Polémique Chine- Ukraine : qui est Lu Shaye, l’ambassadeur chinois décomplexé qui conteste la souveraineté des pays d’ex-URSS ?
L’intrus de l’actu donne chaque soir un coup de projecteur sur une personnalité qui aurait pu passer sous les radars de l’actualité.
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C’était sur LCI vendredi 21 avril. L’ambassadeur chinois en France était invité pour commenter les propos d’Emmanuel Macron sur Taïwan. Mais c’est sur l’Ukraine qu’il a créé le plus de remous. Il a commencé par reprendre le discours de Vladimir Poutine sur le fait que la Crimée appartient historiquement à la Russie. À la limite, cela était presque attendu. Mais Lu Shaye est allé jusqu’à contester la souveraineté de tous les États issus de l’ex-URSS - l’Ukraine mais aussi l’Arménie, la Géorgie ou encore les trois pays baltes. "Ces pays, ex-Union soviétique, n'ont pas le statut effectif dans le droit international, parce qu'il n'y a pas d'accords inernationaux pour concrétiser leur statut d'un pays souverain, assure l'ambassadeur chinois en France. Il ne faut pas encore chicaner sur ce genres de problèmes. Le plus urgent est de réaliser le cessez le feu."
Darius Rochebin, qui l’interviewe ce jour-là sur LCI, relève le mot "chicaner" sur la Crimée, soulignant que si on amputait une partie de la Chine, il n’accepterait sans doute pas qu’on dise "on chicane". S’ensuit un silence assez marquant de plusieurs secondes : l’ambassadeur attrape son verre, prend le temps d’une gorgée d’eau et finit par expliquer que ce sont des sujets "pas si simples à évoquer en quelques mots" et qu’il faut connaître "les tenants et les aboutissants". On n’en saura pas plus.
La diplomatie des "loups combattants"
Tous les pays concernés ont protesté mais aussi la France et l’Europe. Beaucoup se sont demandé si c’était un dérapage incontrôlé ou volontaire. En réalité, cet ambassadeur a la réputation d’être un dur. Les chinois eux-mêmes parlent d’une diplomatie de "loups combattants" avec ce discours décomplexé contre tous ceux qui critiquent la Chine sur la scène internationale.
Lu Shaye a 58 ans. Il a un fils qui travaille dans l’aviation en Chine. Il est lui-même un enfant de la classe moyenne chinoise avec des parents médecins. Il est né en 1964, juste avant la révolution culturelle qui est terminée lorsqu’il arrive au collège. Son père fait tout de même un séjour en prison pendant cette période mais il n’en nourrit pas particulièrement de rancœur. En tout cas, cela ne l’empêche pas d’entrer dans la ligue de la jeunesse communiste. Son parcours, il le doit sans doute à ses instituteurs qui, un peu par hasard, l’envoient faire du français au collège des langues étrangères de Nankin. Il se passionne pour la littérature. Après le bac, le Gaokao, il n'est pas pris en littérature européenne à Pékin, mais à l’institut de diplomatie où les cours sur la colonisation et les indépendances vont visiblement le marquer, ce qui explique en partie ces critiques contre l'occident colonisateur et moralisateur.
Comme il parle français, il est envoyé très vite en Afrique. Il obtient son premier poste à 25 ans en Guinée à la fin des années 80 : c’est l’époque de Tiananmen. il visite des dizaines de Pays, il aura même des fonctions à Paris, au début des années 2000, avant son premier vrai poste d’ambassadeur, au Sénégal, en 2006. Globalement il a d'ailleurs beaucoup travaillé sur les relations Chine/Afrique.
Un habitué des déclarations polémiques
Lu Shaye est assez coutumier des sorties fracassantes comme celle de ce week-end sur les anciennes républiques soviétiques. Début 2019, il est ambassadeur à Ottawa, lorsque la directrice financière de Huawei est arrêtée au Canada. Le géant chinois des télécoms est soupçonné d’exporter des produits américains vers l’Iran en violation des sanctions décidées par Washington. Et l’ambassadeur publie une tribune où il hurle à "l’égoïsme occidental" et au "suprémacisme blanc".
Peu après son arrivée en France en juillet 2019, Lu Shaye est convoqué au quai d'orsay dès le début de la crise Covid pour avoir écrit dans le journal de l'ambassade que les soignants des Ehpad avaient laissé "mourir leurs pensionnaires de faim et de maladie". En mars 2021, il se déchaine contre le chercheur Antoine Bondaz, qui critique la Chine au sujet de Taïwan : il le traite de "petite frappe", de "hyène folle" et de "troll idéologique."
Lundi 24 avril dans l' après-midi, il avait un rendez-vous calé de longue date au Quai d'Orsay avec le directeur de cabinet de la ministre Catherine Colona, qui dit avoir "pris bonne note des clarifications de Pékin" sur le fait que "Lu Shaye s'était exprimé à titre personnel..." On notera toutefois que Lu Shaye est loin d'être lâché par tous à Pékin, puisque dans le même temps l'éditorialiste du Global Times, un tabloïd qui a la bénédiction du régime, écrit par exemple que la France serait bien inspirée de protéger la "liberté d'expression" de cet ambassadeur.
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