Édito
Motion de censure déposée par les socialistes : la technique du pistolet à bouchon !

Les députés PS ont déposé lundi leur motion de censure contre le gouvernement de François Bayrou, l'accusant de "céder aux passions tristes de l'extrême droite", mais dans les faits, ils ne veulent surtout pas provoquer sa chute.

Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le premier secrétaire du Parti socialiste français (PS) Olivier Faure (à gauche) et le président du groupe parlementaire socialistes et apparents Boris Vallaud à l'Hôtel Matignon, à Paris, le 19 décembre 2024. (JULIEN DE ROSA / AFP)
Le premier secrétaire du Parti socialiste français (PS) Olivier Faure (à gauche) et le président du groupe parlementaire socialistes et apparents Boris Vallaud à l'Hôtel Matignon, à Paris, le 19 décembre 2024. (JULIEN DE ROSA / AFP)

Les députés PS ont déposé une motion de censure qui devrait être débattue mercredi 19 février. Et pourtant après avoir épargné François Bayrou sur les textes budgétaires, les socialistes ne veulent surtout pas faire chuter le gouvernement. Ce n’est pas leur but. Avec cette motion dite "spontanée", c’est l’article 49-2 de la Constitution, le groupe PS veut dénoncer la surenchère du gouvernement sur l’immigration, en particulier le fameux "sentiment de submersion" migratoire évoqué par François Bayrou, mais sans le faire tomber. Les socialistes se sont émancipés de la tutelle des insoumis et ils n’ont aucun intérêt à précipiter les échéances. François Hollande a vendu la mèche la semaine dernière. L’ancien Président a expliqué que cette motion "n’est pas faite pour renverser le gouvernement", mais "pour l’interpeller". 
  
Les socialistes veulent montrer que malgré les accusations de "trahison" proférées par Jean-Luc Mélenchon, ils sont toujours dans l’opposition. Mais ils récusent le chaos. D’où l’invention de cette motion en forme de pistolet à bouchon. C’est "pour de faux" comme on dit à la récré. Le groupe PS est coutumier de ce genre de positions un peu tortueuses. En septembre dernier, les députés PS emmenés par olivier Faure avaient validé le principe de la procédure de destitution du président de la République initiée par les Insoumis, avant de s’y opposer fermement en commission des Lois. La stratégie de LFI est plus simple à décrypter : il s’agit de faire tomber tous les gouvernements, à tout moment, et pour n’importe quel prétexte.

Peu de chances d'être adoptée

Les insoumis ont donc inventé, eux, la motion de censure pavlovienne, dégainée à tout bout de champ, déjà cinq fois contre François Bayrou. Elle n’est pas plus efficace que la version pistolet à bouchon. Sauf celle qui a renversé Michel Barnier début décembre grâce au renfort de Marine Le Pen. Une alliance des contraires source de blocage puisqu’en France, à l’inverse de l’Allemagne, des forces politiques peuvent s’allier à l’Assemblée pour renverser un gouvernement, sans devoir présenter une alternative pour le remplacer.
 
Pour que la motion de censure des socialistes soit approuvée, ce qui paraît impossible, il faudrait que la gauche reçoive le renfort des députés RN et ceux-ci n’approuveront pas un texte qui les accable. Si c’était le cas, Marine Le Pen battrait un nouveau record de cynisme manœuvrier. Mais sait-on jamais. À force de voter des motions de censure à blanc, on peut mélanger les cartouches et un malencontreux accident est toujours possible. Pour les socialistes, ce serait un peu l’histoire du gars qui nettoie son fusil et qui se tire une balle dans le pied. "Oups, excusez-moi, le coup est parti est tout seul…"

Lancez la conversation

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.