: Vidéo Pourquoi la loi Veil sur l'IVG a mis plus d'un quart de siècle à s'appliquer en Polynésie française
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À l'occasion des 50 ans de la législation sur l'interruption volontaire de grossesse, le documentaire "IVG en Polynésie, 26 ans après", diffusé lundi soir sur France 3, expose les raisons pour lesquelles le décret d'application n'est entré en vigueur qu'en 2001 dans ce territoire d'outre-mer.
Le 17 janvier 1975, la loi Veil, autorisant l'interruption volontaire de grossesse (IVG) est promulguée en France. Un jour historique pour de nombreuses femmes qui ont lutté pendant des décennies pour acquérir la dépénalisation de l'avortement. Si, dans un premier temps, cette loi est autorisée à titre expérimental pour une durée de cinq ans, elle devient réellement pérenne à partir de 1979. Porté par Simone Veil, la ministre de la Santé de l'époque, ce droit fondamental, que la France vient d'inscrire dans sa Constitution, ne sera pourtant appliqué qu'en 2001 en Polynésie française, comme le révèle un documentaire intitulé IVG en Polynésie, 26 ans après, réalisé par Laurence Generet et diffusé lundi 13 janvier à 23h05 sur France 3.
Le film interroge les raisons d'un tel retard, notamment les influences politiques, morales, sociétales et surtout religieuses qui ont pesé sur le débat pendant des d'années. Il livre les témoignages de femmes ayant eu recours à l'IVG, entre abus médical, rejet social, violences et culpabilité.
Des liens culturels entre le politique et le religieux
La culture polynésienne est imprégnée de traditions religieuses qui ont façonné la vie des autochtones et qui demeurent encore aujourd'hui très présentes. Dans les cinq archipels qui composent la Polynésie françaises, les différentes Eglises jouent un rôle central sur les sujets de société, les mœurs et les mentalités des habitants, et exercent une énorme influence sur la vie politique. Les élus locaux ne prennent aucune décision importante sans en référer, au préalable, aux religieux. Lorsque la loi Veil est adoptée en 1975, ils freinent, de concert, son application sur le territoire.
"Ici, les responsables politiques au gouvernement ou dans l'Assemblée territoriale étaient des gens qui étaient issus des religions catholique et protestante surtout (...) et donc étaient très sensibles à la défense de la vie. Donc c'est sûr que cela ne pouvait pas coller avec le projet de loi Veil", explique, dans le documentaire, monseigneur Jean-Pierre Cottanceau, archevêque de Papeete. Le gouvernement français, soucieux de ne pas semer le chaos dans ce territoire sur lequel il effectue à l'époque des essais nucléaires controversés, n'oblige pas sa classe politique à appliquer coûte que coûte la loi Veil. "L'une des caractéristiques majeures de la culture politique polynésienne, c'est justement la présence des Eglises, contrairement à ce qu'il se passe dans l'Hexagone", expose Sémir Al Wardi, professeur à l'université de Polynésie française.
"Je rappelle que la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat n'est pas applicable ici."
Sémir Al Wardi, professeur à l'université de Polynésie françaiseDans le documentaire "IVG en Polynésie, 26 ans après"
La puissance de l'Eglise, qui se voit comme "une sentinelle vigilante" pour la société polynésienne, selon le pasteur Taaroanui Maraea, entrave durablement la liberté des femmes, obligées de pratiquer des avortements clandestins, souvent dangereux et coûteux. Cette interdiction de l'IVG pendant plus d'un quart de siècle a créé une médecine à deux vitesses et renforcé les inégalités face à l'accès aux soins entre les femmes de milieux aisés et celles en situation de précarité.
En 2001, la loi Veil s'est enfin imposée sur le territoire, mais le sujet reste brûlant. En 2017, Vaiana, alors âgée de 18 ans, apprend qu'elle est enceinte. "J'en tremblais physiquement, profondément, en me disant : 'Je ne vais plus être seule'", raconte la jeune femme, heureuse de cette nouvelle. Mais la réaction négative de son compagnon, son jeune âge et sa situation financière instable, la pousse à pratiquer une IVG. "Ma maman l'a mal pris. Jusqu'au point où elle a voulu me rosser, me tabasser. Alors j'ai fui." Vaiana fait alors face seule à cette épreuve avec un fort sentiment de culpabilité. "J'étais seule confronté à ce péché, car je suis catholique."
Le documentaire IVG en Polynésie, 26 ans après, réalisé par Laurence Generet, est diffusé lundi 13 janvier à 23h05 sur France 3 et sur la plateforme france.tv.
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