Cet article date de plus de treize ans.

Le modèle allemand est–il exportable ?

Chômage à temps partiel, TVA sociale, l’Allemagne inspire de plus en plus le gouvernement français mais le modèle est-il exportable ? Et d’abord en quoi consiste la recette allemande pour se porter comme un charme en pleine crise ?

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)
Franceinfo (Franceinfo)

Car l’Allemagne fait rêver avec sa croissance à 3 %, ses exportations qui ne cessent d’augmenter (+ 8, 2 % l’an dernier) et la moitié de sa population au travail (41 millions de personnes ont un emploi aujourd’hui).

Il faut pourtant se souvenir que ça n’a pas toujours été comme ça. Jusqu’au milieu des années 2000, l’Allemagne comptait 5 millions de chômeurs et en 2009, son économie avait gravement décroché. Face à cette dernière crise, le gouvernement conservateur et socio-démocrate de l’époque a mis en place une mesure phare du plan de relance : le Kurzarbeit, le chômage partiel dont la France veut s’inspirer aujourd’hui.

"Cela permet à un employeur de conserver ses salariés dans l’entreprise. C’est un mécanisme que nous utilisons depuis longtemps en Allemagne" , dit Stefan Hardege, chargé de l’emploi au DIHT ( le patronat allemand). Quand le travail manque, quand les carnets de commandes sont vides, l’employeur peut se tourner vers l’agence fédérale pour l’emploi. "Si par exemple le salarié divise son temps de travail par deux, la seconde moitié est prise en charge à 67% par l’Agence fédérale pour l'emploi, et certains employeurs complètent même un peu, pour que le salarié s’y retrouve" . Résultat, les compétences restent dans l’entreprise quand l’économie redémarre.

Mais ça n’est pas la seule recette que l’Allemagne a utilisée pour s’en sortir mieux que les autres. Durant les dix dernières années, elle a joué sur la modération salariale, sur des coupes draconiennes dans les dépenses sociales ; elle a réduit l’indemnisation du chômage à un an tout en augmentant les cotisations chômage.Elle aussi augmenté la TVA de 3 points d’un coup en 2007, dont un point pour renflouer les caisses sociales.

Du coup, les patrons allemands assument à 50-50 avec leurs salariés le coût des charges sociales sur les salaires, alors qu’en France on est à 70% pour le patron et 30% pour le salarié. Le coût du travail a donc baissé, la compétitivité est revenue et les entreprises sont parties à la conquête de nouveaux marchés d’exportation.

"Il y a en Allemagne, 335.000 entreprises exportatrices alors qu’elles ne sont que 95.000 en France" , précise la politologue Claire Demesmais, et cela a bien sûr un impact sur la croissance mais fragilise aussi le modèle économique quand il y a crise et  baisse de la demande mondiale.

Car les deux modèles économiques sont bien différents et ce, depuis l’après-guerre. Le modèle allemand est fondé sur l’industrie et les exportations, tandis que le modèle français repose sur les services et la consommation. Aujourd’hui le modèle allemand réussit mais ça ne veut pas dire que tout est rose en Allemagne, comme le souligne le professeur d’université Etienne François. "L’Allemagne ressemble aujourd’hui à la Grande Bretagne, il y a un renforcement des inégalités. Parmi les salariés il y a beaucoup de travailleurs pauvres et précaires et même si en France certains considèrent que l’Allemagne est un modèle, il n’est pas forcément exemplaire" .

A Berlin, Lise Jolly

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.