Le Chant du peuple

16 ans après avoir fait découvrir le rébétiko en bande dessinée, David Prudhomme livre avec "Rébétissa" son pendant féminin. Mélancolique et envoutant.

Article rédigé par Jean-Christophe Ogier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Venez chanter, danser et vous asseoir à leur table. (DAVID PRUDHOMME / FUTUROPOLIS)
Venez chanter, danser et vous asseoir à leur table. (DAVID PRUDHOMME / FUTUROPOLIS)

La musique que vous entendez en ouverture de la version sonore de cette chronique a pour nom le rébétiko, un genre musical populaire, né aux confins de la Grèce et de la Turquie, dans les années 1920.

Le chant de l'exil

En 2009, David Prudhomme publiait Rébétiko. L’album, primé dans la foulée aux festivals d’Angoulême et de Blois, raconte le temps d’une journée et d’une longue nuit de danses et de chants – et aussi d’alcool et de mauvaise herbe fumée jusqu’au matin – l’errance, à Athènes, d’une poignée de fiers et pauvres musiciens aux chapeaux mous et à la moustache longue.

La petite troupe de voyous, car ce sont des voyous, il faut bien le dire, appartient à la cohorte des Grecs de Smyrne – aujourd’hui la ville s’appelle Izmir –, un million et demi de migrants que la Turquie a contraint au départ quand ses troupes ont repris le contrôle de cette région.

"Je n’ai pas tout de suite été conquis par cette musique un peu âpre. Mais le contexte politique et social, et la censure qui frappe le rébétiko sont autant de questions qui résonnent en moi."

L'auteur, David Prudhomme,

à franceinfo

Retour au Pirée

David Prudhomme a attendu 16 ans pour retrouver ses personnages. Entre-temps, il a beaucoup produit, mais loin du Pirée. Il y revient avec un nouveau livre qui a pour titre Rébétissa. Il tourne cette fois autour de deux figures féminines, chanteuses et danseuses, que les rébètes du premier tome accompagnent de leurs instruments : ouds, bouzoukis, kanonakis, cymbalums, lyres politikaïas.

Le drame est que le dictateur Ioánnis Metaxás, qui dirige le pays d’une main de fer depuis 1936, interdit que l’on joue ces musiques qui rappellent trop le voisin haï de l’autre côté de la mer Egée. Tout cela est vrai et sonne vrai.

Pour camper Bebà et Marika, les deux magnifiques chanteuses aux yeux langoureux, à la beauté ondulante dans des pages lumineuses, empreintes de gravité et d’une sensualité torride, David Prudhomme s’est clairement inspiré de Róza Eskenázy et de Ríta Abatzí, deux stars du rébétiko.

Mettez-vous leur voix en tête en lisant Rébétissa de David Prudhomme, aux éditions Futuropolis, d’ores et déjà l’une des toutes grandes bandes dessinées de 2025.

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