La maire de Bourg-lès-Valence, dans la Drôme, refuse de marier un Tunisien en situation irrégulière avec une Française

L'édile LR dit refuser de célébrer ce mariage, ne croyant pas en la sincérité de cette union. Le procureur de la République affirme, après enquête, que le Tunisien de 35 ans n'a jamais commis d'infraction, même mineure.

Article rédigé par franceinfo, avec ICI Drôme Ardèche
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
A gauche, Marlène Mourier, maire de Bourg-lès-Valence (Drôme). (MARIE BOEDA / ICI DROME ARDECHE / RADIO FRANCE)
A gauche, Marlène Mourier, maire de Bourg-lès-Valence (Drôme). (MARIE BOEDA / ICI DROME ARDECHE / RADIO FRANCE)

La maire LR de Bourg-lès-Valence (Drôme) refuse de marier dans sa commune un Tunisien en situation irrégulière avec une Française, soupçonnant un "mariage de complaisance" afin d'obtenir des papiers, rapporte mercredi 14 mai "ici Drôme Ardèche" (ex-France Bleu). Sylvie, âgée de 49 ans, et Bilel, âgé de 35 ans, devaient se marier samedi en mairie. Mais l'édile dit refuser auprès d'"ici Drôme Ardèche" de célébrer ce mariage, ne croyant pas en la sincérité de cette union. Ses soupçons se fondent sur une audition réalisée par une adjointe avant le mariage.  

"C'est l'aveu de ce monsieur qui nous dit textuellement : 'je veux me marier pour obtenir mes papiers'", assure Marlène Mourier à "ici Drôme Ardèche". "Je sais d'avance qu'un mariage comme ça, c'est un mariage de complaisance. Il n'est pas possible pour moi de l'effectuer. De ce fait, il n'y aura pas de mariage samedi". C'est la première fois que Marlène Mourier, maire de Bourg-lès-Valence, s'oppose à une union pourtant autorisée par la loi.  
 
"On est en pleins préparatifs, ça arrive à grand pas, mon cœur palpite, il fait boum boum", explique quant à elle Sylvie, la future mariée. Cette mère de six enfants a rencontré Bilel, 35 ans, sur Facebook. Ils vivent ensemble depuis huit mois : "On est un vrai couple, il y a beaucoup de rigolades, de partage. De mon côté ce n'est pas un mariage blanc, sinon je lui aurais dit 'ciao'". Bilel, quant à lui, n'a pas de papiers, son visa de touriste lui ayant été refusé. "Si je ne l'aime pas, pourquoi je suis avec elle ? Un étranger qui se marie à une Française, et hop, on soupçonne un mariage blanc", dénonce-t-il. 

La maire risque une peine de prison et une amende

De son côté, le procureur de la République affirme, après enquête, que le Tunisien de 35 ans n'a jamais commis d'infraction, même mineure. Aucun élément ne lui permet d'affirmer qu'il s'agit d'un mariage blanc. 
 
La maire sait ce qu'elle risque en s'opposant à la loi : cinq ans de prison ferme, une amende de 75 000 euros et une peine d'inéligibilité. "Je sais que la situation irrégulière ne vaut pas un refus de mariage. Mais dans ce cas-là, il s'agit d'un mariage insincère. Ce monsieur a eu un visa touristique qui a été rejeté. Il aurait dû être sous OQTF. Il n'a jamais eu de contrôle", estime Marlène Mourier.  

"Il travaille au noir. Tout le monde le sait mais ça ne choque personne. La personne qui doit se marier vient d'une situation fragile. Mon devoir, c'est de la protéger."

Marlène Mourier, maire de Bourg-lès-Valence

à "ici Drôme Ardèche"

Le maire de Valence, Nicolas Daragon, également président de l'Association des Maires de France dans la Drôme, lui apporte son soutien : "Il est inadmissible que la parole des maires ne soit pas entendue et respectée et qu’ils soient considérés comme de simples exécutants de l’Etat alors même qu’il leur est demandé d’instruire les demandes de mariage", déclare-t-il. 
 
En juillet 2023, Robert Ménard, maire de Béziers, avait lui aussi refusé de célébrer le mariage d’une Française, Eva, et d’un Algérien de 23 ans, Mustapha, sous obligation de quitter le territoire (OQTF) et connu pour des faits de vol. Soupçonnant un "mariage blanc", le maire avait jugé illégitime d’unir une personne en situation irrégulière, bien que le parquet ait validé l’union. Le couple a porté plainte, et Mustapha a été expulsé vers l’Algérie deux semaines plus tard. Robert Ménard, convoqué le 18 février 2025 devant la justice, a rejeté le "plaider-coupable", s’estimant non coupable, et sera jugé en correctionnelle. Il risque jusqu’à cinq ans de prison, 75 000 euros d'amende et une inéligibilité.

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.