"La douceur de l'ombre" d'Alain Corbin
Voici un grand livre, la somme en fait, qu'on attendait sur les arbres. Le grand Alain corbin, auquel on doit déjà une bible sur l'histoire de la prostitution, sur l'histoire de la virilité, sur les vacances, sur l'odorat au XIXe siècle, Le miasme et la jonquille.
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Cette fois-ci, il s'intéresse au sujet roi, les arbres, l'arbre, le végétal souverain, en nous offrant une promenade à travers les rapports que les hommes ont eu avec l'arbre : pourquoi ils sont admiratifs de ces grands édifices feuillus, des forêts, pourquoi ils ont en peur, aussi, en en faisant le domaine des génies, bons ou mauvais, pourquoi ils ont peint les arbres, écrit sur les arbres, bref, qu'est-ce que les hommes voient dans l'arbre ?
Un voyage dans les arbres, dans l'imaginaire lié aux arbres, qui en dit
long, donc, sur les hommes.
C'est ce que dit Alain Corbin dans une longue
interview que vous pourrez lire dans Le Point dans laquelle il déclare que
certes, il a choisi d'intituler son livre La douceur de l'ombre , mais
que nous entretenons avec lui un rapport paradoxal. Qu'il y a les branches, qui
ont toujours évoqué la montée vers le ciel, la noblesse, l'élévation, mais
qu'il y a aussi les racines, et que les racines ont une nature forcément maléfique.
Comme si quelque chose s'accomplissait dans la lenteur, le silence et
l'invisibilité, et cette vie profonde inspire de la terreur. Et tout le mérite
de Corbin, c'est de nous offrir un voyage dans toute l'ambigüité de cette
relation que nous avons à l'arbre, comme l'indique le sous titre, L'arbre, source d'émotions, de
l'Antiquité à nos jours .
C'est un livre d'histoire, mais façon Corbin : "s'étendre
sous les ombrages, s'y délasser, y méditer, s'enfouir dans le végétal, s'y
cacher, si réfugier, y grimper constituent autant de comportements répondant à
des pulsions profondes." C'est à dire qu'il se base sur des ressentis
que tout le monde peut éprouver. Et puis c'est un livre d'histoire, mais aussi
une promenade dans la littérature, où il convoque les meilleurs guides qui
soient pour nous accompagner dans cette forêt et qui nous content ce
rapport ancestral et toujours contemporain de l'homme à l'arbre : Virgile
et Péguy, Chateaubriand et Senancour, Rousseau et Yves Bonnefoy, Victor Hugo,
Dante et George Sand, ou Lamartine, qui parle aussi des arbres comme des "vieux
témoins des âges écoulés" , parce que, évidemment, ce qui a toujours
marqué l'esprit humain, qu'il soit poète ou non, quand il regarde un arbre,
c'est que l'arbre survit à l'homme, a connu d'autres époques, l'arbre nous
dépasse.
Des peintres aussi, comme Matisse, qui témoignait que dès qu'il voyait
un arbre, il pensait à une femme... Mais oui, il y a un aspect de rêverie
érotique dans la contemplation de l'arbre. Le romancier britannique D. H.
Lawrence soulignait "l'énorme convoitise des racines " , ce qu'il
perçoit comme leur "lubricité " . "J'avais
peur, écrit-il, de la ruée aveugle de leur convoitise." **
Dans
les textes religieux, il y a immédiatement un lien entre l'arbre et le diable.
C'est par l'arbre, où s'enroule le serpent, que nait dans la genèse la
tentation, le péché originel. Chateaubriand dans le génie du christianisme dit
que les arbres ont inspiré le style gothique, mais avant le christianisme,
l'arbre a joué un rôle crucial. A Athènes, jadis, lirez vous dans Le Point,
celui qui déracinait un olivier était puni de mort pour cause de sacrilège. Par
la suite, le droit s'est adouci. Un propriétaire de champs où poussaient des
oliviers avait l'obligation de les entretenir, et il lui était même interdit de
cultiver autour.
En Grèce, il faut penser aussi à toutes les nymphes qui vivent
dans les arbres, les dryades, par exemple. Il n'y a pas qu'ne Grèce, les cultes
païens se sont tous basés sur les arbres, les pères de l'Eglise vont d'ailleurs
appeler ça la "dendrolâtrie", l'idolâtrie des
arbres, avant de la récupérer, très intelligemment d'ailleurs. — comprenez : le culte païen des arbres —,
avant d'en accaparer certaines croyances. Partout où elle est plantée, la croix en bois signale la présence
de Dieu.
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