Quarante ans d’IVG : regards croisés de médecins
Le mercredi 26 novembre marque les 40 ans de l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Depuis ses débuts dans la clandestinité, la pratique a beaucoup évolué. Et continue de diviser. France Info donne la parole à trois générations d’obstétriciens.
"Aucune femme ne recourt de gaieté de coeur à l'avortement"
C’est une date anniversaire capitale pour les femmes. Le 26 novembre 1974, Simone Veil, alors ministre de la Santé du président Valéry Giscard d’Estaing, montait à la tribune de l’Assemblée Nationale pour défendre la légalisation de l’avortement. Son discours est resté dans l’Histoire : "Je le dis avec toute ma conviction : l'avortement doit rester l'exception, l'ultime recours pour des situations sans issue. Mais comment le tolérer sans qu'il perde ce caractère d'exception, sans que la société paraisse l'encourager ? Je voudrais tout d'abord vous faire partager une conviction de femme. Je m'excuse de le faire devant cette Assemblée presque exclusivement composée d'hommes : aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l'avortement. Il suffit de les écouter."
220 000 IVG par an
40 ans après, on pratique en moyenne 220 000 interruptions volontaires de grossesse en France, un chiffre stable depuis une dizaine d’années. France Info a choisi d’aller entendre trois "générations" de gynécologues obstétriciens. Trois médecins au parcours, mais aussi aux points de vue très différents : Daniel Delubac, 68 ans, Sophie Gaudu, 57 ans, et Stéphanie Pozzi, 43 ans.
Au début des années 70, Daniel Delubac, aujourd’hui grand-père aux cheveux blancs, enchaînait les gardes à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière à Paris. A l’époque, des femmes confrontées à une grossesse non désirée confiaient leurs entrailles à des "faiseuses d’anges" : "A l’hôpital on récupérait les complications des avortements effectués par des faiseuses d’ange, souvent sur des grossesses tardives. Et là, c’était vraiment la cour des miracle, parce qu’il y avait dans ces opérations toute la misère du monde. Les jeunes internes étaient commis d’office pour faire les IVG. Je me suis installé à mon compte en 1977 et j’ai continué de pratiquer l’IVG. Mais dans les cliniques, les médecins comme moi étaient stigmatisés. Ceci dit, on s’en fichait un peu."
"Un service immense"
Stéphanie Pozzi est née quasiment avec la loi Veil. Elle est aujourd’hui responsable du centre IVG de l’hôpital Beckler à Clamart. Un poste qui la passionne, mais qu’elle a occupé par hasard : "Au fil des années, c’est devenue une évidence et aujourd’hui je ne fais quasiment plus que ça. Je pratique des aspirations sous anesthésie locale avec des patientes qui ne dorment pas, avec lesquelles je parle. Il y a aussi, bien sûr, la possibilité pour les patientes d’aller au bloc, sous anesthésie générale cette fois."
Mais la militante de ce trio c’est elle : Sophie Gaudu, 57 ans, gynécologue obstétricienne, chef de service à la maternité des Bleuets. "Une IVG qu’elle soit médicamenteuse ou par aspiration c’est un geste simple. Par aspiration c’est très rapide et c’est un service immense rendue à celle sur laquelle on la pratique" .
"Je ne dis pas non. Mais je ne fais plus l'acte."
Un geste simple que Daniel Delubac a choisi de ne plus pratiquer au début des années 2000 : "Quand j’ai commencé à faire des échographies, j’ai décidé d’arrêter. La grosseur du fœtus me dérangeait. Depuis je n’ai plus fait une IVG. Je ne dis pas non mais j’informe. Et je ne souhaite plus faire l’acte." 40 ans après, le débat reste vif. Sophie Gaudu déplore qu’une partie de la société soit dans le jugement : "Une IVG, on le porte toute sa vie, c’est forcément un drame. C’est ce qu’utilisent les lobbys anti-IVG pour culpabiliser et faire souffrir les femmes. Personnellement, j’estime qu’il serait normal que tous les services pratiquent des IVG jusqu’à 14 semaines et qu’il soit impossible de travailler dans un hôpital public lorsque l’on refuse de pratiquer l’IVG."
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