Procès des viols de Mazan : "Cela a été quatre mois d'une extrême intensité", témoigne l'avocat Stéphane Babonneau

Le procès des viols de Mazan, débuté en septembre 2024 à Avignon, a marqué l’histoire judiciaire. Dominique Pelicot et 50 complices ont été jugés pour avoir drogué et violé Gisèle Pelicot pendant dix ans.

Article rédigé par Mathilde Lemaire
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Gisèle Pelicot et son avocat Stéphane Babonneau, au palais de justice d'Avignon, le 27 novembre 2024. (CHRISTOPHE SIMON / AFP)
Gisèle Pelicot et son avocat Stéphane Babonneau, au palais de justice d'Avignon, le 27 novembre 2024. (CHRISTOPHE SIMON / AFP)

Le 2 septembre 2024, le procès des viols de Mazan s’ouvre à la cour criminelle d’Avignon. Dominique Pelicot est jugé pour avoir, pendant 10 ans, drogué son épouse pour la violer et la faire violer par des inconnus recrutés sur internet. Au total, ils sont 51 accusés et tous ont été identifiés sur les vidéos tournées par le mari pervers, Dominique Pelicot. La victime, encore inconnue alors, Gisèle Pelicot leur fait face et annonce qu’elle souhaite la levée du huis clos. "À travers cette ouverture de la salle d'audience au public, elle souhaite sensibiliser afin que des faits comme ceux-là ne se reproduisent plus jamais. C'est aussi une manière pour elle de dire que la honte change de camp", souligne Stéphane Babonneau, l'un des deux avocats de Gisèle Pelicot.

Personne, à l’ouverture de l’audience, ne pouvait anticiper le retentissement mondial qu’allait avoir ce procès, et l’icône qu’allait devenir Gisèle Pelicot. "C'était impossible d'imaginer que ça allait prendre cette ampleur. D'ailleurs Gisèle Pelicot, elle-même, n'avait pas prévu de rester ces quatre mois. On s'est tous adapté à ce moment qui est devenu un moment d'histoire judiciaire. Nous avons été invités en Argentine et partout où nous sommes passés, tout le monde était au courant de cette affaire", explique l'avocat.

"Gisèle Pelicot a reçu du courrier en provenance du monde entier. Tout le monde s’est reconnu dans la préoccupation que les femmes puissent être victimes de faits d’une telle gravité."

Stéphane Babonneau

à franceinfo

Ce procès est sans nul doute le procès d'une vie pour Stéphane Babonneau de par sa portée internationale et vertigineuse. "Je pense que c’est le procès le plus important de ma carrière. Cela a été quatre mois d’une extrême intensité, exposés à des choses très difficiles, et je pense que nous avons tous été soulagés de reprendre une vie normale", confie Stéphane Babonneau.

Un avant et un après le procès Mazan

Depuis, l'avocat a été amené à travailler sur d'autres dossiers de violences sexuelles, mais désormais en ayant "conscience du poids de l'héritage du procès Mazan. Après Mazan, Il y a une difficulté à défendre les personnes accusées de viol qui est encore plus grand qu'elle ne l'était avant parce qu'il y a forcément un parallèle qui se fait avec les viols de Mazan", poursuit Stéphane Babonneau.

Plus sensible et plus conscient, le regard a changé pour l'avocat pénaliste : "J'avais du mal à comprendre l'expression culture du viol, que je trouvais un peu simpliste. Pendant ces quatre mois, enfermé huit heures par jour à écouter des manières de justifier la commission du viol, cela m'a beaucoup interrogé. Cette expression culture du viol prenait un sens nouveau : le viol, c'est la résultante ultime d'inégalités, de comportements sexistes, j'y suis beaucoup plus sensible."

"Quand j'ai su que j’allais avoir une petite fille, je me suis demandé quelle place serait réservée aux femmes dans le monde dans lequel ma fille va grandir. Tout ce que Gisèle Pélicot fait, elle le fait pour les générations futures."

Stéphane Babonneau

à franceinfo

Gisèle Pelicot se prépare pour le deuxième procès de Mazan, en octobre. Seize des dix-sept accusés qui avaient fait appel du verdict se sont finalement désistés. Un seul sera donc rejugé. Après cela, le 27 janvier, elle publiera son livre récit, traduit en 20 langues.

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