Sidonie Bonnec publie son premier roman, "La fille au pair", inspiré d’un fait réel : "J'ai vite compris que je devais m'enfuir"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Mercredi 26 février 2025 : la journaliste et écrivaine, Sidonie Bonnec. Elle publie son premier roman "La fille au pair", aux éditions Albin Michel.

Article rédigé par Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
L'animatrice Sidonie Bonnec, en juin 2023, à Nice. (ERIC DERVAUX / HANS LUCAS / VIA AFP)
L'animatrice Sidonie Bonnec, en juin 2023, à Nice. (ERIC DERVAUX / HANS LUCAS / VIA AFP)

Sidonie Bonnec est journaliste et animatrice. Elle coanime avec Olivier Minne depuis sept ans, le divertissement culturel et quotidien "Tout le monde a son mot à dire" sur France 2. Son nom est indissociable de la présentation des émissions "Enquêtes criminelles" et des "Maternelles" ou de la réalisation de documentaires. Aujourd'hui, elle ajoute une corde à son arc en publiant son premier roman : La fille au pair, aux éditions Albin Michel. L'histoire effrayante d'Emmylou, une lycéenne somme toute ordinaire, qui décide de fuir sa Bretagne natale en vue d'une vie meilleure. Ça se passe à Hidden Grove, en Angleterre, un lieu huppé dans une banlieue londonienne. Au début, Emmylou a l'impression d'entrer au paradis, mais le rêve devient rapidement un cauchemar éveillé, et l'angoisse, la peur, la violence psychologique vont devenir son quotidien.

franceinfo : Quand on parcourt ce livre, on se rend compte que les sentiments que vous décrivez ont été vécus.

Sidonie Bonnec : En fait, cette histoire, je l'ai vécue à 22 ans. Je voulais en effet, comme Emmylou, apprendre l'anglais et donc je suis partie en Angleterre comme fille au pair. Je travaillais, j'étais payée et ça s'est, en effet, mal passé. Le père a eu des gestes complètement déplacés, et j'ai vite compris que je devais m'enfuir. J'ai mis du temps, mais j'ai réussi à le faire et je suis restée depuis 25 ans avec cette idée en moi : et si je n'avais pas pu fuir ? J'ai été obsédée par cette idée que j'ai rangée un peu quelque part, mais comme j'avais été très armée par mes parents, j'ai eu la force d'inventer un mensonge et de m'enfuir.

Vous dédicacez ce livre à une personne qui est importante pour vous et vous marquez "aux pourris". C'est aussi une façon de leur dire : "malgré tout, je suis restée debout et plus forte" ?

Oui, bien sûr. J'écris sur le mal, pas parce que je jouis des souffrances. J'aime épingler le mal, l'étudier et dire : "Tu vois, j'ai vu ce que tu fais - je vois et je comprends - et je vais l'expliquer, comme ça, plus personne ne tombera dans ton piège ou dans ce piège". C'est une lecture qui fait du bien.

Est-ce que ça soulage ? Est-ce que ça repousse un peu les fantômes ?

Alors franchement, je n'ai jamais été aussi heureuse.

"Depuis l’écriture de ce livre, je me sens beaucoup plus équilibrée et je pense que j'ai libéré quelque chose qui devait l'être."

Sidonie Bonnec

à franceinfo

J'ai libéré une deuxième chose, c’est que depuis que je suis petite, j'écris beaucoup de nouvelles, des poèmes, des chansons, des tas de choses. Là, je me suis accordée du temps pour écrire cette histoire et ça y est, il y en a d'autres qui tapent la porte de mon cerveau.

Emmylou a des rêves d'adolescente rebelle et vous avez aussi ce côté-là. À quoi rêviez-vous enfant ? Votre père a été footballeur, puis entraîneur, et votre mère vous a toujours accompagnée. Que vous ont-ils transmis, notamment dans les rêves ?

Alors mes parents m'ont toujours dit : "Réalise tes rêves". Je voulais être journaliste et beaucoup de gens me disaient : "C'est bouché le journalisme". J'entendais ça et moi, je voulais faire d'abord de la radio.

"J'avais vu que mon père était devenu joueur de foot à 11 ans et qu'il avait réalisé ses rêves. Et il m'a dit : 'réalise tes rêves, j'ai confiance en toi'."

Sidonie Bonnec

à franceinfo

Mes parents m'ont donné cette liberté de me construire et de pouvoir changer si je veux, de me faire confiance : "Tu as un instinct, écoute-le". Ce sont de petites choses qu'il faut donner à ses enfants. C'est ce que j'appelle une sorte de cadre, et d'ailleurs, dans les remerciements, je dis qu'ils m'ont gorgée d'amour et de confiance et je trouve que c'est la plus belle chose qu'on puisse offrir à son enfant. Emmylou, dans La fille au pair, n'a pas forcément eu cette chance d'être aimée et d'être poussée comme ça, donc elle va devoir s'en sortir d'une autre manière.

Le point de départ, c'est quand même cette envie de liberté, d'être libre et indépendante. Est-ce que c'est votre quête ?

Vous me dites le mot "liberté" : j'en tremble, parce que c'est le mot qui m'obsède. Depuis toute petite, je ne supporte pas l'enfermement. Pourtant, j'ai la chance de vivre dans une démocratie, un pays libre, d'être une femme libre. Mais j'ai toujours peur de l'enfermement que j'ai connu avec cette expérience de fille au pair où je me suis dit que ce n'est pas possible, je ne peux pas, c'était le rêve de ma vie, les portes ne s'ouvrent pas, je n'ai pas d'argent, comment je sors de là ? Comment c'est possible que je sois tombée là-dedans alors que j'étais une petite Bretonne tranquille ? D'accord, je m'ennuyais, mais pourquoi je suis partie de chez moi ? Pourquoi j'ai cru qu'ailleurs, c'était forcément plus beau ?

Ce sourire que vous arborez, qui fait vraiment partie de vous, est encore plus puissant parce que vous avez vécu des événements comme celui-ci ? Ce sourire paraît indestructible.

C'est une force, c'est vrai. Un sourire même les jours où ça ne va pas très bien, car il y a des jours où je ne vais pas très bien, rassurez-vous, je sais que, si je pose ce sourire, il va déclencher quelque chose de chouette. Dans les transports en commun, au travail, avec ma famille. En fait, même si vous allez acheter votre pain et que vous vous forcez à sourire alors que ça ne va vraiment pas très bien, le sourire qu'on vous renvoie, est tellement bon. C'est aussi un respect pour la vie. J'ai de la chance, je vais bien, je m'en suis toujours sortie et je continuerai et j'aiderais les autres à s'en sortir. Ça peut paraître un peu naïf, mais non, ça ne l'est pas, on en a besoin !

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