Alexandre, "vegan", aimerait "mourir pour les animaux"
Franceinfo a rencontré ce militant qui n’a pas hésité à se faire marquer au fer rouge pour dénoncer l’exploitation animale.
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A ses pieds, Babi, son lévrier whippet, se repose sur un tapis de coussins. Lové à ses côtés, Guizmo, son pinscher, se calme après s'être longuement agité dans le séjour. Fermement campée dans le canapé, "son canapé", Bouba, la dalmatienne, ne change rien à ses habitudes, et ne laisse que peu d'espace au visiteur de passage. "Je ne peux pas la déloger, c'est son coin à elle", s'excuse Alexandre, leur propriétaire, qui se contente d'un simple tabouret.
A 32 ans, il reçoit dans son salon parisien, où son amour des animaux transparaît dans la décoration. Des statuettes de chat s'empilent dans la bibliothèque, une statue de licorne trône au beau milieu de la pièce et, sur les murs, deux de ses chiens adoptés s'affichent sur des peintures spécialement commandées par lui. Depuis quelques années, les bêtes ont envahi la vie de ce cadre bancaire vegan, opposé à toute forme d'exploitation animale, que ce soit par les industriels de l’agroalimentaire ou de la mode, les laboratoires pharmaceutiques ou les cirques.
De ce choix de vie, il a fait un combat, qu’il porte jusque dans sa chair. Sur son torse, il arbore fièrement son tatouage "269", du nom du collectif qu’il gère, pendant français d’un mouvement lancé à Tel Aviv en 2012. En Israël, la rhétorique est brutale : le collectif, ainsi nommé en référence à l'identifiant d'un veau promis à l’abattage, dénonce un "holocauste animal". Ses actions sont polémiques : les militants sont invités à se faire tatouer, voire marquer au fer rouge en public pour dénoncer la cruauté envers les bêtes. Alexandre a sauté le pas l’été dernier, et "269" s’affiche aussi dans son dos, sous la forme d’une large cicatrice. L’aboutissement pour lui d’une vingtaine d'années de militantisme, qui ont débuté dans le cercle familial.
"Libéré" par le véganisme
"Tout a commencé à l'âge de 11 ans, raconte-t-il. Je suis devenu végétarien après avoir vu une campagne de Brigitte Bardot contre le transport et l'abattage des animaux. Je me suis dit que je ne voulais plus participer à cela." A l'aube de son adolescence, Alexandre raconte avoir bouleversé les habitudes de la maisonnée. "Ma mère essayait de cacher de la viande dans mon assiette, elle craignait les carences, explique-t-il. J'ai fait des pieds et des mains auprès de mon père pour résilier notre abonnement à Canal+, qui diffusait de la corrida."
Après vingt ans de végétarisme, Alexandre bascule dans le véganisme il y a deux ans : après avoir éliminé la viande, il abandonne tout produit animal, que ce soit dans son alimentation ou dans son habillement. C'est son mari, "ce vrai carnivore, qui aimait la fourrure, le cuir, qui pouvait avaler un kilo de viande dans le week-end" qui le convainc finalement de passer au stade supérieur. "Je tentais de l’informer, sans faire de prosélytisme, mais il était complètement réfractaire", se souvient Alexandre. "Il me braquait plus qu’autre chose, confirme l’intéressé. Mais j’étais déjà contre les tests sur les animaux." De lui-même, ce dernier se documente sur internet et annonce à Alexandre son intention de devenir vegan. "Je l’ai suivi et je me suis senti libéré, confie le cadre bancaire. Enfin à l'aise avec mes idéaux."
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"Du trash, du sang, du sexy"
Le couple s'engage dans la voie du militantisme actif. S'approche de plusieurs associations. Participe à de nombreuses manifestations. Mais Alexandre est déçu du manque de retentissement médiatique de ces événéments, qui dépassent rarement le cercle des initiés de la protection animale. C’est alors qu’il découvre le mouvement 269 sur la toile. Séduit, il décide d’adopter certaines de ses méthodes et de transposer le collectif dans l’Hexagone. (Attention, ces vidéos peuvent choquer.)
"Je me suis dit bingo, s’enthousiasme Alexandre. Du trash, du sang, du sexy, c'est vendeur pour les médias. Il faut qu'on organise un happening tatouage." Las, ce premier événement n’est qu’un succès d'estime, et n'est pas relayé dans la presse. Alexandre se résout alors à importer l’autre action choc du collectif israélien : il décide de se faire marquer au fer rouge pour faire entendre sa voix. L'opération est filmée par une caméra de Canal + : Alexandre accepte d’apparaître quasiment nu, malmené dans un garage parisien, un samedi à une heure de grande écoute.
"Prêt à devenir un martyr"
"Devoir faire un sacrifice pour la cause animale ne me cause aucun problème, je suis prêt à devenir un martyr, se justifie-t-il aujourd’hui. Je me limite juste parce que j’ai des responsabilités, je ne suis pas seul : j’ai un mari et des chiens dont il faut que je m’occupe." L’homme est conscient que sa démarche peut choquer, mais est convaincu de son impact : "Si on me disait qu’en se coupant une jambe, on toucherait 15 fois plus de personnes, je dirais ok allons-y." Qu’importe si la blessure au fer rouge a longtemps suinté, et si la cicatrice est toujours visible, Alexandre ne compte pas s’arrêter là.
Mais quand on aborde les prochaines actions de son collectif, il se fait plus prudent. Marque des pauses. Cherche ses mots. Et finit par se lever au beau milieu de la conversation pour placer son téléphone portable dans son micro-ondes. Le militant est persuadé d’être sur écoute en raison de ses récents coups d’éclat, évoque son "premier coup de fil anonyme", où "on entend clic-clic au bout du téléphone". Pas de quoi l’inquiéter pour autant.
L’essentiel pour lui est de faire passer au plus grand nombre son message : "On peut vivre et mieux vivre en minimisant son impact sur les animaux." Un "idéalisme", une "utopie", reconnaît-il lui-même : il sait bien que tout le monde ne deviendra pas de sitôt vegan, et ne veut "pas braquer les gens", mais "si chacun diminuait sa consommation de viande, ce serait déjà génial". Alexandre ne s’imagine pas terminer sa vie autrement que par son combat : "J’aimerais mourir pour les animaux. Mais pas tout de suite."
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