je n’aurais pas de plaisir en match. Ils m’ont dit : ‘Tu ne vas pas beaucoup jouer, tu vas te blesser’. Mais je ne le voyais pas comme ça, j’étais trop jeune", reconnaissait d’ailleurs le principal intéressé dans une interview à Mundo Deportivo en 2022

En joueur plus mature, le Français s’épanouit davantage sous les ordres de Xavi, débarqué sur le banc barcelonais en 2021. Le coach croit en lui et lui donne sa confiance. "J'ai toujours vu en lui ses qualités de un contre un. Des qualités que j'ai rarement vues ailleurs. Il est pratiquement au niveau du meilleur Neymar, quand il était ici. Il doit oser tirer davantage au but. Mais je suis heureux pour lui. Il a beaucoup souffert ces dernières années. Des joueurs comme lui, il y en a très peu", assure l’entraîneur espagnol en septembre 2022. 

Un repositionnement qui le fait exploser au PSG

Mais une fois encore, l’histoire se termine en eau de boudin. Alors que le Barca était persuadé de pouvoir prolonger le contrat le contrat d’Ousmane Dembélé, le joueur dribble le club et s’engage avec le Paris Saint-Germain, à l’été 2023. "C’est quelqu'un qui a du caractère, assure Philippe Montanier. Pas un mauvais caractère, mais de la personnalité. Sur le terrain, même jeune, c’était un des premiers à sonner la révolte quand ça se passait mal"

Sa première saison est convaincante, et surtout pleine, sans vraiment de pépin physique, avec 42 matchs joués, pour 6 buts et 15 passes décisives. L’ailier est bon, mais peut encore faire mieux, car il manque d’efficacité. Luis Enrique trouve la parade en le repositionnant plein axe dans un rôle de faux n°9, pour une grande réussite, avec 35 buts et 15 passes décisives, en 53 matchs toutes compétitions confondues avec le PSG pour sa deuxième saison, celle de la consécration.

Surtout, il est l’un des plus grands artisans de la victoire en Ligue des champions, la première pour lui aussi. "Ousmane a toujours été un joueur différent. Il a toujours été capable de dribbler deux, trois ou quatre joueurs, de délivrer de nombreuses passes décisives et de marquer des buts comme en ce moment", complimentait Luis Enrique en février. Finalement, à en croire ceux qui l’ont croisé, le plus étonnant n’est pas qu’il ait réussi une telle saison en 2024-2025, c’est qu’il n’en ait pas réussi une de ce calibre plus tôt.

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