"Les confusions sont fréquentes" : quatre conseils pour cueillir des champignons sans s'empoisonner

Les autorités ont constaté une hausse du nombre d'intoxications depuis juillet par rapport à l'année passée, et craignent un pic en octobre. Elles appellent à se méfier des applications censées aider à distinguer les espèces dangereuses.

Article rédigé par Camille Adaoust, Louis San
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 7min
Une personne cueille une chanterelle dans la forêt de Brotonne (Seine-Maritime), le 30 octobre 2024. (FLORA ELIE / HANS LUCAS / AFP)
Une personne cueille une chanterelle dans la forêt de Brotonne (Seine-Maritime), le 30 octobre 2024. (FLORA ELIE / HANS LUCAS / AFP)

C'est un des plaisirs de l'automne. Mais manger des champignons cueillis en forêt peut être dangereux, voire mortel. Les autorités ont relevé en 2025 une "nette" hausse des cas d'intoxications liées à cette activité, a alerté le 25 septembre l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses). Selon son décompte, environ 500 cas ont été recensés par les centres antipoison en France depuis le 1er juillet, avant même la pleine saison. L'agence insiste sur le risque posé par "la confusion d'une espèce comestible avec une espèce toxique". Franceinfo liste quatre conseils pour ramasser des champignons sans s'empoisonner, alors qu'un "un pic d'intoxications est attendu en octobre".

1 Ne ramasser que les champignons que l'on connaît parfaitement

C'est la première recommandation du ministère de la Santé. Il souligne que "certains champignons hautement toxiques ressemblent beaucoup aux espèces comestibles". Par exemple, "les confusions entre les girolles ou les chanterelles et le clitocybe de l'olivier figurent parmi les plus fréquentes pour la saison 2024", précise l'Anses. Le clitocybe de l'olivier, très toxique, pousse en touffes sur les bois morts, et en consommer peut entraîner des troubles digestifs (douleurs abdominales, nausées, vomissements, diarrhées...) parfois sévères. Les intoxications les plus graves impliquent souvent un autre champignon bien connu, l'amanite phalloïde, qui peut être prise pour une coulemelle, rappelle l'agence sanitaire. Elle peut être responsable d'hépatites, parfois mortelles. 

Cueillir des champignons "demande de la pratique" et un minimum de connaissance, souligne auprès de franceinfo Christophe de Hody, fondateur de l'entreprise Le Chemin de la nature, qui propose des ateliers sur la cueillette et distille des conseils sur les réseaux sociaux. Le meilleur moyen d'éviter les accidents reste de "se former, se former, se former", martèle-t-il. Et d'apprendre, au passage, à pratiquer une cueillette respectueuse de la nature, sans piétiner ni retourner le sol. "Les champignons reposent sur du mycélium [des filaments souterrains] très fin dans le sol. Si on le retourne, on l'abîme", alerte Christophe de Hody.

Si un doute subsiste, l'Ordre national des pharmaciens recommande de "faire contrôler sa récolte par des professionnels", en officine. Christophe de Hody relève qu'il est aussi possible de demander confirmation à des spécialistes, soit que l'on connaît directement, soit en contactant des connaisseurs présents sur des forums d'identification spécialisés ou des associations de mycologues autour de chez soi.

2 Se méfier de certains lieux de cueillette et bien choisir son panier

L'environnement dans lequel poussent les champignons a son importance. D'abord pour des raisons légales : la cueillette est autorisée dans les forêts publiques – si elle n'excède pas 5 litres par personne et par jour, rappellent les services de l'Etat –, mais nécessite l'accord du propriétaire dans une forêt privée. Mais le lieu où de la cueillette a aussi son importance pour la santé. Il ne faut pas consommer les champignons trouvés près de sites potentiellement pollués, préviennent les autorités, qui mentionnent les bords de routes, les aires industrielles et les décharges. Christophe de Hody ajoute à la liste les bords de chemins de fer, mais aussi les champs cultivés, en raison du risque de présence de pesticides.

Par ailleurs, le bon coin à champignons repéré l'année précédente ne garantit pas forcément une récolte sans risques. Il est nécessaire de bien inspecter ce qui est sorti du sol cette saison avant de remplir votre panier, car "des champignons vénéneux peuvent pousser à l'endroit où vous avez cueilli des champignons comestibles une autre année", met en garde le ministère de la Santé.

Pour la cueillette, le Muséum national d'histoire naturelle recommande de bannir les sacs plastiques pour préférer un "large panier à fond plat". Ce n'est pas une question de mode, mais de matière, de conservation et de précaution sanitaire. Gorgés d'eau, les champignons risquent de fermenter au contact du plastique et "pourraient vous rendre malade".

3 Ne pas faire confiance aux applications de reconnaissance sur smartphone

Il peut être tentant, face à un champignon inconnu, de faire confiance à une de ces applications qui promettent de les reconnaître sur la base d'une photo. Très mauvaise idée, prévient l'Anses, qui recommande de "ne pas se fier" à ces outils "en raison du risque élevé d'erreurs d'identification". "Il existe des applications, notamment sur téléphones portables, qu'il faut absolument éviter. Déterminer un champignon sur une photo est quasiment impossible", juge aussi Michel Ardillier, président de la Société mycologique du Limousin, auprès de France 3 Nouvelle-Aquitaine.

Et si l'application se trompe, les conséquences sont évidemment plus graves que si elle n'identifie pas une fleur ou une chanson. "Les centres antipoison ont pu constater que, dans certains cas, la confusion entre espèces avait été favorisée par l'utilisation" de ces applications, à l'origine d'"identifications erronées", rapporte le site officiel service-public.fr. Le fait que certaines applications jouent la transparence, et reconnaissent quand elles ne peuvent pas distinguer certaines espèces, ne règle pas entièrement le problème : "Si on ne sait pas faire la différence entre les 2-3 propositions que l'application va faire, et qu'on n'a pas les bases, c'est hyper dangereux", commentait la mycologue Aurélie Sanchez auprès de Brut.

4 Photographier ses champignons et bien les cuire avant de les consommer

Une fois identifiés, les champignons cueillis doivent être conservés au réfrigérateur (à 4°C maximum) et consommés dans les 48 heures, selon l'Ordre national des pharmaciens. La cuisson est impérative. L'organisme recommande "vingt à trente minutes à la poêle" ou "quinze minutes à l'eau bouillante".

L'Anses préconise aussi de consommer les champignons cueillis en quantité raisonnable, c'est-à-dire environ 200 grammes par adulte et par semaine. Quant aux jeunes enfants, l'agence conseille de ne "jamais" leur en proposer, évoquant un haut risque de "déshydratation et de décès en cas d'intoxication".

Une autre précaution consiste à prendre en photo les champignons avant de les cuisiner, pour pouvoir les montrer à une équipe médicale si des symptômes apparaissent. Si les photos ne sont pas infaillibles, elles peuvent aider à orienter les soignants vers l'espèce responsable et le bon antidote, explique le Comité d'éducation sanitaire et sociale de la pharmacie française.

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