Prison de haute-sécurité : un "recul terrible des droits des détenus", dénonce l'avocate de l'un des détenus transférés à Vendin-le-Vieil

Les 17 premiers détenus ont été transférés mardi à Vendin-le-Vieil, prison qui va accueillir les 100 détenus les plus dangereux de France.

Article rédigé par franceinfo
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La prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais). (SEBASTIEN COURDJI / MAXPPP)
La prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais). (SEBASTIEN COURDJI / MAXPPP)

"Les conditions vont être extrêmement difficiles pour les détenus", déplore mercredi 23 juillet sur franceinfo, Christine d'Arrigo, avocate de l'un des 17 premiers détenus parmi les 100 narcotrafiquants "parmi les plus dangereux de notre pays" transférés mardi à la prison de haute sécurité de la prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais). C'est "un recul terrible sur le plan des droits de l'homme, des droits des détenus", dénonce-t-elle.

Elle a pu s'entretenir avec son client, l'un des leaders présumés de la DZ Mafia, à Marseille, "parce qu'il a le droit de m'appeler de sa cabine téléphonique qui se situe dans sa cellule". Ce dernier lui a raconté son transfert. "Il est réveillé à 4h du matin. Il est parti sans aucune affaire, dans des conditions un peu particulières, un peu rapide. Pour des raisons de sécurité, évidemment, il n'était pas informé à l'avance de la date exacte à laquelle il allait être transféré, mais on se doutait que c'était dans l'air depuis quelques jours. Donc, il n’était pas surpris", rapporte l’avocate.

Elle a ensuite fait part de sa vive inquiétude et préoccupation : "Je crois que c'est à la hauteur de ce que monsieur Darmanin avait annoncé. Ça va être des conditions extrêmement difficiles pour les détenus. Ça va être très difficile."

Un retour "40 ans en arrière"

L'avocate dénonce un "coup de communication" du ministre de la Justice "qui prépare clairement sa campagne électorale peut-être présidentielle" mais surtout, elle estime que "l'on revient 40 ans en arrière avec les QHS, les Quartiers de haute sécurité" fermés en 1982 par le garde des Sceaux de l'époque, Robert Badinter. Or, à Vendin-le-Vieil et bientôt à Condé-sur-Sarthe, "ce sont des quartiers de haute sécurité revisités" alors que "le passé a prouvé que ça ne marche pas sur les détenus", fustige-t-elle.

Christine d'Arrigo déplore une "déshumanisation totale de la justice" qui "enlève tout espoir" au détenu. Consciente qu'une partie de l'opinion approuve cette mesure du ministre de la Justice, elle tient à rappeler que son client est présumé innocent et que les 17 détenus transférés à Vendin-le-Vieil n'ont pas tous été condamnés définitivement.

"Quand on enlève à des détenus, dangereux ou pas d'ailleurs, toute forme d'espoir, c'est là que ça devient dangereux, justement". 

Christine d'Arrigo, avocate

à franceinfo

Elle souligne par ailleurs que son client est désormais détenu "à 800 kilomètres de sa famille, à 800 kilomètres de ses juges et à 800 kilomètres de ses avocats". Il lui a fait part de ses inquiétudes. "Ce qui angoisse le plus mon client, c'est d'être privé de sa famille, de sa maman avec qui il ne pourra pas s'entretenir, qu'il ne pourra pas voir, sauf à travers une paroi vitrée. Il ne pourra pas les toucher", relate-t-elle. L’avocate dénonce les conséquences du régime de l'isolement. "C'est une torture. Vous êtes 22h/24h enfermés dans votre cellule de six ou neuf mètres carrés, vous ne voyez personne."

L'avocate alerte sur les conséquences psychologiques : "Des gens finissent par se suicider, des gens qui deviennent fous. J'ai des clients qui me disent qu'ils voient les murs bouger, qu'ils entendent des voix alors qu'ils étaient parfaitement normaux à la base." Christine d'Arrigo dénonce une "dérive très inquiétante pour la démocratie" car les conditions de détention à Vendin-le-Vieil sont "extrêmement graves" et marquent "un recul terrible sur le plan des droits de l'homme, des droits des détenus".

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