Pourquoi les chiffres sur la délinquance étrangère sèment le trouble
Une étude officielle montre une hausse de la délinquance étrangère en France depuis 2006. Cependant, ces statistiques, qui tendent à conforter la position du gouvernement, doivent être pris avec prudence.
Entre 2006 et 2011, la part des étrangers parmi les personnes "mises en cause" pour des vols en France est passée de 12,8% à 17,3%, selon les données d'une étude (en PDF) de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) publiée mercredi 15 février. Pour les violences aux personnes, la part est en baisse de 14,2% à 12,4%. Pour les vols sans violence, plus de 20% des mis en cause sont de nationalité étrangère, et le chiffre est inférieur à 8% en matière de dégradations ou de destructions.
Mercredi, les réactions ont afflué de la part des responsables politiques de tous bords, qui se sont empressés de reprendre les chiffres publiés. Sans suivre nécessairement les "mises en garde" de l'ONDRP quant à l'interprétation des données. Pourquoi l'analyse des chiffres sur la délinquance étrangère est-elle si délicate ?
• Parce que c'est une première
Pour la première fois, l'Observatoire s'intéresse à la répartition des personnes impliquées par nationalité. Sur ce point, les résultats pourraient plutôt servir le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, qui pointe du doigt depuis fin décembre "une délinquance étrangère supérieure à la moyenne enregistrée dans notre pays" et a mis en cause d'une façon répétée les étrangers venus de Roumanie. L'étude, commandée par Claude Guéant, épluche en détail l'âge, le sexe et la nationalité des étrangers mis en cause entre 2008 et 2010. Elle s'appuie pour cela sur deux fichiers de police et de gendarmerie, le Stic et la BNSD, selon lesquels le nombre de Roumains mis en cause a doublé pour cette période.
• Parce que chiffrer la délinquance est impossible
Organisme officiel chargé des statistiques de la délinquance, l'ONDRP a assorti son étude de mises en garde, soulignant qu'il faut éviter "d'utiliser les chiffres à des fins abusives". La "délinquance" est en effet une construction statistique qui ne peut être résumée en un seul chiffre, et "toute expression tendant à faire croire qu’on peut la mesurer directement est trompeuse".
Pour ses analyses, l'Observatoire s'appuie sur les chiffres de la police et de la gendarmerie concernant les "mis en cause", c'est-à-dire les personnes arrêtées par les forces de l'ordre et dont le dossier a été transmis au procureur de la République. Il ne s'agit donc pas de toutes les personnes interpellées, ni des seules qui vont jusqu'à être condamnées. C'est un choix statistique, qui exclut forcément les auteurs d'infractions qui ne sont pas repérés.
• Parce que la récupération politique n'est jamais loin
A la suite de la publication de l'étude, des réactions sont apparues à gauche, à droite et à l'extrême droite. "L'Observatoire ouvre les yeux de tous de nos compatriotes sur les méfaits d’une immigration massive et incontrôlée", a estimé le vice-président du Front national, Louis Aliot, jugeant que l'étude révèle "une corrélation entre immigration et insécurité".
Le député UMP Eric Ciotti a lui jugé que "cette étude confirme la sur-représentation de la délinquance étrangère". Selon lui, elle "balaie la polémique un peu ridicule après le discours de Grenoble" dans lequel le chef de l'Etat avait pour la première fois établi un lien clair entre délinquance et immigration.
Le socialiste François Rebsamen a pour sa part affirmé que la publication marquait "l'entrée en campagne de Nicolas Sarkozy d'un parfum nauséabond". Il a dénoncé "la concomitance entre ce rapport, l'annonce d'un projet de loi [notamment sur la délinquance étrangère] qui serait déposé le 1er mars et les propositions du candidat Sarkozy annonçant un référendum sur l'immigration".
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