Violences faites aux femmes : "Plus de 6 200 femmes ne pourront pas être accompagnées cette année", alerte Laura Slimani, porte-parole de la Fondation des femmes

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Article rédigé par franceinfo - Édité par l'agence 6Medias
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La Fondation des femmes publie, mercredi 27 août, une enquête révélant l'ampleur ces dernières années de la baisse de subventions aux associations de lutte contre les violences faites aux femmes. Adjointe au maire de Rouen, porte-parole et directrice des projets de la Fondation, Laura Slimani est l'invitée du "11/13".

À l'occasion de la parution de l'enquête "Ne fermons pas la porte", publiée ce mercredi 27 août par la Fondation des femmes, et qui révèle une baisse drastique des subventions pour les associations de lutte contre les violences faites aux femmes, Lucie Chaumette reçoit Laura Slimani, porte-parole de la Fondation des femmes et adjointe écologiste au maire de Rouen, dans le "11h/13h".

Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.


Lucie Chaumette : Vous êtes directrice des projets pour la Fondation des femmes et vous avez travaillé sur l'enquête de La Fondation, dont on vient de voir certains chiffres. Dans l'enquête, on apprend que les associations qui luttent contre les violences faites aux femmes ont vu leurs subventions baisser d'environ 15 % en 2025. Elles viennent d'où ces baisses de subventions ? Qui ne donne plus d'argent ?

Laura Slimani : Le problème, c'est que ces baisses, elles émanent de toutes parts et c'est ça qui prend les associations à la gorge. On a aujourd'hui 38 % de ces associations qui témoignent de baisses issues des conseils départementaux qui sont chefs de file sur les violences faites aux femmes. Donc, ce sont des centres d'hébergement, des accueils de jour qui sont moins financés. Mais nous avons aussi les communes, les régions et l'État à 26 %. Le ministère des Droits des femmes est pointé du doigt par ces associations, comme étant également à l'origine de ces coupes budgétaires.

C'est plus de 6 millions d'euros en moins ?

Là, on parle uniquement des 148 associations qui ont répondu à cette enquête. Donc il faut savoir que c'est probablement beaucoup plus. Mais sur cet échantillon, effectivement, nous avons 6,7 millions qui sont déjà supprimés pour ces associations. Pour ces associations, elles nous disent que la conséquence directe, c'est plus de 6 200 femmes qui ne pourront pas être accompagnées cette année.

"Un choix extrêmement inquiétant"

6 200 femmes qui sont donc abandonnées par l'État, c'est ainsi qu'il faut le traduire, que vous le traduisez, ou pas ?

En tout cas, ce que nous disons, c'est que c'est un choix qui est vraiment extrêmement inquiétant. Il est aussi, de notre point de vue, incohérent avec la dynamique positive qui avait été enclenchée depuis 2019 et le Grenelle des violences conjugales. Pour nous, aujourd'hui, cette dynamique subit un coup d'arrêt. C'est aussi assez irresponsable parce que, dans le même temps, on demande aux femmes de parler, on leur dit d'aller chercher de l'aide, et la conséquence directe de ces coupes budgétaires, c'est qu'elles vont trouver porte close. Et puis troisièmement, c'est aussi dangereux parce que de la même manière que l'augmentation des moyens budgétaires a permis de faire reculer les féminicides ces dernières années, des coupes budgétaires vont probablement conduire à une hausse des féminicides, et pour la France, ce serait terrible de voir ces meurtres de femmes se démultiplier.

Il y a quel chemin entre la baisse des coupes budgétaires et une hausse potentielle des féminicides ? Qu'est-ce qui se passe entre deux pour peut-être amener à ça ?

En fait, il faut savoir que le risque de féminicide, le moment où il est le plus élevé, c'est au moment où une femme victime de violence va décider de partir. C'est donc à ce moment-là qu'il faut que le tissu associatif et institutionnel, y compris la police et la justice, qui sont aussi des institutions touchées par ces coupes budgétaires, en tout cas qui vont l'être ou qui le sont déjà, se mette en route et il faut que tous les maillons fonctionnent. Or, si vous appelez une association mais que le téléphone ne répond pas ou que vous devez attendre trois semaines avant d'avoir un rendez-vous, vous êtes en danger. Si vous appelez une association pour avoir un hébergement mais qu'il n'y a pas de place, vous êtes en danger. Si vous devez faire un certain nombre de procédures juridiques, par exemple déposer plainte, que vous souhaitez être accompagnée dans le cadre de ce dépôt de plainte par une juriste, mais qu'il n'y a plus de juriste dans l'association, vous êtes aussi en danger. Donc tout cela expose et exposera davantage les femmes à des féminicides. Et puis, nous tenons aussi à souligner que cette enquête nous a révélé que c'est dans les territoires qui sont déjà les plus touchés que les coupes budgétaires se font le plus sentir, notamment dans les territoires ruraux. Il y a 72 % des associations qui déclarent fermer ou réduire des créneaux de permanence.

Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.

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