Lucas Fox, fondateur de Motörhead, replonge dans ses souvenirs : "La provocation était ancrée au son du groupe"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Jeudi 24 avril 2025 : le batteur et fondateur du groupe Motörhead Lucas Fox. Il publie une autobiographie, "Motörhead in and out : entre autres histoires d'une vie exubérante", aux éditions Hors Collection.

Article rédigé par Elodie Suigo, Étienne Presumey
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Lemmy Kilmister (à gauche) et Lucas Fox (à droite), fondateurs de Motörhead à Londres en juin 1975. (IAN DICKSON / REDFERNS / VIA GETTY)
Lemmy Kilmister (à gauche) et Lucas Fox (à droite), fondateurs de Motörhead à Londres en juin 1975. (IAN DICKSON / REDFERNS / VIA GETTY)

Lucas Fox est le batteur originel et le co-fondateur du groupe britannique de Heavy metal, devenu culte, Motörhead. Pour avoir un ordre d'idée de ce que représente le groupe dans l'histoire de la musique, il suffit d'écouter Metallica et Iron Maiden les classer comme influences indépassables. Lucas Fox avait 22 ans quand il a créé Motorhead, et 23 ans quand il l'a quitté, mais ce groupe et la rencontre avec Lemmy Kilmister, un soir plus que bien arrosé dans un petit club de Londres, est gravé au plus profond de sa mémoire. Ce 24 avril, il publie Motörhead in and out : Entre autres histoires d'une vie exubérante, chez Hors Collection.

franceinfo : Vous nous plongez au cœur du Swinging London, un endroit libre où toutes les substances illicites ont été sans doute consommées. Alors ce n'est pas une ode aux drogues, loin s'en faut, mais une ode à la vie, cette autobiographie.

Lucas Fox : Pour moi, ça a commencé à l'âge de neuf ans. D'ailleurs, je raconte rarement pourquoi la batterie. J'étais très malade comme enfant, donc on me casait dans la cuisine parce que c'était le seul endroit qui était vraiment chauffé. Il y avait un piano et je tapais sur les touches sans aucune éducation, j'adorais ça. Ma grand-mère voit ça et tout de suite me dit : "Tu vas apprendre le solfège !" Ça me déplaisait beaucoup donc j'ai pris des baguettes et j'ai commencé à taper sur les casseroles et les poêles. Tout ce qui était à la cuisine devenait un champ de jeu.

Vous démarrez ce livre avec un souvenir d'un concert qui a eu lieu au Zénith de Paris, le 18 novembre 2014. Vous n'étiez pas sur scène, mais invité par Lemmy Kilmister. Vous citez cette phrase lancée par Lemmy à chaque début de concert depuis le 28 mai 1975. "We are Motörhead and we play rock'n'roll". Qu'est-ce qu'elle signifie pour vous cette phrase ?

La première fois que ça a été dit, c'était au Carlton Pub et ça faisait 16 jours depuis qu'il s'était fait virer de chez Hawkwind. J'ai un coup de fil, comme d'hab, où il me dit rendez-vous au Carlton. J'arrive, il allume comme souvent avec son Zippo deux clopes, il m'en passe une et à travers un nuage de fumée, il dit : "We are Motörhead, we're gonna play rock'n'roll !" C'est la première fois qu'il l'a dit et à quasiment tous les concerts après, il l'a dit comme ouverture.

Votre histoire, c'est un peu un conte de fées quand même. Du jour au lendemain, dans votre classe, vous vous rendez compte que vous avez un ami dont le père est producteur, qui produit le deuxième film des Beatles, Help, et qui vous invite sur le tournage. Vous passez une journée entière avec les Beatles. Quand on remonte un peu plus, il y a ce besoin d'avoir cette batterie. Vos parents finissent par céder et ils vous offrent une caisse claire. Mais votre père vous dit : "Voilà, si tu veux le reste de la batterie, c'est à toi de te battre".

Mon père était super dur parce qu'il était né dans la dèche. Ma mère était du genre aristo sans un rond, mais vraiment sans. Elle était fille de missionnaires, devenue agent secret, mais on n'avait pas d'argent.

"Comme tous les mômes, on suppose que ce qui nous entoure, c'est complètement normal. On voyait The Who dans la rue ou les Stones."

Lucas Fox

à franceinfo

D'ailleurs, ma mère, elle adorait Bill Wyman. Elle est dans la rue, elle rencontre Jagger, Wyman, et Watts et dans sa confusion, elle demande, "Vous êtes les Beatles, c'est ça ?" Et au moment où s'est sorti de sa bouche elle est devenue écarlate et ils ont répondu : "Non Madame, nous sommes les Stones".

Au départ, le groupe naît, vous jouez et vous décidez d'enregistrer avec un son très autodestructeur. C'était une façon aussi de montrer que vous étiez contre une forme de système ?

Complètement. Déjà, Lemmy, si on regarde son histoire, on a Rockin' Vickers avec des cols de prêtre, donc provocation de l'époque. Après ça, il était roadie de Hendrix. Jimmy Hendrix était outrageux parce que son jeu sur scène était tellement sexuel, complètement différent et on est en plein acide et tout ça. Après ça, il était dans Hawkwind, qui était complètement anti-establishment, toujours en contre-courant et toujours quelque part contre ce côté figé, typiquement britannique. C'était ça qui était inévitablement ancré au son de Motörhead, la provocation.

Ce duo était basé aussi sur ce qu'on appelait la défonce. Vous étiez sous amphétamines en permanence, vous auriez pu y laisser votre peau. Quand Lemmy vous a viré, est-ce qu'il ne vous a pas un peu sauvé la vie ?

On peut dire ça et inversement, il aurait pu sauver ma vie plus tôt. Pour lui, dormir, c'était un gâchis de temps, donc il voulait que tout le monde autour de lui reste des jours, voire des nuits entières debout à lui faire la fête.

"À l'époque, on buvait tout le temps, tout le monde fumait, donc quelque part, c'était une continuation de ça avec de l'acide, du shit, de l'herbe et des amphétamines."

Lucas Fox

à franceinfo

Vous êtes un peu un survivant, même Lemmy y a laissé sa peau, il est parti d'un cancer foudroyant.

J'ai arrêté tôt, j'ai quasiment arrêté tout à 22 ans. Maintenant, je bois comme une nonne, un joint de temps en temps, mais je suis trop passionné par la vie. "I love my life !" (j'adore ma vie).

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