Pétition pour un référendum sur l'immigration de Philippe de Villiers : les coulisses d'un emballement bien orchestré

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Article rédigé par France 2, L'Oeil du 20 heures - M. Subra-Gomez, R. Degardin, H. Puffeney, S. Broyet, G. Messina, X. Lepetit, L. Totorino. - Édité par l'agence 6Medias
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Une pétition lancée par l'ancien eurodéputé souverainiste Philippe de Villiers fait grandement parler d'elle. Elle réclame un référendum sur l'immigration et revendique plus d'un million de signataires en quelques jours. Mais certains mettent en doute la fiabilité de ces signatures. Les équipes de "L'Œil du 20 Heures" ont enquêté.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.


Il est un peu le revenant de cette rentrée politique : Philippe de Villiers, ancien candidat souverainiste à la présidentielle, réclame un référendum sur l'immigration au travers d'une pétition. "La France, tu l'aimes ou tu la quittes. Rendez-vous sur le site, signez la pétition. Je compte sur vous", avait appelé dans le Journal du dimanche (JDD) courant septembre l'ancien homme politique. Une initiative largement relayée par les médias du groupe Bolloré. "L'Œil du 20h" vous raconte les coulisses d'un emballement bien orchestré.

Depuis dix jours, sur CNews, les chroniqueurs se font régulièrement l'écho de cette pétition soulignant que Philippe de Villiers aurait mobilisé seul les signataires. Tout seul ? Pas vraiment. Sur le site de la pétition, nous avons comptabilisé les signatures en temps réel. Des pics d'affluence apparaissent. Ce mercredi matin, entre 8h30 et 10h30, puis à la mi-journée. Au même moment, les chroniqueurs de CNews évoquent la pétition.

Sur la radio Europe 1, autre média propriété de Vincent Bolloré, les journalistes donnent carrément la marche à suivre pour trouver facilement la pétition en ligne. Ce soutien à peine voilé laisse certains journalistes de la station désabusés : "On voit bien que derrière, il y a la volonté de faire la promo de de Villiers. Ce n'est pas vraiment de l'info", confie l'un d'eux anonymement.

"Il n'y a aucun contrôle qui est fait sur le formulaire"

Ces médias sont plus qu'un simple relais. Ils sont des partenaires de la pétition. C'est même écrit noir sur blanc sur le site du formulaire : les signataires peuvent consentir à communiquer leurs coordonnées à Lagardère Media News. Le groupe de Vincent Bolloré cherche-t-il à recruter de futurs abonnés ? Contacté, Lagardère n'a pas souhaité faire de commentaire.

En dix jours, la pétition de Philippe de Villiers a récolté plus d'un million et demi de soutiens. Mais des experts en cybersécurité s'interrogent sur l'authenticité des signatures. "Je vais ici rentrer un faux nom et je vais même aller plus loin parce que je vais utiliser un nom, un prénom et une adresse e-mail, ainsi qu'un code postal, qui n'existent pas du tout. C'est-à-dire que je vais signer 'Azerty', le site m'indique que j'ai signé la pétition. Il n'y a aucun contrôle qui est fait sur le formulaire, on voit qu'on peut mettre ce que l'on veut. Donc on peut signer pour un tiers, mais on peut également signer pour quelqu'un qui n'existe pas. Il suffit pour cela de rafraîchir la page une fois qu'on a déjà signé", analyse Benoît Grunenwald, expert en cybersécurité ESET France.

Difficile d'évaluer le nombre de fausses signatures qui auraient pu se glisser dans cette pétition dont le sujet trouve un écho dans l'opinion. Mais sur un autre site plus sécurisé, celui de l'Assemblée nationale, une pétition qui réclame également un référendum sur l'immigration n'a récolté, elle, qu'un peu plus de 3 200 signatures.

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