Vidéo Disparues de Pontcharra : comment un homme qui a avoué un meurtre pourrait échapper au procès, ou une affaire de prescription… à rebondissements

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Article rédigé par France 2
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Comment un homme qui a avoué un crime pourrait-il échapper à la justice ? La question au cœur de cet extrait d'"Affaires sensibles" hante une famille de Pontcharra. Bien que celui qu'ils ont toujours soupçonné ait fini par reconnaître, 36 ans après, avoir tué Marie-Thérèse Bonfanti en 1986, la justice l'a libéré... car ce meurtre serait prescrit.

Pontcharra, petite commune iséroise, fin 2022. Trente-six ans après la disparition de Marie-Thérèse Bonfanti, le principal suspect a été interpellé. Il a fini par avouer l'avoir étranglée, le 22 mai 1986, et le corps de la victime a pu être retrouvé. Grâce à cette arrestation, les enquêteurs espèrent même la réouverture d'une autre enquête sur la disparition de Marie-Ange Billoud.

Après quatre décennies de recherches acharnées, la famille Bonfanti est soulagée de pouvoir enfin se recueillir sur la sépulture de Marie-Thérèse. Mais le responsable de son malheur pourrait échapper au procès... et ce, le plus légalement du monde. En matière pénale, un crime commis avant 2017 est prescrit au bout de dix ans. Depuis la fin des années 1990, plus personne ne peut donc être condamné pour le meurtre de Marie-Thérèse Bonfanti. C'est ce que plaide l'avocate d'Yves Chatain. Et celui-ci, incarcéré en 2022 à la prison de Grenoble, réclame alors sa libération.

Le combat d'une famille contre la prescription

Cette seule pensée est insupportable pour les Bonfanti, qui contre-attaquent devant la Cour de cassation. Leur avocat conteste la prescription en cas de disparition. "Le point de départ de la prescription, plaide Me Bernard Boulloud, ça ne doit pas être le jour où la personne a été tuée, mais le jour où la personne a été retrouvée, ou le jour des aveux. Tant qu'on n'a pas retrouvé le cadavre, on ne peut pas savoir qu'il y a eu meurtre…"

Cet argument est destiné à repousser la prescription du crime, mais il ne convainc pas la plus haute juridiction. Le 28 novembre 2023, elle déclare le meurtre de Marie-Thérèse Bonfanti prescrit. Yves Chatain ne peut plus être poursuivi, il quitte le centre de détention de Grenoble et retrouve la liberté. Cette libération a une autre conséquence : à peine rouverte, l'enquête sur la disparition de Marie-Ange Billoud est suspendue, Yves Chatain n'est même pas entendu. Libre, mais sous contrôle judiciaire, il s'installe en Savoie, à quelques kilomètres seulement de la famille Bonfanti.

Coup de théâtre à la cour d'appel de Lyon

Malgré les obstacles, les Bonfanti refusent de baisser les bras. Pour leur avocat, "on ne voit pas comment un meurtrier qui a reconnu son forfait, a indiqué où se trouvait le corps (...), pourrait ne pas être jugé, ne pourrait pas être condamné pénalement". Et le dernier rebondissement judiciaire en date dans cette affaire semble lui donner raison... Le 6 décembre dernier, la cour d'appel de Lyon devait clôturer les poursuites contre Yves Chatain. Coup de théâtre : contre la Cour de cassation, les juges lyonnais ont rejeté la prescription dans l'affaire Bonfanti !

La famille de Marie-Thérèse n'a maintenant plus qu'un souhait : "Que le procès puisse enfin commencer, et que Chatain puisse retourner en prison, puisque c'est là où il doit aller." Ce dernier s'est de nouveau pourvu en cassation. Sollicité par "Affaires sensibles", il n'a pas souhaité s'exprimer. 

C'est dans le courant de cette année 2025 que la plus haute juridiction va trancher sur la prescription du dossier, cette fois définitivement. La reprise d'une autre enquête sur la disparition de Marie-Ange Billoud dépend de cette décision...

Extrait de "Disparues de Pontcharra : 36 ans de mystères", à voir le 19 janvier 2025 dans "Affaires sensibles", une coproduction France Télévisions, France Inter et l'INA, adaptée d’une émission de France Inter.

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