Violences faites aux femmes : "la culture du féminicide est portée par de très nombreux arts", rappelle l'historien Ivan Jablonka
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Alors que 115 féminicides ont été commis depuis le début de l'année 2025, l'historien Ivan Jablonka et Rachel Flore-Pardo, avocate, sont les invités politiques de franceinfo, samedi 27 septembre. Ils croisent leurs regards et leur expertise sur la culture du féminicide.
Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.
En France, Inès Mecellem a été tuée par son conjoint, alors qu'elle avait multiplié les alertes auprès des forces de l'ordre et porté plainte cinq fois. Dans le monde, les chiffres sont effarants : 47 000 féminicides chaque année, soit une femme qui meurt toutes les 11 minutes Franceinfo propose, samedi 27 septembre, un dialogue croisé entre un historien, Ivan Jablonka, et une avocate spécialisée dans les dossiers de violences faites aux femmes, Rachel Flore-Pardo.
Franceinfo : Ivan Jabouka, vous publiez "La culture du féminicide" aux éditions du Seuil, une histoire des représentations pour appréhender le regard, ou plutôt apprendre à déconstruire ces représentations. (...) Ça va de la mythologie, la Bible à la culture Netflix, en passant par les grands peintres ou encore le cinéma. D'abord le terme. Le terme est ancien, il s'est installé et vous dites pourtant qu'il n'est pas complet, il est trop limité. Ce féminicide, mourir parce qu'on est femme, être tuée pour ça, c'est trop limité aux crimes conjugaux aujourd'hui.
Ivan Jabouka : Le féminicide, c'est le meurtre d'une femme en tant que femme. En tant qu'il y avait en elle quelqu'un à frapper, humilier, violer, tuer, massacrer en quelque sorte. Et en effet, le terme est un quasi néologisme en langue française. Il est entré dans le dictionnaire il y a une dizaine d'années à peine. On sent que le mot est nouveau, mais la chose, elle, ne l'est pas. Elle est même très ancienne puisqu'on parle, on représente, on justifie les meurtres de femmes depuis plusieurs millénaires. Et je me suis intéressé justement à la manière dont ces féminicides sont adossés à une culture, de même que le viol est adossé à une culture du viol, de même les meurtres de femmes sont associés à une culture du féminicide qui vient les représenter, les illustrer et aussi les justifier.
Ce qui est passionnant à travers toutes les images que vous proposez, qu'elles soient anciennes, qu'elles soient plus récentes, c'est qu'il y a une scène qui est rejouée. Il y a une sorte de scénario qui revient : une violence sexualisée qui est imposée à une femme via la mutilation de son corps, avant que le meurtre achève la scène. Et aucun domaine de la création n'y échappe.
Oui, effectivement, la culture du féminicide est portée par de très nombreux arts. La littérature, la peinture, la sculpture, le journalisme, le polar, la magie et jusqu'à la pop culture, le cinéma, la chanson et la publicité. Donc, il y a une très grande cohérence narrative et visuelle. La culture du féminicide est construite autour de représentations d'un côté, et de justifications de l'autre. Les représentations, ce sont un certain nombre de scénarios et les justifications, ce sont les préjugés par lesquels on essaye d'expliquer pourquoi cette femme a été tuée, pourquoi en fait elle devait mourir, pourquoi son attitude justifiait un châtiment particulièrement cruel. Et ce faisant, on excuse aussi l'homme qui l'a tuée.
2 000 ans de féminicide, on ne va pas les retracer, mais on parlait de la mythologie, on pense à l'assassinat d'Agrippine. Racontez-nous les premiers récits, les récits primitifs.
Par exemple, la mythologie, c'est le meurtre d'Iphigénie, le sacrifice nécessaire de cette jeune fille pour que la flotte grecque puisse partir guerroyer vers Troie. Donc, on voit par exemple que par ce meurtre, la solidarité, l'unité masculine se reforme sur le corps d'une femme. Et il y a évidemment beaucoup d'autres exemples.
Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.
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