Drogues : "On est dans l'échec de la prohibition", selon un addictologue
Selon le rapport annuel de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), la consommation de cocaïne est en hausse. La faute à la prohibition qui "n'a pas servi de prévention", a analysé jeudi sur franceinfo l'addictologue William Loweinstein.
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L'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) a publié jeudi 20 décembre l'enquête annuelle sur les nouvelles tendances de consommation et les nouvelles drogues sur le marché. Il en ressort cette année une forte croissance de la consommation de cocaïne. Les gaz hilarants font aussi leur retour. Sur franceinfo, jeudi 20 décembre, l'addictologue William Loweinstein, et président de SOS Addictions, a estimé que la consommation de drogues met en lumière "l'échec de la prohibition". Elle "n'a pas servi de prévention". Selon lui, il faut "un vrai changement de philosophie" dans l'approche de la consommation en développant une "philosophie pragmatique de réduction des risques".
William Loweinstein souligne également "la banalisation" de l'utilisation des gaz hilarants.
franceinfo : La progression de l'utilisation de gaz hilarant, est-ce un phénomène nouveau ?
William Loweinstein : C'est nouveau pour la banalisation. Les phénomènes décrits l'ont déjà été au milieu du 19ème siècle avec les gaz de l'époque. La France a connu par exemple des grands consommateurs d'éther ou de chloroforme. Aujourd'hui avec cet anesthésiant, le protoxyde d'azote dit gaz hilarant, il y a la problématique de l'accessibilité, parce que c'est aussi un produit domestique et industriel. On en a beaucoup de ce type qui peuvent être des solvants volatiles qui modifient l'humeur, qui donnent une sorte d'ivresse : les colles industrielles, les vernis, les laques, les détergents, les détartrants. C'est une sorte d'ivresse, comme si c'était de tout de suite de l'alcool qui monte au cerveau. Et comme cela dure peu longtemps, 10 à 15 minutes au maximum, il y a une répétition des crises avec un risque de dépression respiratoire essentiellement et parfois de troubles cardiaques.
C'est parce que cela ne paraît pas dangereux, voire même rigolo dans la pratique, qu'il y a un risque ?
Exactement. Il faut croiser deux retards français sur les produits et substances. Le premier, c'est que l'on a toujours pensé en France que seule l'héroïne pouvait donner des overdoses. On n'a toujours pas réalisé que l'alcool donnait des overdoses, que la cocaïne donnait des overdoses et que hélas aussi le protoxyde d'azote ou gaz hilarant, s'il était consommé à répétition donnait des overdoses. Donc il y a une sorte de limitation du risque, de la perception du risque, au produit opiacé, au produit héroïne. L'autre croisement, qui est encore plus franchouillard si j'ose dire, c'est l'idée de faire la fête, qu'à partir de l'instant où on fait la fête, tout est permis. Non, pour être un bon vivant, mieux vaut être vivant.
Est-ce qu'il n'y a pas un problème de prévention et de message ? Dire que la cocaïne est dangereuse, on entend cela depuis 30 ans. Cela ne prend pas comme discours ?
On est d'abord dans l'échec de la prohibition. La prohibition n'a pas servi de prévention. Interdire n'a pas suffi. J'ai cru entendre que nous étions dans le quinquennat de la prévention en médecine, avec notre ministre de la Santé Agnès Buzyn. Il ne faut pas y oublier les addictions. Donc bien sûr, beaucoup de préventions doivent être spécifiques et doivent être adaptées. Il y a un idéal qui est, 'ne consommez pas'. Mais après on doit être capable de décliner la réduction des risques c'est à dire, si vous consommez malgré ce qu'on vous a dit, attention à ceci, attention à cela. C'est ce qu'on avait appris au temps du Sida ou pour l'héroïne. Si vous ne voulez pas attraper le Sida, ne vous droguez pas, mais si vous vous droguez, ne vous shootez pas, mais si vous vous shootez, ne partagez pas votre seringue, mais si vous partagez votre seringue, nettoyez là à l'eau de Javel. Il faudrait qu'on soit capable de décliner cela aussi bien pour l'alcool, que pour la cocaïne, que pour le protoxyde d'azote. C'est un vrai changement de philosophie. Cela s'appelle la réduction des risques. Est ce qu'on est capable en France de ne pas être simplement des idéalistes frustrés tout le temps et de développer cette philosophie pragmatique de réduction des risques.
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