"Jane Austen a gâché ma vie" enchante la nôtre

Les experts cinéma Matteu Maestracci, Thierry Fiorile Le samedi à 6h20, 7h51, 11h50, 15h21

Parmi les sorties de la semaine, Thierry Fiorile et Matteu Maestracci ont retenu "Jane Austen a gâché ma vie" de Laura Piani et "Jouer avec le feu" de Delphine et Muriel Coulin.

Thierry Fiorile, Matteu Maestracci

Radio France

Publié le 25/01/2025 09:09

Temps de lecture : 3min

Jane Austen a gâché ma vie est en quelque sorte une comédie romantique à l'anglaise, mais en version française, et bilingue ! Un peu de douceur dans ce monde de brutes ça fait du bien.

"Jane Austen a gâché ma vie" de Laura Piani

Agathe, jeune libraire célibataire, est admiratrice de Jane Austen, la romancière anglaise du XIXe siècle, qui a secoué avec humour la littérature des sentiments amoureux. Agathe est invitée par la fondation Jane Austen, en Angleterre, pour une résidence d'écriture. Peu douée pour le bonheur, elle complique tout, doute horriblement d'elle-même et ne parvient pas à écrire la moindre ligne, dans cette vieille maison so british tenue par un vieux couple excentrique et leur fils, le bel Oliver, Charlie Anson, qui a de vrais airs de Hugh Grant jeune.

Agathe, c'est la formidable Camille Rutherford, révélée dans Felicita en 2020, vue plus récemment dans Anatomie d'une chute et Fario. Courez voir Jane Austen a gâché ma vie pour échapper – le temps d'un film – à la noirceur ambiante. C'est bien écrit, réalisé, joué, avec des personnages loufoques mais pas hors sol, c'est une rom-com qui n'a rien de neu-neu, bravo à Laura Piani qui signe un premier film plein de promesses.

"Jouer avec le feu" de Muriel et Delphine Coulin

Voici l'adaptation du roman de Laurent Petitmangin, Ce qu'il faut de nuit, paru en 2020. L'histoire de Pierre, Vincent Lindon, qui travaille de nuit comme cheminot en Lorraine, terre ouvrière ou ex-ouvrière s'il en est et qui – veuf – élève seul ses deux fils. Louis est brillant élève, sur le point d'intégrer la Sorbonne à Paris, Félix alias "Fus" l'aîné, vivote dans ses études, préfère jouer au foot, et aller se castagner avec ses potes au crâne rasé à tendance skinhead.

Des mauvaises fréquentations qui prennent de plus en plus de place dans sa vie et face auxquelles Pierre, dont les opinions sont aux antipodes, se retrouve impuissant malgré ses colères ou ses tentatives de raisonner son fils. Ce dernier va sombrer dans cette radicalité violente d'extrême droite, jusqu'à l'irréparable.

Jouer avec le feu est un peu scolaire par endroits, mais il trouve équilibre et justesse sur un sujet forcément sensible, et sa réussite tient beaucoup au trio d'acteurs : Vincent Lindon, récompensé par un prix d'interprétation à Venise, intense et à la colère rentrée, Benjamin Voisin qui mise davantage sur l'extériorité, et Stéfan Crépon dans le rôle du fils "parfait". Le travail des deux réalisatrices sur les corps – sportifs et agiles, ou blessés et meurtris – est intéressant.