Le peloton divisé après l'interdiction par l'UCI de la position aérodynamique de descente dite "Mohoric"
La position aérodynamique de descente, dite "Mohoric", où le coureur s'assoit sur son tube de cadre sera interdite à partir du 1er avril. C'est ce qu'a officialisé lundi 8 février l'Union cycliste internationale avec l'objectif de prévenir les chutes graves pour améliorer la sécurité des coureurs. Une décision qui interpelle et divise au sein du peloton.
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Samedi 5 septembre 2020, huitième étape du Tour de France. Le coureur d’AG2R Citroën Nans Peters, assis sur le cadre de son vélo, lâche Ilnur Zakarin dans la descente du Port de Balès pour aller s’offrir une magnifique victoire en solitaire, sa première sur la Grande Boucle. Une image qu’on ne reverra peut-être pas de sitôt. Pas une victoire du Français, non, mais sa position aérodynamique dans la descente. En effet, ce lundi 8 février, l’Union cycliste internationale (UCI) a dévoilé une série de mesures pour améliorer la sécurité des coureurs. Parmi celles-ci, l’interdiction formelle à partir du 1er avril de "l’usage du tube supérieur horizontal de la bicyclette comme point d’assise", selon les termes de l’institution dirigeante. Cette technique, aussi appelée "Mohoric" du nom du cycliste slovène prénommé Matej qui l’avait utilisée pour la première fois en 2013 lors de son titre mondial en Espoirs, avait surtout été popularisée en 2016 par le quadruple vainqueur du Tour Chris Froome. A partir du 1er avril, si l’infraction est constatée, le coupable sera disqualifié par les organisateurs.
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Cette décision divise le microcosme du cyclisme mondial, avec son lot de mécontents mais aussi de coureurs ou dirigeants qui s’en réjouissent. Michal Kwiatkowski a été l’un des premiers noms du peloton à s’indigner de cette décision. "Si maintenant ils nous interdisent de rouler sur le cadre, l’année prochaine ce sera de lever les mains pour célébrer une victoire", ne décolérait pas le Polonais d’Ineos, interrogé sur l’Etoile de Bessèges par Cyclingnews. Son coéquipier Egan Bernal, vainqueur du Tour de France 2019, commentait pour Marca une décision "ridicule". "Je trouve ça complètement décalé, pas du tout approprié", acquiesce Nans Peters. "C’est très dommage et difficilement compréhensible même si ça s'entend sur l'aspect sécuritaire." Chris Froome et la jeune pépite britannique d'Ineos Grenadiers Thomas Pidcock se sont eux contentés de tweets sans équivoque.
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Pour appuyer leurs arguments, les coureurs opposés à cette nouvelle mesure avancent que la technique fait partie intégrante du métier, de l’arsenal d’un bon descendeur. "Ça fait partie de la maîtrise de notre machine, du vélo, de l’entraînement. Certains le maîtrisent, d’autres non. Chez les professionnels, ça n’a pas lieu d’être", s’étonne encore Nans Peters, adepte des descentes de col, lui le natif de Grenoble qui est parfois "obligé" d’utiliser cette pratique pour suivre des vélos plus aérodynamiques. "C’est juste un moyen de mettre la responsabilité des accidents sur les coureurs", s’agace pour sa part Kwiatkowski.
"Il ne faut pas attendre un accident grave pour faire évoluer le règlement"
Mais une partie du peloton, en revanche, se félicite de cette décision. Pierre Rolland, double vainqueur d’étape sur le Tour de France, est l’un d’eux. "Honnêtement, je pense que ce n’est pas une mauvaise chose. Je l’adoptais rarement car je la trouvais assez dangereuse", admet l’expérimenté coureur (34 ans) de l’équipe B&B Hotels. C’est justement cette dangerosité qui a poussé l’UCI a prendre cette décision. Si tous les interlocuteurs assurent que la position comporte moins de risques lorsqu’elle est utilisée en solitaire, lors d’une échappée par exemple, le crash pourrait cependant être bien plus grave au coeur du peloton. "Avec la position Mohoric en tête de peloton, si malencontreusement il y a un coup de vent, un trou, un caillou, et que quelqu’un se fout en l’air, qu’est ce qu’il se passe ?", questionne Pascal Chanteur, vice-président du syndicat Cyclistes professionnels associés (CPA), impliqué dans ce changement de règlement.
Si la réponse se devine assez aisément, elle ne s’est, fort heureusement, jamais vérifiée en course. "Je n’ai jamais vu une chute à cause de cette position", assure Nans Peters. "Je n’ai pas souvenir qu’il y ait eu un coureur qui s’est fait mal dans cette position mais il suffirait d’une fois pour un drame", prévient Pierre Rolland. Cette justification irrite justement beaucoup Pascal Chanteur, personnellement en faveur de l’interdiction prononcée. "Je rétorquerais à ces gens-là qu’il ne faut pas attendre un accident grave pour faire évoluer le règlement."
L’un des objectifs principaux de la mesure, c’est surtout de ne plus inciter les jeunes coureurs à reproduire ce qu’ils observent et parfois admirent en course. "Nous, les professionnels, on est une vitrine, un exemple pour beaucoup de jeunes cyclistes débutants, moins confirmés", explique Pierre Rolland. "Quand ils voient un champion faire ça, ils vont faire la même chose. On se doit de donner le bon exemple pour la sécurité."
"Si vous voulez changer quelque chose, il faut oser ouvrir sa bouche"
Si la décision fait autant parler depuis son annonce en fin de semaine dernière, c’est aussi parce que les membres du peloton n’ont, pour la plupart, pas le sentiment d’avoir été sondés sur la question. Dans le détail, seuls Matteo Trentin (UAE Team Emirates) et Philippe Gilbert (Lotto-Soudal) ont été mandatés pour représenter le syndicat CPA, ce qui avait d’ailleurs passablement énervé ce dernier, en décembre pendant les discussions organisées par l’UCI. "Seulement deux cyclistes ont pensé que ça en valait la peine : Matteo Trentin et moi", regrettait le Belge dans le journal Het Nieuwsblad. "Le CPA demande régulièrement aux coureurs de participer à ces réunions, mais malheureusement personne ne se montre. Si vous voulez changer quelque chose, il faut oser ouvrir sa bouche." Les débats n’ont pas fini d’alimenter le peloton mais plus en position "Mohoric", au risque de se voir mettre hors-course.
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