Médicaments anti-obésité : un business XXL
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Wegovy, Mounjaro, Saxenda. Des produits stars dopés par les réseaux sociaux, synonymes de perte de poids spectaculaire. En théorie, leur prescription est très encadrée mais il est facile de tomber sur des professionnels de santé très peu regardants.
1m64 pour 54 kg. Aucun médecin ne devrait accepter de me prescrire ce traitement réservé aux graves problèmes de poids.
Wegovy, Mounjaro, Saxenda... De quoi parle-t-on ?
Prescrits sous forme d’injections, ils font partie de la famille des substances médicamenteuses GLP-1, une hormone naturelle qui régule l'appétit et la glycémie. Et, depuis qu'ils ont obtenu l’autorisation de mise sur le marché français fin 2024, il est facile de s'en procurer en dehors du circuit officiel, notamment via des plateformes de téléconsultation : délivrance d'ordonnances et même livraison de médicaments.
Sur l'une de ces plateformes, directement en page d'accueil, cette mention : "Choisir un traitement", suivie d'un simple questionnaire de santé. Nous gonflons notre poids, dissimulons nos antécédents médicaux. Aucune consultation, aucun échange avec un quelconque médecin.
Une heure plus tard, contre moins de 30 euros, nous recevons une prescription pour 3 mois de traitement dans notre boîte mail.
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Cette ordonnance est-elle valable ?
Nous l’avons testée dans 5 pharmacies de la capitale : toutes acceptent de nous délivrer le médicament. Une seule semble s’en étonner. Je ne suis pourtant pas éligible au traitement. En octobre 2024, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) recommandait de limiter la prescription aux patients souffrant d’obésité sévère (IMC – le poids divisé par la taille au carré – supérieur ou égal à 35). Seuil abaissé en juin dernier à un IMC supérieur à 27, avec comorbidité, ou supérieur à 30. Soit des patients obèses, donc, mais aussi en surpoids.
Mais qui est ce médecin qui a prescrit un traitement lourd sans même nous avoir vus ?
L’ordonnance est signée par un certain Dr H., généraliste à Paris. Mais après quelques recherches, nous découvrons qu’il est en réalité chirurgien orthopédiste. Nous avons pu obtenir un rendez-vous avec lui, il ne niera pas avoir prêté sa signature à notre ordonnance mais bottera en touche devant nos questions.
Un professionnel de santé dans l'illégalité
Si rien n’interdit de délivrer une ordonnance à distance, un médecin Français n’a en revanche pas le droit de prescrire un traitement sans avoir vu physiquement le patient.
L'ANSM rappelle que "ces médicaments sont des traitements de seconde intention, en cas d’échec de la prise en charge nutritionnelle, et en association à un régime hypocalorique et à une activité physique. Des molécules indiquées dans l’obésité qui ne doivent pas être utilisées pour la perte de poids à des fins esthétiques, c’est-à-dire pour la perte de poids chez des personnes sans surpoids, ni obésité et qui n'ont pas de problèmes de santé liés au surpoids".
Des molécules indiquées dans l’obésité qui ne doivent pas être utilisées pour la perte de poids à des fins esthétiques
L'ANSMA L'Œil du 20H
Autrement dit, dans mon cas, un mésusage qui peut m'exposer à "des effets indésirables parfois graves", précise l'ANSM. Parmi les plus présents, les troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhées…). Plus rarement, des complications graves peuvent apparaître, comme des occlusions intestinales, des calculs biliaires, pancréatiques ou urinaires, ou des insuffisances rénales aiguës.
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Notre Dr H. est donc dans l’illégalité, ce que nous confirme l’Ordre des médecins : “De telles pratiques ne sont pas conformes au code de déontologie. Ce traitement de l’obésité justifie un examen clinique sérieux. Ce médecin s’expose aux sanctions habituelles : avertissement, blâme, interdiction temporaire d’exercice ou radiation.”
Contacté, le cabinet du Ministre chargé de la Santé assure de sa vigilance face "aux pratiques de plateformes de téléconsultation et de vente de produits de santé sur Internet. S’il s’avère que des prescriptions sont réalisées hors du cadre légal, tous les moyens seront mis en œuvre pour mettre fin à ces pratiques."
Le ministère annonce par ailleurs la publication d'une feuille de route "Prise en charge de l'obésité" d'ici la fin du mois de septembre.
Pour l'heure, seul le prix freine l’essor du médicament, en moyenne 300 euros par mois pour 4 injections. Mais face à l’épidémie d’obésité en France - 17,9 % des adultes selon l'Observatoire français d'épidémiologie de l'obésité (OFÉO) - les autorités envisagent de le rembourser prochainement.
PARMI NOS SOURCES :
Les médicaments anti-obésité désormais prescrits par tous les médecins
La Haute Autorité de santé ouvre la voie au remboursement du Wegovy dans des cas d'obésité sévère
Analogues du GLP-1 indiqués dans le traitement de l’obésité : l’ANSM fait évoluer leurs conditions de prescription et de délivrance
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