:
Reportage
"J'espère que l'arrivée du train va redynamiser la ville" : en Haute-Garonne, la ligne TER Montréjeau-Luchon reprend du service
Les 36 kilomètres de voies ferroviaires qui mènent jusqu'à la ville thermale nichée au fond d'une vallée des Pyrénées ont été fermés pendant plus de dix ans à cause d'inondations.
/2023/07/07/64a7df4c5fe71_placeholder-36b69ec8.png)
/2025/06/21/ter-6856b637644ae905214853.jpg)
Depuis novembre 2014, la ville de Bagnères-de-Luchon, station thermale et station de ski surnommée "Luchon" en Haute-Garonne, était privée de train. La seule ligne ferroviaire existante qui reliait Montréjeau à Luchon avait été fermée après des inondations qui avaient aggravé l'état des infrastructures. Depuis dimanche 22 juin, la ligne fonctionne à nouveau, exploitée par la SNCF. Elle est financée par la région Occitanie, qui en devient propriétaire gestionnaire, ce qui est inédit.
Cela fait plus de dix ans que la célèbre annonce "Mesdames, Messieurs, la région Occitanie, SNCF et son personnel de bord vous souhaite la bienvenue à bord du TER 'Lio' à destination de Luchon" n'avait pas résonné.
Parmi les passagers, Amélie, vacancière venue de Paris, a été invitée à monter à bord. "On allait prendre un autocar, mais on avait deux heures et demie de correspondance avant de voir cet autocar qui, lui-même, met une heure. Le train, je crois qu'il met 30 minutes entre Montréjeau et Luchon, dit-elle, étonnée mais ravie. Donc, vraiment, c'est un énorme gain de temps. En plus, je suis malade dans les bus et pas dans les trains, donc ça m'arrange beaucoup."
Vers des trains à hydrogène
Depuis la cabine du conducteur défilent la montagne, une rivière, des ponts, des tunnels... et 25 passages à niveaux, autour desquels il faut être vigilant. Après la fermeture, la voie est restée à l'abandon, il a donc fallu tout refaire. "C'est 67 millions d'euros de travaux pour reconstruire 36 km de voies à neuf", explique Matthieu Schwebel, le directeur technique du projet.
Le train longe la rivière qui a débordé en 2013. Là aussi, il a fallu sécuriser : "Une grande partie des travaux a consisté à se prémunir de ces fameux risques naturels. On est là dans la vallée étroite de la Pique, en arrivant à Luchon, avec beaucoup de risques naturels liés à la chute de blocs, de rochers. Donc, on a sécurisé beaucoup de falaises", ajoute Matthieu Schwebel.
Une centaine de cheminots vont assurer les six allers-retours quotidiens. Parmi eux, Ulrich Louche, enfant du pays, discute avec Xavier Vovilier, le formateur des conducteurs. "Savoir qu'on investit dans le ferroviaire, ça prouve que c'est encore un moyen de transport d'avenir et propre", dit le premier. "De plus en plus propre, renchérit le second.
"On progresse de plus en plus et on fera encore mieux plus tard."
Xavier Vovilier, formateur de conducteursà franceinfo
L'objectif de la région Occitanie est de faire rouler des trains bio, à hydrogène, sur cette ligne. Ce serait une première. La région a commandé trois rames aux groupes Alstom et CAF pour 52 millions d'euros, avec l'appui de l'Ademe, l'Agence de la transition écologique, et de l'État. Mais tout ne se passe pas comme prévu.
"Au niveau de la recherche, il y a un peu de retard, reconnaît la présidente PS de la région Occitanie, Carole Delga, puisque l'autonomie des trains à hydrogène est un peu inférieure à l'objectif fixé par Alstom. En fait, il y a un an de retard, on devait les avoir en fin d'année [2025] et j'ai vu le patron d'Alstom France : fin d'année 2026, c'est bon." Une station d’approvisionnement en hydrogène financée par la région doit être installée près de la gare de Luchon. Pour l'instant, ce sont des trains hybrides qui roulent, alimentés par du biocarburant.
/2025/06/21/gare-6856bc230892c204549292.jpg)
Attirer du monde à Luchon
À l'arrivée à Luchon, ville thermale, la plupart des habitants ainsi que les touristes pensent du bien du retour de la ligne ferroviaire. "Une bonne nouvelle, affirme Jocelyne, une habituée des cures tout juste arrivée de Paris , ça va nous permettre d'arriver jusqu'à Luchon sans être obligé de faire tout un dédale de transport et d'arriver un petit peu fatigué." Myriam Roullot, la directrice des thermes de Luchon, eux aussi fraîchement rénovés, explique qu'elle met en place un "balnéo-rail" : l'achat d'un billet permet d'obtenir un accès aux bassins d'eau thermale pendant deux heures. Elle espère ainsi attirer un nouveau public.
"La génération jeune est très très demandeuse du transport en commun, donc on a l'espoir d'attirer aussi des familles."
Myriam Roullot, directrice des thermes de Luchon
Les thermes sont une institution à Luchon, mais que pensent les autres commerçants de ce retour du train ? "Moi, je l'ai connu étant petite quand mes grands-parents habitaient ici et c'était une très bonne chose, se rappelle Nelly, vendeuse en boulangerie. Elle a promis à son fils "qui adore les trains" qu'ils feraient le trajet Toulouse-Luchon ensemble "début juillet je pense". L'aller coûte au minimum 19,50 euros et le retour 22,50 euros. "C'est raisonnable", selon Nelly.
Christophe Deschamps, propriétaire de chambre d'hôtes, trouve le retour du train "formidable". Ses clients lui en parlent avant de réserver, "et s'ils ne demandent pas, je le dis de toute façon. J'ai des clients qui, aujourd'hui, viennent en voiture de Toulouse, qui, la prochaine fois, ne prendront pas leur voiture, et viendront en train." Mélissa, restauratrice, est, elle aussi, optimiste : "Vu que les thermes ont été rénovés et qu'il y a de nouveau maintenant le téléphérique, comme on parle du casino, j'espère vraiment que l'arrivée du train à Luchon va nous redynamiser la ville."
"On est tous, en fait, liés les uns aux autres ici. Donc, si les hôtels sont pleins, du coup les restaurants sont pleins, les boutiques pourront marcher, elles feront marcher l'artisanat."
Christophe Deschamps, propriétaire de chambres d'hôtes
Il reste la question du dernier kilomètre, pour aller de la gare de Luchon au centre-ville. La mairie va mettre en place, avec la communauté de communes et la région, des navettes à deux euros. Pour le maire Eric Azémar, le train "fait partie du renouveau de Luchon", et il liste les attraits de sa commune : "Retrouver un casino qui arrive, une maison de santé, une télécabine qui marche, un train qui revient, une station thermale, une station de bien-être... On a un golf, un aérodrome, une station de ski, on a 1 000 kilomètres de chemin de randonnée, de VTT... Et le 19 juillet, on a le Tour de France qui revient."
Christelle, qui travaille dans une agence immobilière, s'inquiète pour l'avenir de cette ligne, si elle n'est pas assez fréquentée : "Quand j'étais jeune, je le prenais et, parfois, j'étais toute seule le matin. C'était il y a 40 ans, mais bon..." Carole Delga assure que la rentabilité n'est pas une question : "C'est un service public. La rentabilité s'apprécie à l'aune de l'impact environnemental. Il faut voir qu'un billet de train est toujours largement subventionné – sinon, ça serait inaccessible pour les usagers, pour les voyageurs. C'est un outil de déplacement du quotidien, et je ne souhaite pas que les mobilités décarbonées soient réservées juste aux urbains". La région Occitanie espère 60 000 voyageurs par an en 2030.
Avec le slogan "Petites lignes, grande cause", la présidente de Régions de France a lancé la semaine dernière un appel à la mobilisation pour sauver 4 000 lignes en manque de financement, en proposant de transférer vers le rail une part des recettes des autoroutes.
À regarder
-
Décès d'une femme : les ratés du Samu ?
-
Louvre : cambriolages en série
-
Grues effondrées : tornade meurtrière dans le Val d'Oise
-
De nombreux sites paralysés à cause d'une panne d'Amazon
-
Hong Kong : un avion cargo quitte la piste
-
Quand Red Bull fait sa pub dans les amphis
-
Ces agriculteurs américains qui paient au prix fort la politique de Trump
-
ChatGPT, nouveau supermarché ?
-
Eléphants : des safaris de plus en plus risqués
-
Concours de vitesse : à 293 km/h sur le périphérique
-
Églises cambriolées : que deviennent les objets volés ?
-
Quel était le système de sécurité au Louvre ?
-
La Cour des comptes révèle les failles de sécurité du musée du Louvre
-
Cambriolage du Louvre : ces autres musées volés
-
Cambriolage au Louvre : l'émotion et la colère de Stéphane Bern
-
Famille royale : Andrew, le prince déchu
-
Promeneurs, joggeurs : la peur des chiens
-
Vol des bijoux au Louvre : sept minutes pour un casse spectaculaire
-
Au cœur de la traque des migrants
-
Mouvement "No Kings" aux États-Unis : sept millions d'Américains sont descendus dans les rues contre Donald Trump
-
Allocations familiales : vers un coup de rabot ?
-
Un braquage a eu lieu au Louvre dimanche matin à l'ouverture
-
Avions : quand des batteries prennent feu
-
Affaire Epstein : le prince Andrew renonce à son titre royal
-
Grandir à tout prix
-
Cédric Jubillar : 30 ans de prison pour meurtre
-
Mal de dos : comment le soigner
-
Faire des têtes au foot, c'est stylé, mais...
-
En Chine, le plus haut pont du monde est devenu une attraction touristique
-
Quand t’es collé en forêt
Commentaires
Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.
Déjà un compte ? Se connecter