"C'est aussi un cri de colère" affirme Anna Mouglalis, sur les planches dans l'adaptation de "La chair est triste, hélas", l'œuvre féministe d'Ovidie
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Samedi 20 septembre, Anna Mouglalis était "L'invitée culture" de franceinfo. Du 9 septembre au 25 octobre au Théâtre de l'Atelier, la comédienne se produit dans "La chair est triste, hélas", une adaptation du livre d'Ovidie paru en 2023.
Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour le regarder en intégralité.
Le spectacle s'appelle "La chair est triste, hélas", un texte adapté de l'autrice et actrice féministe Ovidie. C'est un questionnement intime sur les rôles imposés aux femmes et la façon dont elles finissent par s'y conformer. Qu'est-ce qui vous a touchée le plus quand vous avez découvert ce texte ?
Anna Mouglalis : C'est un texte qui dénonce, entre autres, toutes les injonctions faites par la sexualité, l'hétérosexualité. Par exemple ce que ça coûte aux femmes de vouloir se conformer, s'épiler, acheter de la lingerie, mettre de la crème, lutter contre le vieillissement. Ce qui m'a vraiment touchée quand je l'ai lu, c'est une expérience à la fois extrêmement personnelle. Le parcours d'Ovidie est passionnant et ce qu'elle en fait est passionnant. Et en même temps, c'est tellement juste, tellement sincère que ça en devient quelque chose de l'ordre du commun pour les femmes. Et c'est vraiment tout le sens de cette adaptation au théâtre que je porte en ce moment, de pouvoir partager tout ce qu'elle écrit dans cet essai avec le public, alors même que c'est toujours de l'ordre du tabou. Il y a une injonction aussi à dire qu'on aime le sexe. En revanche, parler vraiment de sexualité, voilà, dans le concret de la sexualité, ça, c'est toujours tabou.
C'était important pour vous de vraiment partager, porter plus loin encore ces mots-là ?
Anna Mouglalis : Les porter plus loin. Moi, c'est un texte qui me permet de m'incarner. Le fait de jouer, c'est incarner des personnages. Là, je n'incarne pas Ovidie, mais en portant ses mots, j'ai l'impression d'être plus en moi et c'est une expérience très nouvelle aussi. Parce que c'est une mise en scène très frontale, je vois le public et c'est un dialogue, une forme de communion. C'est aussi un texte qui est plein d'humour. Alors, l'humour, on sait comment ça fonctionne : plus c'est vrai, plus c'est dur, plus ça fait rire. Et on sent dans la salle, certaines fois, des rires qui saisissent le public. Mais de pouvoir rire ensemble entre femmes de ces expériences qui sont les nôtres, qu'on ne peut pas remettre en cause, c'est notre vécu, ça a quelque chose de vraiment cathartique et de jouissif. J'ai l'impression que c'est nécessaire.
Ce qui est fou, Anna, c'est que dans ce texte, on découvre quand même que tous ces jugements, ces régimes qu'on s'inflige, cette mutilation quand on fait de la chirurgie esthétique, on se fait du mal et ce sont des choses, finalement, qu'on valide, qu'on fait, qu'on suit.
Anna Mouglalis : On paye même pour ça. Alors, chacune a son parcours. Pour autant, oui, il y a plein de choses sur lesquelles on se rejoint. C'est vraiment un plaidoyer très singulier, mais qui a quelque chose d'universel aussi. Pour moi, il y a quelque chose de l'ordre de la consolation, c'est une dénonciation du système de domination masculine, de l'hétérosexualité comme un système politique et c'est une invitation à réfléchir ensemble à comment en sortir. C'est aussi un cri de colère, vraiment, mais une colère de survivante qui permet d'exorciser la douleur, l'anéantissement, par l'être ensemble. C'est de la colère, ce n'est pas de la haine. C'est une colère qui répond à la haine qu'est la misogynie, cette misogynie qui est institutionnalisée.
Et vous voulez dire, d'ailleurs, que ce n'est pas un spectacle contre les hommes ?
Anna Mouglalis : Ce n'est pas un spectacle de haine. C'est même une invitation aux hommes à entendre ce dont on parle entre nous et quelles sont nos expériences. À ne pas rester toujours dans cette narration de l'universel masculin qui fait qu'on ne sait pas quel est le vécu des femmes. Donc c'est une invitation à essayer de trouver une hétérosexualité possible, une hétérosexualité qui se dédouanerait du patriarcat.
Les hommes à la sortie de ce spectacle, parce qu'il y en a évidemment dans la salle, qu'est-ce qu'ils vous disent ?
Anna Mouglalis : Pour l'instant, je n'ai pas trop parlé avec des hommes. Ils ne sont pas venus à ma rencontre. Il y en a effectivement de plus en plus depuis qu'on a commencé à jouer. Mais très simplement, ce que je peux vous dire, c'est que, moi, ce livre, ce texte, cet essai d'Ovidie, c'est mon compagnon qui me l'a offert, qui l'a lu avant moi et qui m'a dit : "Tiens, lis ça, je pense que ça va te plaire." Et on en a beaucoup discuté. Je dis juste qu'effectivement, les hommes risquent d'entendre des choses auxquelles ils ne s'attendent pas, mais que c'est important de les écouter. Et ceux qui ne supportent pas font vraiment partie du problème.
Vous, ça vous a mené à un autre regard sur vos, peut-être, conditionnements à vous en tant que femme ?
Anna Mouglalis :C'est plutôt que c'est libérateur de pouvoir le dire ensemble, de ne plus être isolée, de se dire : "Je ne suis pas le problème." Ce sont nos expériences collectives.
Et les femmes, elles vous parlent peut-être après le spectacle. Que disent-elles ?
Anna Mouglalis : Il y a beaucoup de remerciements. On a la chance d'avoir Ovidie avec nous régulièrement qui vient saluer avec moi. Le livre se vend dans le hall du théâtre comme des petits pains parce que c'est surprenant et nécessaire, ces textes. Il y a beaucoup de remerciements, des standing ovations.
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