Édito
Budget 2026 : l’heure de vérité approche pour François Bayrou

François Bayrou doit enfin traduire en actes son obsession de la lutte contre la dette. Mais à l'approche de ses annonces budgétaires, mardi, le Premier ministre ne donne pas beaucoup d'indices.

Article rédigé par Agathe Lambret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
François Bayrou après une réunion interministérielle des territoires d'outre-mer au ministère des Territoires d'outre-mer, à Paris, le 10 juillet 2025. (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)
François Bayrou après une réunion interministérielle des territoires d'outre-mer au ministère des Territoires d'outre-mer, à Paris, le 10 juillet 2025. (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

François Bayrou l’a dit et redit : c’est son "Himalaya", la plus haute chaîne de montagnes au monde, celle dont l’ascension peut être mortelle. Dès sa prise de fonction, en décembre, l'actuel Premier ministre assurait connaître "la difficulté de la situation". C’est l’heure de vérité parce que François Bayrou nous a serinés qu’il fallait lutter contre la dette, depuis près de 30 ans. C’est son ADN, la quintessence de son combat politique.

En 2002 déjà, sur RTL, celui qui venait de se présenter pour la première fois à la présidentielle alertait :
"La dette de la France est de 1 000 milliards d’euros, 6 000 milliards de francs", et d’ajouter : "c’est un chiffre tellement astronomique qu’on se dit qu’il n’a pas de réalité." Aujourd’hui, la dette est de plus de 3 000 milliards, et c’est l’heure de vérité, parce que, pour la première fois, François Bayrou va devoir démontrer — lui, l’agrégé de lettres classiques — qu’il n’a pas que des mots pesés qu’il “se sert lui-même”, mais qu’il peut mettre sa doctrine en pratique.

François Bayrou doit faire ses propositions mardi 15 juillet, mais pas grand-chose ne filtre. Le Premier ministre a parlé pendant une heure et demie jeudi 10 juillet, mais n’a rien lâché, si ce n’est que ce n’est pas l’impôt qui résoudra les problèmes. Il a concédé que "des efforts particuliers" pourraient être demandés ici ou là. Il y a néanmoins une chose qui se dessine. Le Premier ministre pourrait renvoyer la balle dans le camp d’en face, proposer plusieurs pistes, et puis se décharger sur les parlementaires ! Cette semaine, au Sénat, le Premier ministre a bien insisté sur le fait que le gouvernement présenterait des réponses, mais que ce serait ensuite au Parlement de choisir, appelant à ne pas confondre les responsabilités. "Le budget, c’est vous qui l’adopterez", s’est comme déchargé le maire de Pau. 

Les oppositions n'ont aucun intérêt à s'impliquer

Ce n'est pas si surprenant, François Bayrou est toujours là, plus de six mois après, quand beaucoup ne lui donnaient pas trois mois. Même ses détracteurs admirent sa capacité à louvoyer : tantôt à droite, tantôt à gauche, il finit toujours par esquiver les obstacles… jusqu’à présent. Il pourrait donc calquer une méthode bien rodée sur le budget, même si cela rend fou le président de la République, qui aimerait un “cap clair” — et pas seulement des “impressions”, mais clair n’est pas béarnais. Laisser ainsi le choix reste une méthode est étonnante, quand on répète depuis des mois qu’on n’a pas le choix. Le Premier ministre le sait pertinemment. Les oppositions n’ont aucun intérêt à se salir les mains sur le budget. C’est tellement plus confortable de laisser Matignon faire le sale boulot. Des oppositions qui avaient préféré débattre amendement chips ou mesure croquettes lors du budget Barnier

Si le Premier ministre était si sûr de lui, si le moment était si grave, il mettrait ses idées sur la table et dirait : c’est à prendre ou à laisser, quitte à mettre son départ dans la balance. Lui qui aime citer Cyrano :
"Sans un pli, sans une tache… malgré eux", il emporterait son panache. Imagine-t-on un alpiniste tergiverser en bas de l’Everest, et demander à ses camarades restés au refuge de choisir pour lui ?

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