Le rôle des grands-parents doit être mieux reconnu

Les grands-parents sont précieux dans l'éducation des enfants, en accompagnant ces derniers par des rythmes différents et en étant un appoint sur lequel les parents peuvent s'appuyer.

Article rédigé par Amélia Matar
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Les grands-parents établissent souvent une relation de complicité avec leurs petits-enfants. (MAXPPP)
Les grands-parents établissent souvent une relation de complicité avec leurs petits-enfants. (MAXPPP)

Les grands-parents sont plébiscités, en ces périodes de vacances scolaires, pour la garde des petits-enfants et, souvent, pour le plus grand plaisir des uns et des autres. Amélia Matar décrypte la relation entre les deux générations.

franceinfo : Les grands-parents représentent-ils désormais un mode de garde devenu essentiel ?

Amélia Matar : Oui, ils sont nombreux à répondre présent. On estime à 15 millions leur nombre en France, 40% des grands-parents garderaient leurs petits-enfants toutes les semaines, d'après l'Observatoire de la grand parentalité. C'est un soutien discret mais fondamental dans l'équilibre des familles. Et ce rôle est de mieux en mieux perçu. Près de deux parents sur trois déclarent s'inspirer de leurs proches dans leur manière d'éduquer leurs enfants. En tête, on retrouve la propre mère pour 73% des parents. Autrement dit, les grands-parents ne sont pas seulement des relais de garde, ils sont aussi des repères éducatifs, des modèles qui influencent encore la parentalité d'aujourd'hui.

Leur rôle est donc à la fois logistique et affectif ?

Exactement. Plusieurs études scientifiques commencent à mieux cerner leur impact psychologique sur les enfants. Une étude récente montre que la proximité émotionnelle entre un enfant et ses grands-parents a des effets bénéfiques très nets sur sa santé mentale. Les enfants qui ont des liens régulier et positif avec leurs grands-parents ou moins de symptômes dépressifs à l'adolescence. Et inversement. Les grands-parents qui voient souvent leurs petits-enfants peuvent se sentir plus utiles, moins isolés, ce qui agit directement sur leur propre bien être. C'est un lien gagnant, fondamental pour la santé mentale de ces deux générations.

Les grands-parents participent-ils vraiment à l'éducation, ou est-ce plutôt : chez papi mamie tout est permis ?

Souvent un peu des deux, et cela dépend des familles. Un parent sur deux considère que les grands-parents jouent un rôle important dans l'éducation de leurs enfants. Pas forcément en posant des règles strictes, mais en transmettant des valeurs, une manière d'être, une culture familiale. Les grands-parents sont jeunes et plein d'énergie. Les femmes deviennent grand-mère à 54 ans en moyenne, les hommes grand-père à 56 ans. Une jeunesse et une énergie qui peuvent être mises à profit des petits-enfants pour leur apprendre à cuisiner, à bricoler, à jardiner. Parfois, ils transmettent aussi une langue régionale ou étrangère, ou des histoires familiales. Bref, ils construisent des souvenirs et des repères. Mais oui, il y a parfois aussi un relâchement des règles, notamment pendant les vacances. C'est d'ailleurs ce qui rend ce temps chez les grands-parents si apprécié par les enfants. Un rythme différent, moins de contraintes, parfois, plus d'écoute, de patience.

Du côté des parents, est-ce que ce petit relâchement peut parfois poser des problèmes ?

Oui, cela peut être source de frictions, surtout si les règles sont contournées systématiquement. Le sujet des écrans, par exemple, revient souvent. Certains grands-parents laissent faire, d'autres interdisent tout. Et dans certains cas, il peut y avoir des désaccords plus profonds sur les méthodes éducatives, la politesse, l'alimentation. Mais ce qui est important de rappeler, c'est que les grands-parents ne remplacent pas les parents, ils apportent autre chose. Et quand il y a un dialogue entre les générations, cette diversité de points de vue peut être très enrichissante pour les enfants.

Le rôle des grands-parents est important, mais est-il est reconnu par les politiques publiques ?

En réalité, ce rôle reste encore largement informel en France, même si le Code civil protège le droit de l'enfant à entretenir des relations personnelles avec ses grands-parents. Pourtant, ce que les grands-parents apportent représente une économie souterraine colossale. Si on devait rémunérer les heures de garde, d'accompagnement, d'aide aux devoirs ou de repas préparé, ce serait probablement des milliards d'euros chaque année. Et dans une société marquée par la précarité, le manque de place en crèche et le coût des vacances, leur implication dans certaines familles permet tout simplement de tenir.

Cela signifie qu'il faudrait mieux reconnaître le rôle des grands-parents ?

Peut-être. L'INSEE rappelle que plus d'un Français sur cinq a aujourd'hui 65 ans ou plus et ce chiffre devrait atteindre près de 30% d'ici 2070. L'espérance de vie augmente, bonne nouvelle, mais elle s'accompagne aussi de nouveaux défis : perte d'autonomie, isolement, éloignement géographique des familles, etc. Si demain ces soutiens familiaux venaient à manquer, tout un équilibre pourrait vaciller. D'où l'importance de penser leur place, de reconnaître leur rôle et peut-être de créer enfin des politiques publiques à la hauteur de leur engagement. En Suède, par exemple, depuis juillet 2024 les parents peuvent transférer jusqu'à 45 jours de congé parental rémunéré aux grands-parents pour leur permettre de s'occuper des enfants. C'est une manière concrète de reconnaître que les grands-parents ne sont pas simplement des solutions de secours, mais bel et bien des acteurs essentiels du quotidien des enfants.

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