Procès d'un réseau de proxénétisme de mineures à Pontoise : un phénomène "tristement banal", selon une association

Sept personnes sont jugées à partir de lundi aux assises des mineurs du Val-d’Oise. Elles sont accusées d’avoir prostitué quatre jeunes filles pendant près d’un an.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le Palais de justice du Val-d'Oise. (MARINE CHAILLOUX / RADIO FRANCE)
Le Palais de justice du Val-d'Oise. (MARINE CHAILLOUX / RADIO FRANCE)

La prostitution des mineurs est un phénomène "tristement banal", constate lundi 15 septembre sur franceinfo, Lucile Rozane, présidente de l’association Équipes d’action contre le proxénétisme (EACP). La cour d’assises des mineurs du Val-d’Oise juge à partir de lundi un réseau de sept jeunes proxénètes, dont un collégien, accusés d’avoir forcé plusieurs jeunes filles de 13 et 14 ans à se prostituer entre 2020 et 2021 à Pontoise.

Les adolescentes, considérées comme des proies faciles, étaient placées en foyer. "Il y a souvent un proxénétisme de proximité qui se développe, et les jeunes filles, qui sont exploitées sexuellement, sont choisies parmi les plus vulnérables", explique Lucile Rozane.

La plus jeune, âgée de 13 ans, a réalisé 40 "prestations sexuelles" en moins d’un mois, des faits considérés en droit comme des viols, la victime étant âgée de moins de 15 ans. Loin des mafias ou des gangs, de jeunes mineurs "finissent par constituer des micro-réseaux. Malheureusement, ça devient tristement banal", ajoute-t-elle.

Des jeunes "complètement sous emprise"

Selon les estimations, sur les 20 000 mineurs touchés par la prostitution, la moitié sont hébergés par l’aide sociale à l’enfance ou en foyer ou en maison d’enfants à caractère social (MECS). "C’est très fréquent que ce soit des jeunes en fugue qui parfois retournent dans les structures, retournent dans leur famille, puis repartent vers les exploiteurs, tout simplement parce qu’elles sont complètement sous emprise", explique Lucile Rozane.

Ce phénomène a explosé en 2016. "Il y a eu une conjonction entre cette augmentation et la baisse de l’âge des victimes", souligne Lucile Rozane. D’après l’Office central de la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH), environ 35 000 à 40 000 annonces de prostitution sont diffusées chaque jour sur des sites spécialisés.

"99% des clients sont des hommes. Ils savent que ce sont des mineurs, tout simplement parce que le prix est un peu plus élevé que pour les majeurs."

Lucile Rozane, présidente de l’association Équipes d’action contre le proxénétisme

à franceinfo

Lucile Rozane déplore que "les clients ne soient pas suffisamment attrapés". Quand ils le sont, "les peines sont assez symboliques". Même constat pour les proxénètes : "Parfois on est étonné de la faiblesse des peines qui sont prononcées." Elle alerte aussi sur le phénomène de "contamination" lorsqu’une jeune fille est réintégrée dans un foyer. "Elle est encore sous emprise. Le proxénète va lui dire : 'Essaye de me ramener des copines.' Il y a une contamination qui s’effectue", explique-t-elle. Elle appelle à plus de fermeté et de moyens : "Il faudrait prendre des mesures beaucoup plus fortes pour les jeunes filles qui ont été sous emprise, avec probablement une prise en charge psychologique très lourde qu’elles n’acceptent pas toujours initialement, et peut-être des structures adaptées pour elles."

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