Probable entrée de Missak Manouchian au Panthéon : "C'est la reconnaissance de cette composante si importante de la Résistance française", explique un historien
L'historien Denis Peschanski répond aux questions de franceinfo après qu'Emmanuel Macron s'est dit "extrêmement favorable" à la panthéonisation du résistant d'origine arménienne Missak Manouchian, fusillé par les Allemands sous l'Occupation.
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"C'est la reconnaissance de cette composante si importante de la Résistance française" ; les résistants étrangers, a affirmé vendredi 16 juin sur franceinfo Denis Peschanski, historien, spécialiste de l'histoire et de la mémoire de la Seconde Guerre mondiale et directeur de recherche émérite au CNRS, alors qu'Emmanuel Macron s'est dit "extrêmement favorable" à la panthéonisation du résistant d'origine arménienne Missak Manouchian, fusillé par les Allemands sous l'Occupation. Le président doit rendre sa décision dimanche.
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Le réseau de Missak Manouchian est "une des composantes de la Résistance française qui signe le rôle des résistants étrangers dans la Résistance française", rappelle Denis Peschanski. Si Emmanuel Macron confirme la panthéonisation du résistant d'origine arménienne, "ce sont tous les étrangers qui ont combattu en France" qui seront honorés.
Franceinfo : Quelle est l'importance de Missak Manouchian dans la Résistance française et quelle est l'histoire de son réseau ?
Denis Peschanski : C'est une des composantes de la Résistance française qui signe le rôle des résistants étrangers dans la Résistance française. Il a participé d'abord au travail politique clandestin. Et puis il a intégré les francs-tireurs et partisans de la main-d'œuvre immigrée. La main-d'œuvre immigrée, c'était une structure mise en place par le Parti communiste pour encadrer les ouvriers étrangers qui venaient en France. À ce moment-là, se crée une structure, les FTP-MOI, les francs-tireurs et partisans, qui vont mener la guérilla urbaine. Lui va être, à partir de début août jusqu'à novembre 1943, le chef militaire de ces FTP-MOI de la région parisienne.
Quelles sont les principales actions qu'ils ont menées pendant l'Occupation ? En quoi son réseau a eu une résonance toute particulière ?
Il avait une résonance toute particulière parce qu'en 1943, il y avait très peu de groupes qui menaient la lutte armée à Paris. Tout simplement parce que la police était particulièrement efficace. C'était la police française qui, d'une certaine façon, travaillait au service de l'Occupant avec ses fameuses brigades spéciales des Renseignements généraux.
Justement, parce qu'il en restait très peu, les résistants étrangers ont eu une importance toute singulière avec des actions très spectaculaires. Il y a Manouchian, qui est le chef militaire. Mais avant, il y avait un Juif roumain qui s'appelait Holban, qui était son prédécesseur et qui sera son successeur. Il y avait des groupements de nationalités différentes. Il y avait un groupe italien très fort, il y avait un groupe de Juifs polonais aussi très fort. Et les différentes actions étaient menées par exemple par le détachement des dérailleurs de Boczov, un Hongrois. Ce dernier menait avec un certain nombre de ses camarades des actions pour faire dérailler les trains allemands à proximité de Paris.
Il y a eu aussi des actions très spectaculaires, comme des exécutions de personnalités allemandes qui ont eu un impact extrêmement important, en particulier l'impact sur l'opinion publique en France. Par exemple, le 28 septembre 1943, ils ont exécuté Julius Ritter, qui était le représentant du patron du Service du travail obligatoire [STO], service qui était imposé aux jeunes de tous les pays occupés. La société française était vraiment traumatisée par ce départ obligé des jeunes de 20, 21, 22 ans travaillant donc en Allemagne. Exécuter le responsable de ce STO en France a eu certainement un impact fort dans l'opinion. Bien sûr, ils ont mené des actions armées également. Mais le principal impact que l'on retiendra de ces actions armées est un rôle politique sur l'évolution de l'opinion, sur l'évolution de la société vis-à-vis des Allemands, vis-à-vis de la résistance bien sûr, et vis-à-vis de Vichy.
Vous faites partie de ce comité Missak Manouchian au Panthéon. Est-ce que cette entrée probable de Missak Manouchian au Panthéon serait une forme de reconnaissance pour les actions mal connues des étrangers dans la Résistance française ?
C'est une étape fondamentale. C'est la reconnaissance de cette composante si importante de la Résistance française.
Pour donner un seul exemple : au Mont-Valérien, il y a eu pendant toute la guerre, 1 006 résistants et otages qui ont été fusillés. Sur ces 1 006, il y avait 185 étrangers. Cela vous donne une idée de la proportion de ceux qui s'engageaient dans ce type de combat en guérilla urbaine.
Denis Peschanski, historien, spécialiste de la mémoire de la Seconde Guerre mondialefranceinfo
Faire rentrer Manouchian au Panthéon, c'est d'abord pour rendre hommage à sa propre personnalité, son histoire, son attachement à la France très fort. Il va venir en France en 1924 et il a un lien très fort avec la Révolution française, les Lumières. Il s'inscrit dans cette pensée universaliste et il va s'engager dans le mouvement communiste à partir du Front populaire. Cela va être un des dirigeants à la résistance armée à Paris. À travers lui, c'est le groupe qu'il dirige, où il y a des Italiens, des Espagnols, des Juifs d'Europe centrale et orientale et donc des Arméniens. C'est tout ça qui rentre en quelque sorte au Panthéon, si c'est annoncé dimanche suivant la volonté du président. Et en même temps, ce sont tous les étrangers qui ont combattu en France.
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