François Bayrou parie sur la confiance au sein de son gouvernement de poids lourds

Si le Matignon d'aujourd'hui était une entreprise, ce serait une start-up, ce qui va plaire à Emmanuel Macron. Comme dans une start-up, on se tutoie, la hiérarchie n'a pas trop de sens, on feint de se faire confiance. Une start-up d'autoentrepreneurs, également vieux routiers de la politique : des ministres qui, avec François Bayrou, nommé le 13 décembre 2024  ont la liberté de dire ce qu'ils pensent, puisque le nouveau Premier ministre a décidé - et c'est assez rare pour être souligné - de ne pas relire leurs interviews avant publication dans la presse. Il les reçoit également sans aucun conseiller à ses côtés, preuve pour certains d'une forme d'horizontalité.

Contrairement à Michel Barnier, et à d'autres Premiers ministres avant lui, qui en ont relu, modifié, corrigé des interviews... Là, c'est carte blanche, à en croire différents ministres, qui se sentent également libres d'aller faire des annonces sur le terrain. "Il y a un accord tacite avec eux, explique à franceinfo un proche de François Bayrou, la consigne qui est passée c'est qu'ils doivent préciser quand ils parlent en leur nom, ou quand ils parlent en celui du gouvernement."

Une preuve de confiance, d'après les principaux concernés

Les ministres ont la sensation d'avoir du champ. "Je pense que François Bayrou a une personnalité qui l'incline à plutôt laisser aller, presque corollaire avec la nature des figures qu'il a choisies dans son gouvernement, Élisabeth Borne, Manuel Valls... Des gens qui ont occupé les responsabilités qu'il exerce aujourd'hui", explique une ministre. À un autre, le chef du gouvernement a soufflé : "Si on a besoin de me faire relire une interview, c'est que la personne n'a rien à faire au gouvernement". Le patron du MoDem s'est en effet entouré de poids lourds de la politique, gouvernement qu'il a théorisé il y a plus d'une décennie, insiste une source qui le connaît bien.

Un gouvernement de taille qui lui sert de "parfait paratonnerre", appuie auprès de franceinfo un proche d'Emmanuel Macron. Ses ministres sont très identifiés par les Français, ils prendront les coups à sa place, pense cette source. Pratique pour protéger ses ambitions. Mais il y a des risques, admet l'entourage de François Bayrou : "il y a de sacrées personnalités, il va falloir faire attention". "Ça va finir par péter", pronostique même un député macroniste. D'après lui quand "Matignon est trop faible, ça part en cacahuète".

La cacophonie, des ministres qui s'expriment dans tous les sens... et qui nuisent au chef du gouvernement. C'est ce qu'a vécu Michel Barnier. Comme quoi le "flicage", du moins la relecture des interviews, ou certaines circulaires pour édicter une ligne de conduite, n'auront rien empêché. Le naturel revient vite dans un gouvernement qui compte autant d'horizons politiques différents.