Agences de notation : "Finalement, la dette française est assez sûre", selon l’économiste Anne-Sophie Alsif
Six mois après la rétrogradation de la note de la France par Fitch, c'est Moody's qui rend son verdict. Anne-Sophie Alsif, chef économiste au cabinet BDO France et professeur d'économie à la Sorbonne est l'invité éco de franceinfo vendredi 20 octobre.
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Face à la crise politique et sociale du pays, l'agence Fitch avait déjà baissé la note de la France à "AA-" en avril 2023. Un mois après la sanction, le pire a été évité : l'agence S&P Global a décidé de maintenir la sienne à "AA". Le gouvernement français s’était beaucoup activé pour convaincre du sérieux de ses démarches budgétaires. Vendredi 20 octobre, c'est au tour de Moody's de rendre son verdict, alors que le gouvernement a fait adopter il y a deux jours, sans vote, la première partie du projet de budget 2024.
Pour en discuter, franceinfo reçoit Anne-Sophie Alsif, chef économiste au cabinet BDO France, professeur d'économie à la Sorbonne et spécialiste des prévisions économiques.
franceinfo : De quoi dépend la note française ? Qu'est-ce qui peut faire qu'elle baisse ou non ?
Anne-Sophie Alsif : C'est toujours le niveau d'endettement. C'est vraiment le point que regardent beaucoup les agences de notation. Elles cherchent à déterminer quel est le niveau de notre dette, qui ces dernières années, a énormément augmenté. Et quelle est également notre trajectoire ? Est-ce qu'on a une trajectoire de désendettement solide concernant notre dette publique, mais également notre déficit public ?
Là, notre dette a franchi la barre des 3 000 milliards. Qu'est-ce que ça signifie ? Est-ce qu'on peut en faire une prévision ?
C'est sûr qu'on peut se dire que les perspectives sont assez négatives, comme l'ont montré déjà les autres agences, à cause notamment de ce taux d'endettement. Il a énormément augmenté depuis la crise Covid, mais aussi après, avec la crise ukrainienne et l'inflation. Donc c'est vrai qu'on va sûrement avoir une vision négative. En revanche, ce qui peut être aussi intéressant, ce sont les perspectives : quelle est la trajectoire de désendettement et comment l'agence l'apprécie au regard, par exemple, du dernier programme projet de loi de finances.
Alors qu'est-ce qu'elles en pensent les agences de ce budget ?
Bien évidemment, souvent, elles trouvent que les prévisions sont assez optimistes, par exemple sur le taux de chômage. C'est le jeu que les perspectives soient plutôt positives. Par contre, ce qu'on peut voir à moyen et long terme, une fois qu'on a fait ces perspectives, c'est sur la trajectoire des finances publiques, des dépenses et des recettes. C'est là, en fait, où ça peut être compliqué. La méthode du gouvernement, c'est de conserver la croissance coûte que coûte. Ça, c'est plutôt une bonne nouvelle, parce que, par exemple, on s'attend cette année à avoir une croissance de 0,8 à 0,9 % en France. C'est l'un des taux de croissance les plus élevés de la zone Euro. Et parce qu'on aura de la croissance économique, on n'est pas en récession comme, par exemple, l'Allemagne. On aura des recettes et grâce à ces recettes, on va se désendetter. C'est ça le pari qui est fait. On mise tout sur la croissance, même si on doit faire de la politique d'échec en creusant la dette et les déficits, pour garder la croissance économique et se désendetter.
Et si notre note n'est pas très bonne, quel impact aura-t-elle sur la charge de notre dette et sur notre capacité à emprunter ?
C'est sûr que c'est toujours négatif, puisque ça peut avoir la conséquence d'augmenter la charge de la dette, c'est-à-dire les intérêts que la France rembourse chaque année. Comme on a une dette importante et que le coût augmente, il peut y avoir, comme il y a eu avec les autres agences, un impact ponctuel, conjoncturel. Mais sur le moyen long terme, c'est sur d'autres facteurs qui peuvent expliquer l'augmentation des taux. Dont notamment la fameuse politique monétaire de hausse des taux entrepris maintenant par la Banque centrale européenne, depuis plus de deux ans, avec plus de 10 hausses des taux d'intérêt.
Mais est-ce que la dette française, aujourd'hui, est une valeur recherchée sur les marchés ? Est-ce que c'est un actif sûr ?
Alors oui. Vous allez me demander comment c'est possible vu les niveaux d'endettement. Je dis toujours qu'il faut, au milieu de l'obscurité, être un petit peu en lumière ! C'est vrai que l'on a des finances publiques dégradées. Mais quand vous regardez au niveau mondial, eh bien, énormément de pays ont aussi des finances publiques dégradées. Et pour un investisseur qui veut justement financer, diversifier son portefeuille, finalement, la dette française est assez sûre. Si on regarde pourquoi les investisseurs investissent en France et achètent de la dette française, c'est parce qu'on a une très bonne capacité à recouvrer la dette. Donc demain, c'est un problème de finances publiques, on sait que le Trésor aura la capacité d'augmenter les impôts ou en tout cas d'honorer notre dette. En attendant, malgré tout, la signature française est toujours une signature très valide.
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