Au Brésil, l'essor des discours masculinistes inquiète le gouvernement qui constate en parallèle une hausse des violences envers les femmes

Au Brésil comme en France, les discours masculinistes prospèrent sur les réseaux sociaux, portés des influenceurs qui monétisent ces contenus. Ce phénomène inquiète les autorités car il coïncide avec une hausse des violences contre les femmes.

Article rédigé par franceinfo - Jean-Mathieu Albertini
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Après une explosion des contenus masculinistes entre 2021 et 2024, la ministre des Femmes Cida Gonçalves plaide pour une régulation des réseaux sociaux. (ARTUR DEBAT / MOMENT MOBILE ED / GETTY)
Après une explosion des contenus masculinistes entre 2021 et 2024, la ministre des Femmes Cida Gonçalves plaide pour une régulation des réseaux sociaux. (ARTUR DEBAT / MOMENT MOBILE ED / GETTY)

"Les femmes veulent être dominées", dit une voix grave modifiée. Visage masqué, l'homme joue la carte du compagnon mystère quand d'autres s'affichent beaucoup plus ouvertement. C'est en tout cas le genre de contenu que l'on retrouve dans une centaine de milliers de vidéos masculinistes qui inondent YouTube et cumulent en tout près de 4 milliards de vues, selon une étude du Netlab, de l'université fédérale de Rio de Janeiro.

Ce chiffre énorme se concentre sur 137 chaînes de la plateforme. Luciane Belin, qui a participé à cette étude, décrypte cet univers très codifié de la "machosphère". Elle a constaté une explosion de ces vidéos depuis 2018 : "Il y a eu une augmentation des contenus misogynes, principalement entre 2021 et 2024, quand nous avons arrêté notre collecte, raconte-t-elle. Cette période concentre 88% des contenus publiés."

Les décors sont travaillés, le matériel est professionnel et surtout, 80% de ses contenus sont monétisés : publicités, formations, appels aux dons... Tout est bon pour soutirer de l'argent. "Ils ont trouvé une niche, décrit Luciane Belin. Ils ont perçu un public de potentiels consommateurs et exploitent cette question de la masculinité fragile et des doutes que ces hommes rencontrent dans leur masculinité." Normalement, YouTube est censé modérer ce type de contenu misogyne, mais les masculinistes utilisent des termes spécifiques pour contourner les règles.

Une influence sur le monde réel ?

D'après leur étude, Luciane Belin et ses collègues ne peuvent démontrer scientifiquement que cela entraîne une augmentation de la violence dans le monde réel. Mais vu le genre de vidéos découvertes, la chercheuse ne l'exclut pas. "On a identifié des chaînes, raconte-t-elle, qui donnent des conseils pour éviter d'être puni par une loi qui protège contre les violences domestiques ou pour éviter de payer une pension à ses enfants. Ils expliquent comment contourner des dispositifs juridiques mis en place pour protéger les femmes."

De son côté, la ministre des Femmes Cida Gonçalves plaide pour une régulation des réseaux sociaux. Pour elle, le pas est franchi : "Si l'on compare la période d'augmentation de violences contre les femmes, avec la période de multiplication des groupes masculinistes, on ne peut que constater qu'une chose influence l'autre", assure-t-elle.

Ce dossier est enlisé au Congrès, mais la Cour suprême pourrait bientôt rendre une décision sur le sujet.

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