Géolocalisation des patients atteints du coronavirus : "Il faut voir les exigences des libertés", affirme le défenseur des droits
"Nous devons nous dire que nous vivons dans notre démocratie avec un certain nombre de droits fondamentaux et je suis chargé avec les tribunaux de les faire respecter", a rappelé Jacques Toubon.
"Il faut voir d'un côté ce que sont les exigences des libertés et de l'autre côté quel est le bénéfice de cette mesure de géolocalisation" a indiqué mercredi 25 mars sur franceinfo Jacques Toubon, le défenseur des droits et ancien ministre de la Justice, interrogé sur la possibilité de mettre en place la géolocalisation des malades testés positifs au coronavirus covid-19.
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Jacques Toubon plaide pour un débat large, dans la communauté scientifique, au Parlement et dans la société en général sur ces questions.
franceinfo : La santé doit-elle primer sur tout le reste, notamment sur les libertés publiques ?
Jacques Toubon : Je suis comme tout le monde, j'ai été très impressionné par l'appel que Martin Hirsch a lancé sur votre antenne. C'est clair qu'il n'y a pas d'ambiguïté pour le défenseur des droits, comme pour tout le monde, il faut arrêter la pandémie. Il faut protéger les personnes les plus vulnérables, il faut aider ceux qui se battent. Il n'y a pas d'alternatives.
Mais de par la Constitution, je suis chargé de veiller au respect des droits et des libertés fondamentales et donc je me pose des questions, parce qu'on a voté des textes dans lesquels il y a des restrictions de libertés ou des possibilités de restriction de libertés très importantes. Je prendrai un seul exemple : d'ici le 30 juin, vous n'aurez plus le droit d'aller au Conseil constitutionnel présenter une question prioritaire de constitutionnalité. Elles sont suspendues. C'est un sujet qui mérite débat.
Nous devons toujours regarder le point de la vue de la science, le point de vue de la médecine, les nécessités de la lutte contre cette pandémie épouvantable. Mais en même temps, nous devons nous dire que nous vivons dans notre démocratie sur un État de droit, qui comporte un certain nombre de droits fondamentaux et je suis chargé avec les tribunaux de les faire respecter. Parmi ceux-là, il y a le droit à la vie privée.
La géolocalisation des personnes testées positives est-elle envisageable en France ?
C'est une question qui se pose déjà depuis quelques jours, quand on voit que des drones sont envoyés dans le ciel pour pister les gens. Il y a dans notre pays une disposition très fortement ancrée dans notre corps juridique, c'est l'article 9 du Code civil qui protège la vie privée. Il y a au niveau de l'Union européenne, pour ce qui est du numérique, un règlement général de la protection des données qui dit qu'on ne peut pas disposer de vos données personnelles et qu'elles doivent être protégées. Dans ce texte, il y a un article qui prévoit une dérogation pour lutter contre les épidémies.
En l'occurrence, c'est véritablement un débat. Ce que le défenseur des droits réclame quand on se lance dans un état d'urgence et qu'on fait des exceptions temporaires, c'est qu'il y ait un débat et que l'on puisse discuter de ces questions. Il faut voir d'un côté ce que sont les exigences des libertés et de l'autre côté quel est le bénéfice de cette mesure de géolocalisation.
Où doit se tenir ce débat sur les libertés publiques ?
Je pense que ce débat doit avoir lieu dans le comité scientifique que le président de la République a mis en place. Il doit avoir lieu dans la communauté des médias, des juristes, des autorités morales. L'État de droit, c'est quelque chose qui nous appartient à nous et il ne faut pas le galvauder sans se poser des questions. Il faut que le Parlement soit pleinement associé. Le Parlement siège en ce moment, il y a des questions, cela veut dire qu'il existe un dialogue démocratique.
Le défenseur des droits ne peut pas prendre sur ce sujet une position autre que de rappeler les règles de droit. De l'autre côté, il faut les mettre en balance avec le bénéfice pour la santé publique et la lutte contre cette épidémie. Ce qui est remarquable, c'est de voir combien la liberté, qui est l'outil de toutes les autres libertés, c'est-à-dire la liberté d'information et d'expression, est bien respectée dans notre pays et ça c'est bien.
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