Non, un traumatisme subi par un ancêtre ne peut pas être la cause de nos maladies actuelles

Il suffit d'aller sur internet pour trouver en deux ou trois clics des vidéos de pseudo-thérapeutes. Comme cette femme prétendant savoir d'où vient l'endométriose, une maladie dont souffrent deux millions de femmes en France, et dont la science ne sait pas encore expliquer les mécanismes. "Pour moi, la maladie n'est pas due à la 'faute à pas de chance'", explique-t-elle en souriant. Elle peut venir d'autres vies et du transgénérationnel également. C'est-à-dire que je porte des traumas pour mes lignées. Et en l'occurrence, dans le cas de maladies gynécologiques, pour des lignées de femmes".

Décryptons ce qui peut sembler du charabia : cette dame explique que si vous avez de l'endométriose aujourd'hui, c'est parce qu'une de vos ancêtres (femme) a subi il y a des dizaines ou des centaines d'années un traumatisme, à savoir un viol, une fausse couche ou un avortement. Et ce traumatisme se serait répercuté, aurait sauté plusieurs générations. Et pas de chance, cela tombe sur vous aujourd'hui ! C'est séduisant, mais impossible, contredit la science. En effet, comme cette pseudo-thérapeute, beaucoup "picorent" dans une science complexe, l'épigénétique, qui étudie les changements de l'activité des gènes.

Impossible à cause de l'effacement épigénétique

"Ces charlatans supposent qu'un traumatisme, donc quelque chose de psychique, passerait du cerveau de la mère à ses cellules reproductrices, aux ovocytes. Et ensuite à l'embryon, son futur enfant. C'est improbable, démontre Christophe de la Roche Saint-André, chercheur en biologie au CNRS à Marseille. La science a montré qu'au moment de la création de l'ovocyte puis de l'embryon, il se produit à chaque fois un effacement épigénétique, une sorte de reprogrammation quasi complète". Pas obtus, il termine sa démonstration ainsi : "Admettons quand même que cela se produise (je ne sais pas par quel miracle), et allons au bout de la logique. Si vous prenez une femme qui souffre d'endométriose à cause d'une arrière-grand-mère qui lui aurait soi-disant transmis son trauma sous forme de maladie, cela fait quatre générations, donc 14 ancêtres pour cette femme. Pourquoi l'endométriose serait-elle précisément la conséquence de la fausse couche de cette arrière-grand-mère, et pas d'un traumatisme vécu par un des 13 autres ancêtres, et des hommes par exemple ? Tout cela ne tient pas la route."

Il existe aussi la version "homme" de ces théories. Il y a quelques années, des pseudo-thérapeutes expliquaient qu'un homme avait développé un cancer des testicules parce que son ancêtre avait reçu un coup de pied de chameau dans les parties intimes... Bref, face à la science, la vraie, ces théories s'écroulent.

Fuyez les théories simplistes

Christophe de la Roche Saint-André, également membre de l'Association française pour l'information scientifique (Afis), prévient, de même qu'Edith Heard, médaille d'or du CNRS en 2024 et spécialiste de l'épigénétique : "Beaucoup de fausses informations circulent". Il faut fuir ces idées séduisantes et faciles à comprendre, enrobées d'un vernis scientifique. Car ces charlatans sur internet qui prétendent avoir trouvé des remèdes miracles pour toutes les maladies vont surtout vider votre compte en banque. Malheureusement, dans le cas de l'endométriose, il faut s'y résoudre : la science n'en saisit pas encore les mécanismes et ne sait pas guérir cette maladie.

Dès lors, comment faire la différence, et aller chercher l'information scientifique au bon endroit ? Sur internet, on trouve en effet tout, et surtout n'importe quoi. Le réflexe doit être d'aller sur les sites des grands organismes scientifiques. Celui de l'Inserm comporte, par exemple, des dossiers sur de nombreuses maladies très complets et qui font le point sur l'état des connaissances scientifiques. L'Association française pour l'information scientifique (Afis) réalise également un important travail pour lutter contre les fausses informations scientifiques. Et généralement, vous trouvez une information fiable sur les sites des associations de patients : pour l'endométriose, Endomind et EndoFrance. Pour le Fibrome, Fibrome info France ou encore pour Alzheimer, la Fondation Recherche Alzheimer. En résumé, retenez qu'il n'existe pas de médicaments miracles cachés et fuyez les théories simplistes.